Le département mise sur le collège Chape pour expérimenter l’uniforme

Le collège Chape dans le 4e arrondissement. (Photo : Emilio Guzman)

Ce n’est pas exactement ce que certains défenseurs de l’uniforme scolaire avaient imaginé. Vendu comme un outil pour gommer les inégalités, il a des chances d’être finalement expérimenté dans le collège le plus favorisé du centre-ville de Marseille. Selon nos informations, le collège Chape (4e) est à ce jour le seul établissement a avoir formellement répondu à l’appel lancé en septembre par Martine Vassal.

L’histoire commence la veille de la rentrée, en pleine polémique sur l’abaya. Le 3 septembre, la présidente (divers droite) du département déclarait sur X (ex-Twitter) vouloir ouvrir “une grande concertation avec l’Éducation nationale et les parents d’élèves afin d’expérimenter le port de l’uniforme dans les collèges de notre département”. Par cette déclaration, l’élue indique ainsi s’inscrire dans la grande expérimentation nationale voulue par le ministre de l’Éducation, Gabriel Attal. Les tenues seront financées à parts égales par l’État et le département. “S’il ne règle pas toutes les inégalités, l’uniforme gomme les différences sociales et permet une meilleure intégration des élèves”, appuie Martine Vassal sur X.

Mais au final, les établissements candidats ne se bousculent pas. Selon nos informations, plusieurs proviseurs ont été approchés depuis la rentrée, à la fois par le département et la région. Si certains risquent de se laisser tenter dans les mois qui viennent – dans le 13e arrondissement, le souhait a été exprimé par la principale du collège Edmond-Rostand – seul le collège Chape a concrètement lancé la démarche. Avec pour objectif de démarrer l’expérimentation au printemps.

Collège sans problème

Dans cet établissement situé en haut du boulevard Franklin-Roosevelt, la nouvelle s’est répandue la semaine dernière. Elle a circulé dans plusieurs discussions informelles entre le personnel du collège et les élèves. Ces derniers n’ont pas tardé à en informer leurs parents. Contacté par Marsactu, le département confirme l’expérimentation. Ou plutôt, la volonté d’expérimenter. Car pour l’heure, rien n’est acté et la mesure doit d’abord être validée par le conseil d’administration de l’établissement.

“Mais surtout, il n’est pas question d’imposer quoi que ce soit. L’objectif est de co-construire une expérimentation avec le personnel, les parents et les élèves”, explique-t-on dans l’entourage de Martine Vassal. Le processus commence à peine. Ce mardi 21 novembre, la proviseure du collège Chape a convié les syndicats enseignants pour une première réunion d’information. Dans les jours qui viennent, le projet devrait être présenté aux élèves délégués. Avant d’être détaillé aux parents.

Un enseignant du collège Chape y voit “une occasion pour la principale de mettre en valeur son établissement”. Plusieurs sources pointent alors la proximité de la cheffe d’établissement avec la droite marseillaise. Cette dernière figurait notamment sur la liste conduite par Bruno Gilles (ex-LR) dans le secteur des 1er et 7e arrondissements, lors des municipales de 2020. Contactée par Marsactu, elle n’a pas souhaité s’exprimer.

Uniforme ou “tenue scolaire” ?

Selon Séverine Gil, présidente de l’association de parents d’élèves MPE 13, “beaucoup de familles y voient une mesure très conventionnelle et pas séduisante. Puis à Chape, à quel enjeu social l’uniforme viendrait répondre ? C’est un collège sans problèmes ! Aucun rapport avec un collège prioritaire, ou même avec le collège voisin de Longchamp par exemple, qui est un vrai collège mixte. Mais la vérité, c’est qu’aucun établissement ne veut aller sur ce terrain, parce que le sujet est récupéré par l’extrême droite.”

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Du côté de l’académie d’Aix-Marseille, le recteur Bernard Beignier confirme qu’il y a “beaucoup d’hésitation” chez les proviseurs. “Mais d’abord faudrait-il savoir de quoi on parle. Un véritable uniforme comprend une panoplie entière, chaussures comprises, à même de gommer les inégalités. Mais je crois qu’on s’oriente plus sur une tenue scolaire : un polo, un sweat, une blouse… Un élément qui viendrait avant tout marquer l’appartenance à l’établissement. C’est très différent”, nuance le représentant du ministère.

Autant de paramètres ouverts au débat. “Il n’y aura pas de décision sans discussion préalable”, confirme Bernard Beignier. En septembre, le recteur expliquait à La Provence la pertinence d’une expérimentation “dans tous les quartiers”. Une volonté qu’il confirme aujourd’hui, tout en proposant une première piste de travail : “Je l’ai dit aux établissements, on pourrait réfléchir d’abord à une tenue de sport. C’est un moyen de proscrire les survêtements de marque, et donc de gommer les inégalités sans être contraignant au quotidien.” Quoiqu’il en soit, le recteur insiste sur un point : “il faut que la démarche ait du sens pour les élèves.” Ce qui revient donc à d’abord déterminer un objectif clair, au-delà des polémiques.