La gare de l’Estaque se prépare à une nouvelle vie tournée vers son quartier

Actualité
le 25 Fév 2023
6

Aujourd'hui très vétuste, le bâtiment de la gare de l'Estaque va être rénové à partir de la fin 2023. Il accueillera dans ses murs une nouvelle activité, non ferroviaire, désignée par un appel à projets. Mais des habitants voudraient que la SNCF aille plus loin dans le réaménagement des lieux.

La gare de l
La gare de l'Estaque, à Marseille, 17 février 2023 (Photo : Louise Gerbaud)

La gare de l'Estaque, à Marseille, 17 février 2023 (Photo : Louise Gerbaud)

Depuis 1848, elle donne au quartier son nom d’“Estaque-gare”. À flanc de colline, avec son style désuet et ses portes fermées de très longue date, elle semble un peu hors du temps. Entre deux trains, on peut même entendre les oiseaux chanter. Plusieurs dizaines de milliers de voyageurs y passent chaque année. À l’heure où les collectivités aimeraient voir le rail soulager les axes routiers, ce chiffre pourrait encore croitre. En train, le centre-ville est à seulement 10 minutes. Mais aujourd’hui, les lieux dégagent surtout une vétusté flagrante, témoignant de longues années d’abandon – peintures qui s’effritent et vitres cassées sur le bâtiment, sans parler du passage souterrain couvert de crasse, où règne une odeur nauséabonde.

Et pourtant, la gare s’apprête à vivre une nouvelle respiration. Un appel à projets lancé il y a un an par la filiale de la SNCF Gares & Connexions se conclut le 10 mars prochain, après plusieurs reports. Ce projet passera notamment par la rénovation du bâtiment principal, mais aussi l’implantation d’activités non liées au ferroviaire en ses murs.

L’intégralité de la bâtisse, 357 mètres carrés sur deux niveaux, sera mis à disposition du candidat retenu. “Idéal activités apportant du service (commerce, aide à la personne, développement numérique, promotion du territoire, mobilité) contribuant ainsi à l’animation et au développement de la gare et de son quartier”, pose le texte de l’appel à projets. L’espace pourra être divisé en plusieurs activités, selon les propositions formulées.

La façade du bâtiment voyageur ne laisse guère de doute sur sa vétusté. (Photo : Louise Gerbaud)

Un nouveau locataire

“L’ambition de la SNCF à travers ce genre de projet est de réinventer les gares en les redynamisant, en implantant de nouvelles activités à destination des riverains du quartier et des voyageurs. Cela soutient le développement économique local et maintient une animation en gare au service du voyageur”, affirme Louis Coulange, responsable du développement locatif chez Gares & Connexions. Ce projet de réhabilitation ne date pas d’hier et “plusieurs options ont été envisagées au fur et à mesure de l’étude”, indique-t-il. Le contrat de performance signé avec la région, qui finance un certain nombre de travaux sur les gares de la région a été “l’opportunité d’enclencher des travaux et de réinstaller une activité”. Même si l’esprit est différent, l’opération n’est pas sans rappeler la transformation de la gare voisine, à Niolon, en café associatif.

“L’animation du quartier” soulignée dans l’appel à projet est clairement mise en avant par la SNCF. D’après Louis Coulange, “au regard des premières candidatures reçues, on sait qu’on aura un candidat lauréat qui va apporter une plus-value forte”. À la mairie des 15 et 16e arrondissements, on explique “fonder des espoirs sur ce projet”. Avec deux axes en tête : participer à la dynamisation du secteur, mais aussi préserver les fonctions liées à l’accueil des voyageurs. “La question d’accessibilité, d’accueil de la gare, les parkings, les vélos, tout cela doit être pris en compte, il y a un véritable enjeu de permettre au maximum de personnes l’accès et la mobilité dans cette gare”, explique un responsable à Marsactu. La question de la desserte de la gare est essentielle, car elle est excentrée par rapport à l’Estaque-Plage, notamment, et d’autres quartiers voisins.

Le projet est aussi suivi de très près par les associations d’habitants, à commencer par le comité d’intérêt de quartier. Michel Teule, co-président de la fédération du 16e et coprésident du CIQ de Saint-Henry espère notamment qu’une “activité structurante” et “issue du territoire” puisse prendre place dans le bâtiment, “pour offrir une dimension sociale et dynamique à destination du public de l’Estaque”.

Préserver la place des voyageurs

Patrick Robert, président du CIQ de l’Estaque, mobilisé depuis longtemps sur ce dossier, salue aussi cette initiative. Il soulève néanmoins quelques craintes concernant la future fonction de la gare. “Nous on voudrait qu’ils soient attentifs à ce que le porteur de projet laisse une place à l’accueil des voyageurs. On souhaite avant tout que des services minimums soient maintenus en gare”.

Mickaël Ollier, responsable de communication PACA pour Gares & Connexions souhaite donner des gages sur cet aspect : “L’ensemble du bâtiment est mis à disposition dans cet appel à projets, mais dans la grille qui va permettre d’évaluer le projet, il y a 40% qui est consacré au critère de service et de confort du voyageur. C’est un critère incontournable pour les gens qui vont participer”. Pour autant, la possibilité du retour d’un guichet pour acheter ses billets ne semble pas sur la table.

Le parking de 35 places au total est partagé entre riverains et voyageurs. (Photo : Louise Gerbaud)

Aller plus loin dans l’aménagement du quartier

Plus largement, le CIQ de l’Estaque fait part d’un certain regret sur les ambitions du projet. Pour Patrick Robert, la réhabilitation de la gare est “indissociable du réaménagement du quartier”. Le CIQ a planché sur le sujet et formulé ses préconisations, avec parmi les priorités, l’agrandissement du parking de la gare, actuellement proposant 35 places. Aujourd’hui, le manque de places aux abords de la gare engendre des problèmes de stationnement, où voyageurs et riverains sont en concurrence.

Une étude réalisée en 2016 par l’AREP, agence d’architecture filiale de la SNCF, faisait la même observation. “Le projet de la SNCF, pris individuellement, ne ferait que grossir la problématique de stationnement et de mobilité de la gare”, estime Patrick Robert. La SNCF connaît ce risque et assure qu’il “sera pris en compte dans la sélection du projet”. Pour Louis Coulange, toutefois, l’étude de l’AREP proposait des idées d’orientation “mais n’engageait pas de travaux immédiats”.

La question des terrains de la SNCF dans le quartier

La rue Pelletier est aujourd’hui saturée par le passage des voitures. (Photo : Louise Gerbaud)

Le CIQ va au-delà du parking et interroge le devenir de terrains avec des bâtiments abandonnés appartenant à la société de chemins de fer tout autour de la gare. Patrick Robert imagine que des commerces puissent s’installer sur ces parcelles pour désencombrer l’étroite rue Pelletier voisine.

Une pharmacie a déjà sauté le pas en se déplaçant à proximité directe de la gare. Pascal Girieud, son propriétaire, est satisfait de ce déménagement qui lui a aussi permis de s’agrandir. Il a par ailleurs déposé une candidature pour l’appel à projets, avec l’ambition de développer un centre médical ainsi qu’un laboratoire.

Si les terrains de la SNCF sont bien identifiés, d’après Louis Coulange, “On n’est pas en mesure de vendre à la découpe des petites parcelles tant que l’ensemble n’est pas libéré par les équipes SNCF qui y travaillent”. Et les bâtiments en question ne seront pas détruits avant 2026, nous indique-t-on. À ce moment-là, le devenir des parcelles “se fera en concertation avec les collectivités”.

Des réponses frustrantes pour le CIQ. “Ils nous ont dit de déposer un dossier, mais nous on ne peut pas, ce n’est pas ce qu’on demande ! On cherche juste à dialoguer avec eux”, regrette Patrick Robert. Gare & Connexions estime pour sa part avoir pu échanger et prendre connaissance des alertes. “Certes, on n’apporte pas toutes les réponses du CIQ mais ce n’est pas le seul acteur à prendre en compte”, nuance Mickaël Ollier qui assure que quoi qu’il arrive, le projet “va amener de la couleur au quartier”. Aucune date n’est encore fixée pour l’annonce du candidat retenu. Les travaux de rénovation du bâtiment devraient, eux, démarrer à la fin 2023.

Cet article vous est offert par Marsactu
Marsactu est un journal local d'investigation indépendant. Nous n'avons pas de propriétaire milliardaire, pas de publicité ni subvention des collectivités locales. Ce sont nos abonné.e.s qui nous financent.

Commentaires

L’abonnement au journal vous permet de rejoindre la communauté Marsactu : créez votre blog, commentez, échanger avec les autres lecteurs. Découvrez nos offres ou connectez-vous si vous êtes déjà abonné.

  1. PierreLP PierreLP

    Il me paraît utile de préciser que la façade et les toits de la gare(1852), le souterrain et ses escaliers, et les abris de quai en ferronnerie ont ère classes monuments historiques par arrêté du 21 novembre 2012

    Signaler
  2. Pascal L Pascal L

    Le CIQ “interroge le devenir de terrains avec des bâtiments abandonnés appartenant à la société de chemins de fer tout autour de la gare.”

    Ben oui, comme les propriétés immobilières de la mairie et des autres collectivités, on s’interroge tous !

    Gaudin a loué le fortin des Corbières à “un ami” pour une bouché de pain. J’étais pourtant prêt à mettre 50 % de plus … mais on ne m’a rien proposé. Pourquoi ? Je m’interroge aussi.

    Je rêve aussi depuis 15 ans, à chaque fois que je passe devant, d’habiter les bâtiments de la SNCF de Niolon (ceux qui donnent sur le chemin des douaniers vers l’ouest), mais là aussi, on ne m’a rien proposé.

    J’espère que les appels d’offre pour les bâtiments de l’Estaque seront publiés sur Marsactu : j’aurai -enfin- une petite chance de faire parti des vernis.

    Signaler
    • RML RML

      Quel intérêt à faire parti des vernis ? Il faudrait peut être arrêter cette logique de vernis et non-vernis, non?

      Signaler
  3. Thierry A Thierry A

    Dans les années 70, un ami à moi, habitant du quartier a voulu se rendre en train à Pékin. De Marseille on n’avait pas su lui préciser l’itinéraire. Il a pris un billet jusqu’à Paris. A Paris, on n’avait pas su lui préciser l’itinéraire. Il a pris un billet jusqu’à Moscou et de là, a pu se rendre à Pékin.

    A Pékin, pour le retour, il demande à la gare un billet pour l’Estaque. L’employé lui demande; Estaque gare ou Estaque plage?

    Signaler
  4. Helene Gounot Helene Gounot

    Alors, quel projet a finalement été retenu ?

    Signaler

Vous avez un compte ?

Mot de passe oublié ?


Ajouter un compte Facebook ?


Nouveau sur Marsactu ?

S'inscrire