Le conseil départemental barricade le parvis des archives
L'un des rares espaces publics ouverts du nouveau quartier d'Arenc fermera ses portes chaque soir à 18 h. À la faveur d'une "opération de remise en état complète du parvis", le conseil départemental a décidé de faire place nette. Au grand dam des Marseillais qui s'approprient le lieu.
Le conseil départemental barricade le parvis des archives
“C’est pitoyable ! Pourquoi ils ont mis des grilles ?”, fulmine Sabri. Le visage poupin de cet adolescent de 15 ans se ferme à l’évocation du chantier en cours sur le parvis des archives départementales (3e), installées depuis 2006 à Arenc. L’un des rares espaces publics ouverts du nouveau quartier du “parc habité” fermera ses portes chaque soir. À la faveur d’une “opération de remise en état complète du parvis“, le conseil départemental a décidé de faire place nette. Au grand dam des riverains qui se sont appropriés le lieu.
Depuis la semaine dernière, des clôtures noires filent autour de la grande surface dallée. “C’est plutôt esthétique“, ironise Mohammed, étudiant d’une école d’informatique à proximité des archives. Pour l’heure, la plus grande partie du site est inaccessible à cause des travaux de réhabilitation. Des ouvriers replantent des oliviers, remplacent le dallage et les lampadaires. Le chantier, démarré en mars, d’un montant estimé de 800 000 euros, doit s’achever fin juin. À compter de cette date, quatre portails fermeront au grand public l’accès à ces 3600m2 à partir de 18 heures.
“À qui ça sert d’enfermer cette grande esplanade ?”
Via le réseau social Twitter, Mathieu Grapeloup, l’animateur du groupe “Marseille à la loupe”, a été le premier à s’indigner de ces travaux.
Encore un espace public qui disparaît à #Marseille ! Le Département a décidé d'ériger une clôture tout autour du parvis des Archives pour en limiter l'accès. Dans ce "nouveau quartier", tout extérieur est fermé, réservé, barricadé, privatisé. Je suis triste pour ma ville. 😓 pic.twitter.com/AkcwwoxFug
— Mathieu Grapeloup (@Mat_Grapeloup) May 24, 2019
Depuis l’inauguration du bâtiment, le parvis est ouvert à tous, tout en étant surveillé par les agents de sûreté de l’établissement culturel, durant la journée. “C’est un parvis qui est très utilisé. Dans le quartier, il n’y a pas grand chose pour les habitants. Il y a des enfants, des skateurs, des personnes âgées qui s’y rendent“, constate une salariée de l’établissement. “Le soir, quand il fait chaud, on se pose ici, on vient, on rigole. C’est un moment de partage“, explique Sabri, qui fréquente, après le collège, le parvis avec ses amis. D’autant qu’en cette période du ramadan, les blocs et escaliers qui jalonnent l’endroit sont plus utilisés que le reste de l’année. “À qui ça sert d’enfermer cette grande esplanade, de la laisser vide le soir ?“, interroge-t-il, amer.
Une qualité architecturale qui fait, entre autres, la joie des amateurs de skateboard. “Les blocs sont parfaits. Ils ont une proportion idéale et ça roule bien“, explique le skateur marseillais surnommé Léo Loden. “Ils sont très photogéniques. S’il y a une tournée internationale de skateurs à Marseille et que quelqu’un veut faire une photo sur des blocs, c’est l’endroit où on les amène généralement.”
“Thanks in Marseille”, vidéo réalisée en mai 2016 par un collectif de skateurs
Un espace public trop précieux
Du côté du département, propriétaire et gestionnaire des archives et du parvis, on considère être dans son bon droit. Ce lieu “ne peut pas être considéré comme un espace public. Il fait partie intégrante du bâtiment et se situe juste au-dessus de locaux techniques”, y justifie-t-on. Pourtant, l’architecture du lieu laisse penser le contraire. “Je l’avais conçu comme un espace public“, atteste Corinne Vezzoni, l’architecte du bâtiment et du parvis.
Au conseil départemental, on justifie par la sécurité cette restriction d’accès. La clôture est érigée “afin de sécuriser le site mal fréquenté durant la nuit“, explique-t-on. Mais du côté des acteurs locaux, cette justification a du mal à prendre. “On n’a jamais eu de remontées concernant le parvis” atteste Patrice Langer, du CIQ d’Arenc. “Ce sont des gamins qui jouent. Sincèrement, il n’y a pas de dérive particulière” rajoute Lisette Narducci, la maire des 2/3, qui souligne néanmoins qu’elle a reçu des plaintes du voisinage concernant le bruit à des heures tardives.
les nouvelles grilles installées à proximité du boulevard de Paris, mai 2019
Le conseil départemental pointe également d’importants faits de vandalisme sur le parvis. Luminaires extérieurs, dalles, caniveaux sont fortement endommagés. Des usages qui se sont heurtés aux choix de matériau de Corinne Vezzoni. “J’avais voulu de la pierre de qualité, des gardes-corps en inox, des petites lumières intégrées aux marches pour accompagner le piéton. Cela a été progressivement démonté. À tel point que le département nous a dit qu’on avait fait des choses trop précieuses”, explique-t-elle. Sans pour autant dédouaner la collectivité de toutes responsabilités : “pendant sept ans, on a laissé le lieu se dégrader”.
Une série d’événements culturels sur le parvis
Au sein des archives et bibliothèques départementales, certains salariés redoutent cette fermeture, qui pourrait conduire à des privatisations de l’espace. “Apparemment, la volonté est de fermer le parvis pour faire davantage d’événements et de soirées“, explique l’un d’eux. Le lieu accueille notamment la soirée d’ouverture gratuite du festival Jazz des cinq continents le 17 juillet, soutenu par le département.Une aubaine pour le directeur de l’événement, Hugues Kieffer : “pour nous les organisateurs de concerts, c’est de plus en plus compliqué dans l’espace public car il faut mettre en place des mesures de sécurité drastiques depuis Vigipirate”.
Le parvis accueillera également l’année prochaine “une série d’événements en lien avec l’année de la gastronomie“, confirme le département, mais pour l’heure “la programmation reste secrète”. Les usagers du lieu font, pour l’instant, la soupe à la grimace.
Commentaires
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Cette fermeture de l’espace public à la population est un exemple concret de ce qu’une municipalité Vassal – LREM pourrait faire à Marseille !
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Je suis une lectrice régulière des archives et j’ai moi aussi constaté des dégradation car les jeux de ballon et autres ne sont pas adaptes à cet espace minéral. Mais les dames qui mènent jouer leurs enfants n’ont pas de solution alternative. Il n”y à pas d’équipements publics pour faire du sport en plein air, pas de parc, pas de lieu pour jouer. Certaines réalisations neuves présentent un caractère concentrationnaire, Seuls les enfants des plus aises disposent d’espaces privés en coeur d’ilot. Les autres n’ont droit à rien et à mes yeux, c’est un scandale absolu, Comment voulez-vous construire de l”égalité et de l’harmonie en procédant de la sorte ?
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Même les enfants vivant dans les résidences avec des cours privés, dont parle Claudia, ne sont pas plus gâtés. La plupart de temps il est absolument interdit d’y jouer au ballon ou quoi que ça soit qui roule et les horaires pour y jouer tout court sont ridicules. 2h dans la matinée, 2h dans l’après-midi. Et encore… Et, hélas, dans les réunions de copropriétaires on ne trouve que les propriétaires sans enfants. Les autres n’ont ni le temps ni la confiance en soi pour y assister.
En fait, la façon de vivre de nos jours a l’air de détester les enfants et les jeunes. Qu’ils aillent ailleurs, y a pas besoin de dépenser l’argent commun (public ou privé, c’est pareil) dans ces morveux bons à rien.
Vous savez où se trouve la ville Ailleurs ?
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Ami(e)s de la gauche “radicale” (“pure et dure”, “vraie de vraie”, etc.) ; une interessante critique de l’un des “votres” qui explique pourquoi le sectarisme et le passeisme ne marche pas et sont sans avenir : https://www.lemonde.fr/politique/article/2019/06/01/la-gauche-n-a-pas-disparu-dans-ce-pays_5470143_823448.html
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Toujours les mêmes faillites : on ne sait pas gérer l’espace public donc on le ferme (voir les parcs, la plage des catalans…) ; on commande des bâtiments de prestige à des architectes de renom, puis on les dénature en bricolant des dispositifs pour contraindre les pratiques qu’on ne veut pas encadrer ou tolérer. Et tous les 6 ans, on réinvestit des millions de travaux pour réparer ce qu’on n’a pas entretenu. “on” étant l’administration gaudin bientôt reproduite par vassal.
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Euroméditerranée un “parc habité” ? Il n’y a que les promoteurs pour inventer ce genre d’appellation trompeuse et confondre le béton avec la verdure…
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Merci pour ce papier complet sur le sujet que j’espère beaucoup se donneront la peine de lire. Que penser d’un Département qui alimente la réputation (injustifiée) d’insécurité de ce périmètre, se tirant ainsi lui-même une balle dans le pied plutôt que de se fatiguer à réfléchir ? Quant au “bruit à des heures tardives” : les seules fois où on ne peut vraiment pas dormir, c’est lorsqu’il y a des événements officiels sur cette esplanade… #Marseille2020
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Pour ceux que le sujet intéresse : article sur cette nouvelle “mode” des E(spaces) P(ublic) P(rivés) d’Euromed sur mon blog : https://euromedhabitants.wordpress.com/2019/05/31/euromedhabitants-19/
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Le mensonge d’Euromediterranée dans toute sa splendeur. Ça ne devait être que “parcs habités”, recouture du tissu social, espaces ouverts,…
Au final c’est une forêt de béton impénétrable.
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Une question Axel : ils vous ont dit fermeture à 18 h tous les jours ? (je demande parce que si ils se calent sur les ouvertures et fermeture des Archives, ça veut dire fermé le week-end).
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Entre le phénomène des “résidences fermées” qui est en train de séparer de la ville des parcelles ou, parfois, des îlots entiers un peu partout, et celui des jardins et espaces publics fermés parce qu’on a la flemme de les gardienner ou de les entretenir (ou parce que tel CIQ l’a demandé), qui s’ajoutent aux caractéristiques de l’espace public à Marseille – pas de bancs, pas de WC publics, peu de verdure -, quelle ville prépare-t-on, et pour qui ?
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En revanche la mairie investi énormément dans les maisons de quartier pour le bel âge.
Vous avez la réponse cher 8ème
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J’habite ce quartier et cet espace était un havre de liberté et de convivialité .
Si l’on ne peut nier les comportements de casseurs et prédateurs la seule parade , ce n’est pas un”” mur” mais un gardiennage efficace .
Quant aux plaintes de la nuit je ne les conteste pas car nous avons eu le même problème au jardin rue de Ruffi : vols et vandalisme dans les jardins partagés musique, cris, super marché des dealers et drogués, seringues dans le jardin d’enfant etc….
La seule parade fut la fermeture à 19 h : les riverains peuvent enfin dormir ….et les enfants profiter sainement de l’espa
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Merci pour ce témoignage. J’ajouterai à la “parade” davantage de médiation, et donc davantage de soutien aux associations qui font ce travail, à mon avis largement aussi efficaces que “l’autorité”. Du côté de l’esplanade je ne pense même pas qu’il y ait eu le genre de problèmes que vous décrivez (je passe assez souvent devant tard le soir), mais je peux me tromper. En tout cas la solution n’est certainement pas de punir tout le monde pour les agissements de quelques-uns. Nous allons demander l’ouverture de l’esplanade tous les jours jusqu’à la tombée de la nuit (qui ne tente rien n’a rien — et on ne peut pas éternellement se laisser claquer la porte au nez sans rien faire 😉
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J’habite ce quartier et cet espace était un havre de liberté et de convivialité .
Si l’on ne peut nier les comportements de casseurs et prédateurs la seule parade , ce n’est pas un”” mur” mais un gardiennage efficace .
Quant aux plaintes de la nuit je ne les conteste pas car nous avons eu le même problème au jardin rue de Ruffi : vols et vandalisme dans les jardins partagés musique, cris, super marché des dealers et drogués, seringues dans le jardin d’enfant etc….
La seule parade fut la fermeture à 19 h : les riverains peuvent enfin dormir ….et les enfants et adultes profiter sainement le lendemain de l’espace qui leur est dédié .
Alors s’il y a un problème il faut organiser des réunions usagers- décideurs mais la manière radicale à la “Trump “n’est en aucun cas LA solution .
Depuis quand un espace public devient il un espace privé réservé aux édiles ? le département n’est pas le propriétaire des lieux, il appartient non aux élus mais aux citoyens et c’est AVEC eux que doivent se gérer les espaces publics .
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C’était la conception de l’architecte qui voulait cet espace ouvert avec à côté le jardin des archives également ouvert au public.
Ce choix va à l’encontre de ce projet et est déplorable pour l’insertion de cet établissement culturel.
J’y travaille pour encore quelques mois et je ne partage absolument pas ce choix.
Mais c’est malheureusement le choix culturel de ce département maintenant.
YvesAix
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Et donc, on nous confirme que pour sécuriser cet espace la nuit il sera ouvert aux horaires des Archives, soit :
– lundi de 14h à 18h,
– du mardi au vendredi de 9h à 18h,
– le samedi (de septembre à juin) de 9h à 13h…
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Pourtant on pourrait faire mieux : un parking comme dans les immeubles autour , tous les rdc sont des garages , (a part la pharmacie) donc pas de vie sociale…… bla bla bla
DE toute façon miss gaudin va être élus , elle s’occupe que de vieux car eux ils s’activent politiquement : au moins ils votent
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