Le scandale permanent du 8 rue de la Fare

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le 26 Fév 2013
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Le scandale permanent du 8 rue de la Fare
Le scandale permanent du 8 rue de la Fare

Le scandale permanent du 8 rue de la Fare

Depuis ce matin, l'eau ne coule plus aux robinets du 8 rue de La Fare. Un autocollant en témoigne à côté de la porte d'entrée surmontée d'un "hôtel oriental" à la peinture hors d'âge. La Société des eaux de Marseille (Sem) est venue fermer le compteur. Le propriétaire a une dette de 3238,95 euros "qui correspond à plusieurs factures impayées", affirme Nouredine Abouakil. L'infatigable militant de l'association Un centre ville pour tous a été appelé à la rescousse par les locataires désemparés. Le plus jeune a 65 ans et ils sont une dizaine à vivre dans cet hôtel meublé dont la façade décrépie annonce la couleur de ce qu'ils vivent à l'intérieur.

A L'hôtel Oriental, le temps semble s'être arrêté. Dans l'entrée, des montants attendent en vain leurs carreaux de plâtre. Dans la cage d'escalier, des fils pendent, certains laissent voir des dominos non protégés. "C'est comme ça depuis 2007, affirme Mohamed Mhabia, dans un français hésitant. Les entreprises sont parties sans finir les travaux et depuis rien n'a changé". Pourtant ce chantier n'est pas né du bon vouloir de leur propriétaire, le gérant de la société Texel, Eliahou Ammar  à qui Zvi Ammar a vendu l'hôtel via sa société International Sport Fashion.

Décision de justice non appliquée

Par jugement du 27 juin 2006, Texel a pourtant été condamnée à réaliser des travaux élémentaires de mise aux normes. "Fait assez rare, la juge s'était même rendue sur place pour constater d'elle-même l'état des lieux, se rappelle Nouredine Abouakil. Elle avait condamné la société à réaliser les travaux avec un calendrier précis et une astreinte de 100 euros par jour de retard". La décision du tribunal prévoyait d'agrandir certaines chambres inférieures à 9 m2, de réaliser des douches à chaque étage, des coins repas dans les logements. Il était question également de mettre des volets aux fenêtres. Visiblement, l'opération cosmétique a tourné court et la justice ne s'est pas donné les moyens de vérifier si le jugement rendu était suivi d'effets.

"Depuis trois mois, les plafonds se sont effondrés dans deux chambres, explique Ramdane Daira. J'ai eu beaucoup de chance de ne pas avoir été endormi au moment où ça a eu lieu, sinon je serais mort". Le propriétaire l'a déplacé dans une autre chambre demeurée vide. Mais d'autres locataires regardent avec inquiétude le plafond s'affaisser à chaque grosse pluie. "Le pire, c'est que l'eau coule sur les fils électriques. C'est vraiment dangereux", ajoute le locataire qui vit là depuis des lustres. "En fait, il s'agit de travaux à la petite semaine qui ont consisté à placer des carreaux de plâtre sans rien toucher au toit, reprend le fondateur d'Un centre ville pour tous. Du coup, l'eau s'infiltre partout". Elle ne va pas jusqu'aux douches, en tout cas pas en passant par le robinet. Aucune de celles qui étaient prévues ne fonctionne.

A chaque étage, l'état empire. Pas de chauffage, pas d'eau chaude, des "coins cuisines" qui n'ont jamais marché et, partout, des bassines pour éviter que la pluie ruisselle. Dans une des chambres qui donne sur la rue, les murs sont noircis par l'humidité. L'eau s'infiltre par les boiseries abîmées de la fenêtre toujours dépourvues de volets. Le locataire qui y vit, Mohamed Houamlia a dépassé les 70 ans. D'un geste las, il montre sa poitrine. Depuis 14 mois, il multiplie les séjours à l'hôpital. "Vivre là, ça me rend malade", souffle-t-il.

"L'entreprise est partie sans finir les travaux"

Joint par nos soins la société Texel par la voix d'un certain Lucien Henri, du "secrétariat de monsieur Ammar" jure de sa bonne foi. "Nous avons tout de suite appelé la société des eaux, c'était une erreur de leur part et ils nous ont autorisé à remettre l'eau", explique Lucien Henri. Effectivement, quelques heures après notre première visite, l'autocollant a disparu et l'eau rétablie sans que l'on sache si les techniciens qui ont effectué la manoeuvre ou "une équipe" envoyée par la société Texel.

Concernant les travaux, Lucien Henri assure de sa bonne foi : ils "se sont poursuivis jusqu'en 2011. Nous avons dépensé 180 000 euros et l'entreprise est partie sans prévenir et sans finir les travaux". Cela explique donc les fils qui pendent et les fenêtres toujours dépourvues de volets. "Mais les volets, ils sont là, rangés dans l'hôtel. On attend de faire les travaux de ravalement de la façade et le toit pour les poser", reprend celui qui se présente comme le gestionnaire. D'ailleurs, s'il n'a pas été prévenu avant de l'état des plafonds, c'est "parce que les locataires n'arrêtent pas de faire des allers et retours. Ils ne sont pas là pendant des mois. Du coup, on ne sait pas ce qui se passe. D'ailleurs, avec ce qu'ils paient de loyer depuis des années, on arrive à peine à payer l'eau et l'électricité. Si on les garde, c'est par humanité. Ce sont des pauvres gens".

Pourtant la société Texel aurait pu "par humanité" finir les travaux et ainsi exécuter le jugement de 2006. Ou encore accepter le prix de rachat proposé par la Ville. L'adjointe au maire au logement, Arlette Fructus (UDI) explique : "Cet hôtel meublé fait partie du périmètre de restauration immobilière (PRI). Il a fait l'objet d'une procédure d'expropriation. A l'arrêt du PRI, une ordonnance d'expropriation a été prononcée, la cessibilité du bâtiment a été prononcé. Nous avons fait une offre de rachat de 452 000 euros. Il avait un mois pour répondre. Il ne l'a pas fait, cela équivaut à un refus". Car Texel a de son côté demandé l'annulation de l'arrêté préfectoral de cessibilité du 16 novembre 2011 devant le tribunal administratif. Mais, là encore, elle doit le faire par souci d'humanité.

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Commentaires

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  1. ALAIN PERSIA ALAIN PERSIA

    Bravo d’avoir dénoncé un nouveau sacandale qui s’apparente aux nombreux marchands de sommeil qui foisonnent à Marseille.
    Il serait temps que le Préfet et le Maire s’unissent pour éradiquer ce fléau.
    Quant à A.FRUCTUS elle devrait reloger ces braves gens dans les appartements que Marseille Habitat ou Marseille Aménagement possèdent dans le centre ville.
    Ce serait pour une fois une action concrète.

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  2. Anonyme Anonyme

    …les dernières gouttes du citron…Ha, le bon temps des colonies…
    FINIE, cette courte époque de fastes financiers, quand arrivaient à bon prix les richesses pillées outre-mer…
    Là on est dans la dernière ligne droite, on finit les derniers esclaves…
    Mais bon, ça va être compliqué d’aller demander des comptes aux propriétaires…A l’heure du jaune, sur leur terrasse d’Endoume ou du “cabanon” (climatisée) de Sormiou, ça leur met des aigreurs ces histoires de deux sous…’faut pas les déranger, les vrais maîtres de Marseille…

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  3. Marius Marius

    Les marchands de sommeil, une honte !

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  4. jdeharme jdeharme

    Article très intéressant mais combien de 8 rue de la Fare dans Marseille A n’en pas douter des dizaines mais paraît-il qu’on est en France et au 21 ème siècle donc tout va bien et les braves gens et les élus détournent les yeux Un jour tout cela va finir par se savoir et là ce sera peut-être enfin la révolution

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  5. pmo pmo

    Un sujet scandaleux dont feu Stéphane HESSEL se serait à raison indigné !!!! Quid de la suite ? Samedi,inauguration en fanfare de l’ombrière new-look sur le Vieux-Port….les pauvres êtres pourront toujours s’y abriter en cas d’intempéries !!!!

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  6. Anonyme Anonyme

    la misère fait les choux gras de quelques uns et comme nos “élus ” mangent dans leurs auges … indignons nous! indignons nous !

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  7. Anonyme Anonyme

    Ce n’est pas nouveau Quand on parle des Chibanis on voit bien où ils vivent .. à plusieurs dans une horreur pas possible .. certains ont l’air de découvrir .. et les élus eux savent aussi mais s’en lavent les mains .. c’est bien d’en parler mais demain on oubliera Bref la routine et du cinoche pour les élus mais c’est bien Marsactu de temps en temps de remuerla M..de .. Merci donc

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  8. MP MP

    les Ammar sont infatigables, entre Yvon accusé de faux recours, Zvi accusé de modifications de scène d’un crime, et de faux en écriture et qui revend à Eliahou Ammar quand il faut faire les travaux d’un hôtel pourri qu’il loue à la chambre et à l’année ce qui retarde un peu l’arrêté d’expulsion.
    Il y a des gens qui vivent sur la misère du monde. Mais il est président du consistoire donc intouchable. Je ne sais pas si ils ont un cabanon mais la maison de St Just est impressionnante, il y a l’eau à tous les étages…

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  9. Kurtz Kurtz

    Qu’avez vous donc tous contre les élus ?

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  10. Anonyme Anonyme

    Effarant!

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  11. Prometheus Prometheus

    Ok pour Fructus, OK pour la responsabilité de la mairie centrale ! En revanche, on ne dit pas que l’éradication de l’habitat insalubre est inscrit dans les objectifs de la politique de la ville. Laquelle dépend de Mme BOYER et du préfet délégué à l’égalité des chances. De plus, il ne faut pas oublier que le secteur est aux mains de la gauche n’est-ce pas M. MENUCCI ? Mais au delà de la politique politicienne, un chibani ou vieux migrant c’est connu ça ne vote pas car ça n’a pas le droit de voter. Et après on parle d’humanité à gauche comme à droite.

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  12. Vive la droite Vive la droite

    Que des jaloux ces journalistes!!!
    La famille AMMAR sont les patrons de Marseille!!!

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  13. marseille marseille

    Malheureusement, ces marchands de sommeil sont protégés et peuvent continuer en toute impunité. Je suis en procès depuis 8 ans contre mon propriétaire qui n’arrête pas les recours abusifs contre les constructions à Marseille, qui ne paient rien et la Mairie de Marseille est au courant.

    Alors que dire, sinon que nous sommes des pions.

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