Jean-Claude Gaudin fait de l'arythmie scolaire

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le 13 Nov 2013
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Après tout, pourquoi pas. Alors que le gouvernement est en grande difficulté, que diverses mobilisations fleurissent pour quasiment autant de rétro-pédalages, pourquoi ne pas tenter le coup ? Pour sa contre-attaque politique après la visite à 5 vrais-faux milliards d'euros du premier ministre à Marseille, Jean-Claude Gaudin mise sur l'opposition à la réforme des rythmes scolaires. Pour lui, impossible de la mettre en place à la rentrée prochaine, dit-il accompagné de 54 autres maires de droite. "On dit non aux rythmes scolaires mais on fait un effort pour l'accueil des tout petits dans les écoles maternelles", a souligné Gaudin devant plusieurs journalistes vendredi pour signaler qu'"il ne se situe pas dans une opposition systématique", précise son entourage.

Disons-le tout de suite, cette réticence de la mairie de Marseille n'est pas nouvelle. Dès le lancement de la réforme initiée par le ministre de l'Éducation nationale Vincent Peillon, l'adjointe aux écoles Danièle Casanova avait ainsi exprimé ses réserve sur notre site, mettant notamment en avant les questions d'argent. Depuis, les critiques exprimées notamment par les enseignants qui manifesteront ce jeudi se multiplient. Et pour la Ville, c'est le même critère financier que reprend aujourd'hui Jean-Claude Gaudin dans une interview au Figaro. "Nous sommes très réticents car nous avons calculé que cela nous coûterait 25 millions d'euros par an", explique-t-il ainsi au quotidien.

Quel soutien de l'État ?

Le chiffrage est jugé très contestable par le ministère qui estime à "environ dix millions" le coût de la mise en place de ces 3 heures de temps périscolaire pour l'ensemble des 73 000 élèves de primaire que compte la ville. Dans l'équipe Mennucci, on a chiffré à "4 millions d'euros" le coût d'une première année de mise en place des rythmes, déduction faite du fond d'amorçage de l'État destiné à accompagner les communes dans la mise en place de la démarche. Passée cette aide provisoire, l'estimation remonte à 10 millions. Cela correspond à la fourchette basse évoquée initialement par Danièle Casanova. Mais, depuis quelques mois, la Ville ne communique plus que sur la fourchette haute. Quand, du côté du candidat socialiste, on mise sur le plan interministériel pour pérenniser le fonds d'amorçage. Dans une proposition de loi, le maire de Marseille réclame lui la prise en charge par l'Etat des frais supplémentaires engendrées par la réforme et qui devront être assumés par la municipalité. Ecueil supplémentaire pointé du doigt par le maire, l'épineuse question d'un éventuel jour de cantine supplémentaire le mercredi midi lié au passage à 4 jours et demi de classe par semaine.

Cette sortie ferme de Gaudin ne ressemble pourtant pas à un non définitif. En coulisses, les travaux de préparation sont toujours en cours, expliquent les deux adjointes en charge du dossier Danièle Casanova et Catherine Chantelot, chargée de la jeunesse et de l'animation dans les quartiers. Ce mercredi, elles ont rencontré la Caisse d'allocations familiales pour évoquer des financements complémentaires que pourrait verser l'organisme. D'autre part, les deux élues ont lancé à la fin de l'année dernière une consultation avec les différents acteurs du secteur (enseignants, parents, centres sociaux, fédérations de l'éducation populaire). Sur la base des observations recueillies, elles ont ensuite lancé un marché d'assistance à maîtrise d'ouvrage, qui devait prendre la forme d'"un audit de l'ensemble des associations de Marseille pour les inclure dans cette réforme des rythmes scolaires", résume Casanova.

Problème, explique Catherine Chantelot, "nous sommes en pleine ouverture des enveloppes sur cet appel d'offres et il semblerait que, dans un premier temps, les fédérations d'éducation populaire n'aient pas répondu". "Seules des entreprises dont c'est le métier sont candidates, confirme Casanova. On espérait une expertise plus proche du terrain, de structures qui sont déjà entrées dans les écoles." Avec une validation de ce marché prévue au conseil municipal de décembre et un plan de bataille exigé par l'inspection académique au même moment, la Ville se retrouve coincée. Les élues attendaient une cartographie précise, quartier par quartier, avec un repérage fin des acteurs associatifs susceptibles d'être sollicités. Ce n'est pas ce qui sortira du chapeau. Et les délais sont très courts si la réforme doit réellement être lancée en septembre. Du coup, la sortie du maire correspond également à une vraie difficulté à proposer des activités aux 73 000 minots de la ville.

"Ils traînent des pieds"

L'excuse fait sourire à gauche et notamment l'élue du premier secteur et proche de Patrick Mennucci, Morgane Turc. "Recenser les forces associatives ? On les connaît au bout de dix-huit ans, non ? Ils tournent autour du pot, ils traînent des pieds", s'agace-t-elle. Depuis le début – et c'est la raison de son chiffrage élevé – la Ville insiste notamment sur son souhait de n'embaucher que des titulaires du BAFA tout en se plaignant qu'avec le faible nombre d'heures proposées, les encadrants ne gagneront selon Chantelot que "100 euros par mois".

Mais Turc reconnaît tout de même les difficultés propres à Marseille. "On est face à un mur. En terme d'activité périscolaire, on démarre de rien." L'élue socialiste voit "une école délaissée", Catherine Chantelot évoque "un choix politique. On est en retard sur d'autres villes, Lyon et Toulouse par exemple, car nous n'avons pas choisi d'implanter les activités de loisirs dans les écoles avec les Claé (centres de loisir associés à l'école). À Marseille nous avons fait le choix des équipements sociaux parce que les enfants sont un public d'appel qui permet aux familles d'entrer dans le centre social, situé de plus en plus souvent en dehors des quartiers, pour éviter l'effet ghetto".

Avec des municipales calées au milieu du processus de mise en place, le démarrage de la réforme dès la rentrée dans son intégralité apparaît compliquée. La municipalité en veut pour preuve les difficultés rencontrées par la mairie de Paris. Et à gauche, Morgane Turc admet aussi du bout des lèvres que ce ne sera peut-être pas si simple si son camp l'emporte en mars prochain : "S'il faut prioriser plutôt que d'aller tout partout, on priorisera". En clair, la réforme sera lancée en premier lieu dans les quartiers les plus paupérisés, les mieux favorisés attendront.

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Commentaires

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  1. Céhère Céhère

    Mr Gaudin est-il au courant qu’il s’agit d’une loi et qu’à la limite, on ne lui demande pas son avis ? A moins qu’il ne demande une “clause de conscience” là aussi.
    Par ailleurs , quand on voit son bilan en 18 ans à la tête de la ville, on peut comprendre qu’il lui paraît impossible de mettre en place la réforme des rythmes scolaires en 2 ans.
    Il est temps de laisser la place.

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  2. Benjamin Benjamin

    44% d’enfants sous le seuil de pauvreté à Marseille : c’est un peu dramatique qu’il faille une loi pour que la mairie propose des activités périscolaires…
    Et même si ça coûtait 25 millions €, le cynisme électoral a des limites : quand on dépense 43 millions pour rénover le Vélodrome ou 44 millions pour un palais omnisport dont on se demande encore à quoi il sert, sans parler des subventions à des concerts qui n’en ont pas besoin, je trouve franchement indécent de râler quand il s’agit de dépenser pour l’éducation

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  3. ALAIN PERSIA ALAIN PERSIA

    C’est une loi mal ficelée qui créée des disparités suivant les départements et les communes notamment les petites qui ont une rentrée fiscale maigre.
    Il fallait laisser la semaine de quatre jours car elle permettait aux enfants soit d’aller dans les centres aérés soit pratiquer des activités culturelles ou sportives dans de bonnes conditions .
    Si V.PEILLON connaissait la réalité de la vie provinciale , il aurait mis en place une loi qui aurait prévu l’ouverture des écoles primaires et maternelles de 7h30 à 18h 30 les lundi, mardi, jeudi et vendredi .
    De 7h 30 à 8h 30 accueil des enfants et de 16h 30 à 18h 30 soutien scolaire pour les enfants en difficulté .
    Pour ma part c’est une mesure que je vais inscrire en priorité dans mon programme électoral pour mars 2014;
    Le gouvernement doit faire marche arrière au plus tôt.
    L’arrogance de V.PEILLON est dramatique.

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  4. cani cani

    La modification des temps de pause au moment du repas pose de gros se difficulté à certaines familles
    si l’on connait le secteur associatif, par contre il est difficile de savoir s’il peur satisfaire certaines demandes de 3/4 heurts par jour
    “l’homme qui vaut 3 milliards” a réponse à tout MAIS pourquoi dans son secteur, le service minimum n’est il pas toujours appliqué ?

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  5. Marius Marius

    La réforme Peillon est en soi une excellente réforme, qui nous rapprocherait du fonctionnement scolaire des pays plus performants que la France.

    L’erreur du ministre n’est pas la réforme, c’est d’aller trop vite.

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  6. Anonyme Anonyme

    l’anonyme 13 novembre 2013 à 21h10 (qui a été signalé au modérateur…scandaleux)a écrit une chose juste et vraie … modérateur SVP aucune censure
    Mis à part cela … depuis 18 ans les enfants sont la dernière priorité de nos chers élu(e)s (qui ont dépassé l’âge de la retraite). Pour le vélodrome, il y a du financement … mais pour nos enfants … une ATSEM pour 60 enfants en primaire et 45 en maternelle … fournitures pour l’école en baisse (je pensais au PQ et savon pour se laver les mains … le reste est apporté par les parents)… activités scolaires payantes (je pensais à l’accès aux musées municipaux) … la majorité des piscines fermées (cause risque d’effondrement … travaux ….) centre aéré aménagé en sous-sol avec des batailles à chaque période d’inscription et des liste d’attente à rallonge … le palais de la glisse est hors de prix pour certaines familles … l’accès à la mer demande que les enfants sachent nager … alors cette réforme … concoctée sans considération des rythmes physiologiques des enfants … tout pour le confort de nous les adultes (enseignants … parents … élus)… que dire …

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  7. Marseillais indigné Marseillais indigné

    A l’évidence ,bien qu’il fut enseignant,il a oublié les classiques :”une école qu’on ouvre ,c’est une prison qu’on ferme” Victor Hugo
    Notre triste cumulard de sénateur maire est bien mal placé pour parler finances et économie (avec l’ancien patron de la Caisse d’Epargne comme conseiller)!Que d’argent foutu en l’air entre l’ombriére et les pavés du Vieux port ,le tramway qui fait double emploi avec le métro,le tunnel du Prado (pour permettre aux beaufs bling bling en 4 x 4 d’emmerder les piétons les jours de match en encombrant les trottoirs sous l’ oeuil bienveillant de la police municipale ,et enfin cerise sur le gâteau:le Stade !

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  8. beboumax beboumax

    Marseille n’a pas la capacité financière d’absorber ces 25 M€, le ministre de l’éducation avec sa tête de premier de la classe veut imposer coute que coute sa lois mais en attendant c’est nous qui “Peillon”.

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  9. Puig Puig

    Les 25 millions annuels sont vite trouvés : il suffit de faire payer à l’OM un loyer décent pour le Vélodrome, ou mieux, de le vendre et affecter l’argent aux investissements dans l’éducation.

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  10. Electeur du 8e Electeur du 8e

    M. Gaudin ne manquera pas de lire avec intérêt cette enquête menée par l’Association des maire de France auprès des communes qui appliquent dès cette année la réforme Peillon : http://www.lemonde.fr/education/article/2013/11/20/rythmes-scolaires-plus-de-80-des-communes-satisfaites_3517015_1473685.html.

    Plus de 80 % des maires concernés sont satisfaits de la mise en place de cette réforme.

    Et sur l’aspect financier, plus de la moitié des maires estiment le coût de la réforme pour leur commune à moins de 150 € par enfant. Soit, pour les 73 000 écoliers marseillais, moins de 11 millions d’euros au total, avant prise en charge par l’Etat… On est assez loin des pleurnicheries à 25 millions d’euros de M. Gaudin…

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