Les ex-Schlecker marseillais craignent d'être licenciés

Les ex-Schlecker marseillais craignent d'être licenciés

"Fermeture définitive du magasin le 22 mars". Sur la vitrine du Schlecker du 36 rue de la République, entre deux affiches de promotion flashy, trône une pancarte "artisanale" sur une feuille A4. Devant, ironie du sort, sur une pancarte de prix, on peut lire "en attendant U". A priori, il ne devrait pas faire partie des magasins transformés en enseigne U. Dans cette même rue, un magasin de l'enseigne a déjà fermé cet été. D'où l'impression de déjà-vu. Le troisième, situé boulevard des Dames devrait connaître le même sort. Les mois passent et les petits magasins de droguerie disparaissent les uns après les autres. 

En octobre, Marsactu révélait que Système U, qui a racheté Schlecker en 2012, prévoyait de fermer la moitié des magasins marseillais de l'enseigne allemande. A l'époque, le repreneur avait alors pris la plume dans un droit de réponse pour réaffirmer son "engagement fort sur l’emploi". Six mois plus tard, le danger qui menaçait les employés des magasins Schlecker s'est confirmé avec l'ouverture d'un plan de sauvegarde de l'emploi. Après une première manifestation à Toulon il y a quelques semaines, la CGT appelle ce jeudi à un rassemblement devant le 36 rue de la République.

29 postes menacés à Marseille

L'automne dernier, plusieurs salariés faisaient part de leur crainte quant à leur reclassement en interne lorsque leur magasin fermait. Face à cette inquiétude, la direction répondait qu'il y aurait des formations adaptées et que tous les anciens salariés Schlecker se verraient offrir un poste dans un "Utile", l'enseigne de proximité du groupe repreneur. Mi-février, la maison mère UP Sud a pourtant annoncé la mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi pour 217 des 700 ex-Schlecker. Il expliquait alors dans un communiqué : "Malgré les tentatives volontaristes de redynamiser les magasins sous enseigne Schlecker, ceux-ci creusent un déficit inquiétant et chutent en fréquentation, montrant ainsi un concept aujourd'hui à bout de souffle". Sollicitée, la direction du groupe U a refusé de s'exprimer : "Les choses avancent. Ce n'est pas le moment de communiquer", répond-on. 

Selon nos informations, 29 postes sont concernés à Marseille – soit par une suppression soit un reclassement – avec six fermetures de magasins. La première ville touchée est Nice avec 51 postes en péril. Les 63 employés du dépôt au Muy sont également concernés. Des négociations sont en cours entre les syndicats et la direction. Elles peuvent durer trois mois au maximum. "Tout ce que je peux vous dire pour le moment, c'est qu'on est dans l'attente, indique Jean-Louis Delgiglio, représentant CFTC, le syndicat majoritaire dans l'entreprise. Il s'agit de voir si les propositions sont concrètes et raisonnables. On veut du reclassement pour l'ensemble du personnel". A la CGT, on est moins optimiste : "Si on obtient trente reclassements on sera beau", explique sa représentante Gisèle Velasco. 

24 heures au lieu de 35

Le but d'un plan de sauvegarde de l'emploi est en principe de limiter au maximum les licenciements en opérant des reclassements. Il doit faire l'objet, dans le cas des ex-Schlecker, d'un accord collectif. Il entrera en vigueur après validation de la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte). Ce cadre juridique ne rassure pas les employés marseillais qui se sont pour certains réfugiés derrière la CGT. En octobre, plusieurs disaient leur méfiance à l'égard de la CFTC. Et pour fédérer le mouvement, ils sont allés chercher Charles Hoareau, figure du syndicalisme marseillais. Et le discours a changé de ton. "On a rejoint la CGT pour dénoncer ce que Système U a fait à nos magasins, ainsi que les pressions exercées sur les salariés", s'insurge une employée marseillaise dont le magasin a fermé. "Ils vont faire des propositions en sachant que nous allons les refuser", poursuit-elle. On va proposer à une caissière qui fait 35h à Marseille d'aller faire 24h en Savoie". 

Après un bref espoir suscité par le volontarisme affiché par Michel Rubino, un des cadres repreneurs, les employés marseillais avaient vite déchanté. Et s'il y a quelques mois ils suspectaient le caractère prémédité des fermetures de magasins et la destruction d'emplois. Ils disent en avoir désormais la certitude. "Système U est le grand absent des négociations, argumente Jean-Marc Taboni de la CGT. Ils décident mais ne paient pas. Dès le départ, ils savaient ce qui allait se passer".