Les salariés de la fédération des chasseurs demandent une nouvelle mise sous tutelle
Quelques mois après la fin d'une première mise sous tutelle, les salariés de cette association dénoncent un retour des dysfonctionnements et des pressions. Leur demande de nomination d'un administrateur s'ajoute à celle d'une association de chasseurs, opposants historiques à Jo Condé.
Le siège de la fédération des chasseurs, situé à Puyricard. (Photo : DR)
L'enjeu
Deux procédures judiciaires ont été lancées pour obtenir la désignation d'un administrateur provisoire à la tête de l'association qui représente les 18 000 chasseurs du département.
Le contexte
La fédération accumule les conflits judiciaires et sociaux depuis plusieurs années, centrés autour de l'influence de l'ex président Jo Condé. Elle est sortie d'une année de tutelle en avril 2019.
Ils et elles sont dix sur onze à en appeler à la justice. L’ensemble des salariés de la fédération des chasseurs des Bouches-du-Rhône (FDC 13), à l’exception du directeur, demandent qu’un administrateur provisoire prenne le contrôle de l’association. Représentant les 18 000 chasseurs du département, celle-ci a déjà été placée sous tutelle entre avril 2018 et avril 2019. À ce moment-clé de rendre ses prérogatives au conseil d’administration suspendu, l’administrateur provisoire Frédéric Avazeri formait un “vœu” : “il faut maintenant que la sérénité revienne durablement au sein de cette fédération”. Il n’a semble-t-il pas été exaucé.
“À compter de cette période, les salariés ont constaté un retour des dysfonctionnements”, avance pourtant Benjamin Cordiez, leur avocat. Celui-ci développe aussi la difficulté de ses clients à assurer sereinement leurs tâches (prévention du braconnage, indemnisation des dégâts des sangliers, validation du permis de chasser…). Ce point est sensible car la FDC 13 exerce ces missions de service public au nom de l’État.
Pour lui, la part de salariés qui a saisi la justice montre que “cela dépasse” les employés impliqués dans l’affaire du héron cendré, qui a secoué la fédération en 2013. Pour rappel, le président de l’époque, Jean-Marie Rimez, et son prédécesseur Jo Condé, s’étaient livrés à des pressions, jusqu’aux menaces, pour étouffer le délit commis par ce dernier en abattant une espèce protégée. Tous deux condamnés, ils sont censés être écartés de la fédération. Six des neuf salariés étaient alors en arrêt de travail devant le climat délétère qui s’était installé. “Nous avons parmi les salariés qui portent le recours des salariés qui étaient à l’époque en arrêt de travail, ceux qui n’y étaient pas, ceux qui ont été recruté par le conseil d’administration comme ceux qui ont été recrutés par l’administrateur provisoire”, souligne Ludovic Collart, délégué syndical CGT et technicien de la fédération.
Les opposants à l’équipe en place en renfort
Avazeri a fait tout faux.
Claude Martin, président du comité de défense des chasseurs.
Ils viennent ainsi renforcer une autre procédure, initiée celle-là par le comité de défense des chasseurs des Bouches-du-Rhône (CDC 13), qui regroupe les opposants à l’équipe en place. Pour ces chasseurs, la tant attendue tutelle n’a pas eu l’impact espéré, sous la conduite de Frédéric Avazeri. “Il a fait tout faux celui-là”, souffle Claude Martin, président de l’association. Le reproche principal est d’avoir reconduit le conseil d’administration précédent, malgré les doutes sur sa volonté de réforme. “Ses membres refusent toute responsabilité dans la dérive de la fédération et toute évolution dans le système de gouvernance”, constatait l’administrateur dans son rapport d’étape au tribunal, en décembre 2018.
Avocat du CDC 13, Marc Mamelli compte bien s’appuyer sur cette question de la gouvernance dans l’audience en référé fixée ce mardi 5 novembre. “Nous considérons qu’il n’y a plus d’organe dirigeant constitué. L’élection du président Bernard Mollar [en février 2018] avait été considérée comme irrégulière dans le jugement qui prononçait la tutelle”, rappelle-t-il. Cette première audience pourrait cependant être reportée, l’avocat de la fédération, Philippe Calandra, n’ayant été désigné que tardivement. Nous n’avons pas réussi à joindre ce dernier.
Le rendez-vous du recours des salariés est quant à lui fixé au 14 novembre “Il faut que cela s’arrête”, plaide le syndicaliste Frédéric Collart. Il évoque des pressions exercées comme le retrait des véhicules de fonction, “pourtant prévus par la convention collective. Or, les deux techniciens qui en bénéficient sont les deux délégués syndicaux…”
Une procédure pressentie par l’administrateur
Outre ces “mesures de rétorsion”, Benjamin Cordiez souligne notamment que “les anciens dirigeants semblent être toujours dans l’environnement de la fédération.” Et de rappeler un épisode abordé par Marsactu en août : “Cette présence s’est manifestée à l’occasion des élections professionnelles où l’ancien président Jo Condé aurait exercé des pressions. Celles-ci sont inadmissibles à plusieurs titres. Il est tout d’abord interdit de faire pression sur une élection et il est de plus interdit de fédération suite à une condamnation pénale.” Joint par Marsactu, Jo Condé avait alors démenti ce témoignage d’un salarié.
Ce dernier avait été jugé suffisamment crédible par Frédéric Avazeri pour alerter le président en exercice, Bernard Mollar. “Malgré les différentes alertes que j’ai pu recevoir et que je vous ai transmises, il semble que rien ne change”, lui écrivait-il le 11 juillet. En septembre, il a jeté l’éponge et de lui-même demandé la fin de la mission de contrôle sur la fédération qu’il avait conservée. Sollicité, il n’a pas donné suite à notre demande d’éclaircissement sur le motif de cette décision.
La suite logique était déjà annoncée dans son courrier : le tribunal de grande instance d’Aix-en-Provence pourrait, “saisi par tout tiers, placer cette fédération à nouveau sous administration provisoire et écarter définitivement les membres actuels du conseil d’administration.” Un avertissement qui ressemblait presque à un vœu.
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