Les dossiers chauds du conseil municipal de la disette
110 délibérations et deux parties. Ce conseil municipal nouvelle formule marque le début de l'ère Payan avec les premières orientations budgétaires qui actent avant tout que les caisses sont vides. Passage en revue des rapports les plus saillants.
Photo : BG
Ce lundi, Benoît Payan inaugure le premier vrai conseil de sa mandature. Une grande partie de ce qui constitue l’ordre du jour est une chute du conseil de décembre, raccourci du fait de son élection au poste de maire. Cet ordre du jour de 110 délibérations à débattre du matin au soir comprend notamment le rapport d’orientations budgétaires qui doit fixer le cap du premier budget du Printemps marseillais, voté un mois plus tard.
Le maire a pris soin de déminer le terrain en présentant le rapport d’audit du cabinet Deloitte qui officialise le peu de marges de manœuvre dont dispose la gauche unie. Le groupe d’opposition Les Républicains interviendra par la voix de trois orateurs pour démonter les conclusions du rapport et défendre le bilan de la droite. L’hypothèse d’une possible augmentation des impôts “qui n’interviendra qu’au moment du vote du budget en mars”, selon l’adjoint aux finances, Joël Canicave, devrait notamment agiter l’hémicycle. À moins que l’écran de fumée de la vente du stade Vélodrome nourrisse plus encore les échanges.
Mais ce conseil inaugural ne manque pas de sujets susceptibles de braquer les orateurs de la droite républicaine comme du Rassemblement national. Passage en revue des dossiers chauds sélectionnés par Marsactu.
Les réponses aux recommandations de la Chambre régionale des comptes
Le rapport d’information est une forme de zakouski pimenté qui doit ouvrir les débats du conseil. Il s’agit de présenter les actions mises en œuvre en réponse au rapport implacable de la chambre régionale des comptes, livré en 2019. Le sujet ne donne pas lieu à un vote mais offre une vue transversale des problèmes de la Ville. Les 25 pages de tableaux mettent ainsi en avant les questions financières, la gestion du patrimoine municipal, du bâti des écoles ou celle des ressources humaines. En face de chaque recommandation, la Ville a inscrit une date de mise en œuvre en jaune et, en vert la mention “réalisé”.
Avec ce code couleur, on trouve ainsi toute une liste d’actions comme “négocier de façon plus efficiente les prix des biens cédés” ou la question du stade Vélodrome pour lequel la Ville attend là aussi un avis avant d’augmenter “la part variable” du loyer. La crise du Covid étant passée par là, cette part variable appuyée sur le chiffre d’affaires ne risque guère d’évoluer à la hausse.
Accueil des réfugiés : des mots et des actes
La Ville accélère dans son projet d’affirmer Marseille comme “ville solidaire et port d’accueil”. Pour la part plus symbolique, elle rejoint l’association des villes et territoires accueillants (Anvita), après avoir affiché son soutien à l’ONG SOS Méditerranée. Pour les actions plus concrètes, un contrat territorial va être passé avec l’État. La Ville s’engagera à travailler à l’amélioration de tous les aspects de l’intégration des personnes réfugiées : formation au français, accès à l’emploi, au logement, aux soins et aux droits. Des domaines dont l’État a majoritairement la charge mais où la mairie affiche donc sa volonté de s’impliquer.
Et pour tout cela, le calendrier est rapproché : la Ville va commencer par recruter un agent chargé d’établir un diagnostic puis de piloter cette politique, dont le poste sera financé à 80 % par l’État. Les premières actions sont promises pour le deuxième semestre de cette année. La majorité doit s’attendre à voir les oppositions LR, comme RN, taper fort sur ces orientations. “C’est proprement hallucinant de vouloir faire de Marseille une ville accueillante alors que 30 000 Marseillais vivent dans des logements indignes”, râle le sénateur RN Stéphane Ravier qui fera de ces rapports un tremplin habituel pour la doxa du parti d’extrême droite. À droite, sa collègue de la chambre haute Valérie Boyer avait elle aussi dénoncé ces rapports dès décembre.
Le nouveau règlement intérieur tape les absentéistes au portefeuille
Le règlement intérieur est le document qui régit la vie du conseil. Toiletté par Benoît Payan, il prévoit désormais un dégrèvement de 15 % sur les indemnités des conseillers s’ils manquent une séance du conseil ou des commissions qui le précèdent. Les raisons médicales ou les cas de force majeure sont considérés comme des excuses valables, à raison de deux absences par année civile. Si Stéphane Ravier se réjouit de cette décision, il se souvient de Benoît Payan, adjoint d’arrondissements dans les 13/14 (2008-2014), “qui a disparu au bout de deux ans”. “C’est une décision qu’il ne s’est pas appliqué à lui-même à l’époque”, glisse-t-il.
Par ailleurs, ce règlement prévoit la création d’une nouvelle commission des finances dont la présidence sera confiée à un représentant de l’opposition comme cela se fait dans bon nombre d’assemblées. À ceci près que ledit président ne pourra pas interroger directement les services sans l’agrément de la majorité des membres de cette commission. “Nous allons demander l’abrogation de ce codicille ajouté au dernier moment au projet de règlement”, prévient-on au groupe LR Une volonté pour Marseille.
Fini les grèves d’une heure
C’est la première étape d’un “plan global afin d’assurer le meilleur service public possible pour tous les enfants de la Ville, ainsi que de meilleures conditions de travail pour les agents municipaux”, indique la délibération votée ce lundi. L’accord encadrant le droit de grève du personnel municipal arrive devant le conseil municipal après plusieurs mois de négociations houleuses. Trois syndicats ont accepté de le parapher, FO, l’UNSA et la CFE-CGC-CFTC, ouvrant la voie à son application. La FSU et la CGT ont en revanche refusé.
Désormais, les agents municipaux ne pourront plus mener des mouvements de grève – souvent appelée “perlée” – d’une heure seulement, mais devront déclarer une journée entière à chaque fois. Une façon pour la mairie de lutter contre les fermetures en cascades de cantines tout au long de l’année. On scrutera sur les bancs du Printemps les élus qui refuseront de prendre part au vote d’une mesure vécue par une partie de la gauche comme attentatoire au droit de grève.
Un “hors-bord” pour piloter la Ville
“La Ville qui protège”, “la Ville des petit.e.s Marseillais.e.s”, la Ville plus proche et plus juste”... Depuis plusieurs semaines, Olivia Fortin bosse sur la réorganisation des services et notamment la réduction du nombre des directions générales. Elles étaient 13 et ne seront plus que sept avec des intitulés qui semblent tout droit sortis des pages encore fraîches du programme du Printemps marseillais. La première de ces nouvelles directions générales adjointes est dédiée au territoire, “la Ville plus verte et plus durable” qui recoupe pour beaucoup des compétences partagées avec la métropole. Les quatre autres sont dédiées aux services à la population et les deux dernières –“maîtriser nos moyens” et “transformer nos pratiques” rassemblent les fonctions de support de la municipalité.
“Nous voulons un comité exécutif resserré, formule l’adjointe chargée de la modernisation de l’action publique. Disons que notre mode de gouvernance nécessite un hors-bord là où on a un paquebot”. Ce changement de mode de transport passe par le débarquement des actuels directeurs généraux qui entourent le directeur général des services comme ils entouraient naguère Jean-Claude Gondard. “Nous allons lancer une campagne de recrutement en interne comme en externe pour constituer cette équipe resserrée”, poursuit-elle. D’ores et déjà, les cadres historiques de l’ère Gaudin savent que leurs candidatures ne seront pas privilégiées.
L’éthique en tête
La même Olivia Fortin propose trois délibérations qui ont les questions d’éthique et de probité comme objet principal. Le poste de médiateur de la Ville est donc redéfini comme interface entre les usagers et leurs services publics municipaux. Le rapport pose la nécessité que ce dernier rende compte de ses activités par un rapport annuel remis au conseil municipal ainsi qu’au Défenseur des droits. Celui-ci pourra émettre des recommandations pour améliorer le fonctionnement des services. Enfin, des partenariats pourront être envisagés avec le Défenseur des droits, le tribunal administratif et le médiateur des entreprises pour améliorer le processus de commande publique.
De la même façon, la Ville met en place un système d’alerte éthique permettant aux agents de signaler d’éventuels manquements dont ils pourraient être témoins. La municipalité réactive également un comité d’audit, voté en 2018 et qui “ne s’est jamais réuni”. Celui-ci devra guider le travail d’audit interne mené par l’inspection générale des services.
L’avenue des Aygalades devient avenue Ibrahim-Ali
Vingt-six ans après sa mort, causée par le tir d’un militant du FN, le nom d’Ibrahim Ali va être donné au lieu où il a perdu la vie. Une décision hautement symbolique que la nouvelle équipe s’était engagée à prendre, quand l’ancienne majorité avait toujours repoussé l’idée et avancé le problème du difficile changement d’adresse imposé aux riverains. Le conseil municipal va ainsi renommer l’avenue des Aygalades en avenue Ibrahim-Ali, comme le demandaient ses proches, année après année. Le rond-point du 15e arrondissement qui avait été baptisé du même nom par la mairie de secteur sera renommé ultérieurement. Il faut s’attendre à ce que dans l’hémicycle, le RN ne reste pas sur la réserve et dénonce une décision qu’il considère liée à “des raisons purement électoralistes”.
Un zakouski ? J’ai du chercher un peu avant de trouver l’usage de ce terme de cuisine russe… Il faut être journaliste pour en connaitre le sens.
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Que la gestion est chose difficile pour un paquebot comme la ville de Marseille. D’autant que ce bateau n’est pas pour aller faire une croisière…!
Il y a beaucoup de plans à traiter compte tenu qu’il s’agit d’une matière hautement inflammable…
Et si les lecteurs de Marsactu pouvaient avoir un-e journaliste spécialement dédié-e a pour cette actualité?
Merci.
J’ai suivi les conseils de Coralie Bonnefoy à propos des ”Amis des bibliothèques de Marseille” et je leur ai envoyé un message. Pourvu qu’ils répondent…!
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