Les enseignants de Versailles amènent la rénovation de leur collège devant le tribunal
Inquiets de la présence avérée d’amiante sur le chantier, les enseignants du collège Versailles ont déposé une requête devant la justice pour tenter de contraindre le département à prendre des précautions dans la reconstruction de l'établissement où ils exercent toujours.
Les enseignants de Versailles amènent la rénovation de leur collège devant le tribunal
L'enjeu
La justice administrative est amené à trancher sur les risques encourus par les personnels du fait de la présence amiante mal repérée dans les bâtiments du collège Versailles.
Le contexte
Les enseignants du collège Versailles bataillent depuis des mois sur la façon dont le département mène le chantier de démolition de leur collège installé dans une impasse à Saint-Lazare.
Malgré la grève des avocats, ce lundi Julie Andreu a choisi de plaider au nom de “l’urgence du dossier”. “Il y a péril grave”, a estimé hier devant le tribunal administratif de Marseille celle qui défend les enseignants du collège Versailles. Cet établissement vétuste du 3ème arrondissement fait l’objet d’un projet de démolition et de reconstruction dont le conseil départemental est le principal pilote et financeur.
Chiffré à 24 millions d’euros, le chantier, qui a débuté avec un an de retard en juillet 2019, soulève un risque lié à l’amiante, estiment les professeurs. Après avoir exercé leur droit de retrait à trois reprises depuis la rentrée, le collectif des enseignants du collège, deux syndicats (Sud-Éducation et CGT Éduc’action) et l’association des victimes de l’amiante dans les locaux de l’éducation (AVALE 13) se sont résolus à porter l’affaire devant la juge des référés (lire notre article sur la rentrée difficile de ce collège).
Face à ce qu’ils qualifient de manquements, les requérants demandent à la justice de suspendre le chantier, puis de faire réaliser de nouveaux rapports de repérage, et enfin de communiquer sur l’avancement des travaux. Durant tout le projet, étalé sur trois ans, ils souhaitent également que les cours soient délocalisés, par exemple à la caserne du Muy comme cela avait été envisagé l’année dernière. Après trois semaines de blocage par les parents d’élèves et enseignants au printemps 2019, le département avait définitivement décidé du maintien sur site des collégiens durant les travaux.
Avant l’audience, le personnel s’est rassemblé sur le trottoir de la rue Breteuil mais seule une poignée d’enseignants a pu assister aux débats. Certains ont laissé échapper leur colère durant la plaidoirie de Me Thomas Gaspar, l’avocat du département, en l’accusant d’être de “mauvaise foi” et de “mentir”. Georges Pitois, professeur d’anglais, justifie l’inquiétude de ses collègues : “nous avons eu accès aux résultats de plusieurs sondages d’amiante, mais ces documents sont toujours incomplets et confus”.
La présence d’amiante avérée depuis 2008
Dans ses motivations, l’avocat du conseil départemental précise qu’au collège Versailles “la présence d’amiante est effectivement avérée depuis 2008 (date d’établissement du diagnostic technique amiante)”. L’amiante est interdite sur les chantiers depuis 1997 et depuis 2001, chaque établissement scolaire doit réaliser le DTA, un diagnostic amiante obligatoire tous les trois ans au plus. Des recherches ont donc notamment été effectuées au collège Versailles en 2013, 2015 et 2017.
En 2018, avant le début des travaux, le département a produit un cahier de phasage, document technique qui résume les quatre grandes étapes du chantier. “Dans ce document, le maître d’ouvrage reprend les diagnostics d’amiante datés de 2013. Or, non seulement ils sont incomplets, mais en plus ils ne contiennent pas de repérage destructif alors que ceux-ci sont obligatoires avant tout travaux de démolition !”, s’est indigné l’avocate Julie Andreu, en se basant sur un arrêté daté du 26 juin 2013. Le terme technique décrit les sondages effectués dans la structure des bâtiments pour repérer l’amiante qui pourrait être libéré durant la phase de démolition.
En face, l’avocat du département a expliqué que le cahier de phasage détaillait justement l’agenda de ces repérages destructifs : “ils auront lieu à l’été 2020, lorsque la phase 1 du chantier sera terminée, et avant d’attaquer à la rentrée la démolition de la phase 2”, assure Thomas Gaspar. Cette seconde phase concerne le bâtiment principal où sont toujours accueillis les élèves. Sauf que selon la défense des enseignants du collège Versailles, des travaux de démolition ont déjà effectué, sans ces repérages préalables des zones amiantées : “la démolition du bâtiment D est par exemple prévue à la phase 2, donc les repérages destructifs n’ont pas encore eu lieu. Or, dans la phase qui vient de s’achever, et qui au passage s’est étalée sur cinq mois au lieu de deux, une salle de classe du bâtiment D a bien été détruite, tout comme le préau”, rétorque Julie Andreu, pointant ainsi ce qu’elle estime être des incohérences dans le calendrier de travaux.
“Le département réalise sciemment des travaux dangereux ? »
L’avocat du département a quant à lui estimé que les travaux prévus sur cette première année de chantier n’étaient que d’ordre “mineur”. Avant d’interpeller le tribunal avec une question rhétorique qui a surpris la salle : “comment pourrait-on imaginer que le département des Bouches-du-Rhône réalise sciemment des travaux susceptibles d’être dangereux ?” La Carsat, compétente en matière d’amiante, a notamment interpelé la collectivité locale sur les lacunes des analyses préalables au chantier, ce qui avait mené à une suspension des travaux au mois d’octobre. Les nouveaux prélèvements ne s’étant pas avérés suffisants, la Carsat a effectué une deuxième sommation juste avant les fêtes.
Selon l’avocat du département, les sondages d’amiante seraient, enfin, à la hauteur de ce que recommande la réglementation. “Nous n’avons pas eu de retour définitif, mais il y a quelques jours sur le chantier, un représentant de la Carsat nous a dit oralement qu’il n’y avait plus de souci”, glisse-t-il en marge de l’audience. Dans le même temps, Julie Andreu rappelle que l’amiante est aujourd’hui la première cause de pathologie d’origine professionnelle : “la spécificité de l’amiante, c’est qu’une exposition même ponctuelle à une seule fibre peut atteindre les poumons et laisser des séquelles. C’est pour cela qu’il y a face à ce fléau un véritable arsenal législatif.”
En fin de plaidoirie, l’avocat de la collectivité présidée par Martine Vassal a concédé des “erreurs de communication” avant de conclure, provoquant une indignation bruyante : “c’est vrai que ce n’est pas facile de faire à la fois des travaux, de la communication et la campagne des élections municipales”. Le délibéré est attendu d’ici au 14 février.
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Vraiment elle a une bonne main Mme Vassal pour faire appel aux meilleures compétences qui existent sur le marché.
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