Guetta : et si le conseil municipal était contraint de revoter ?

Guetta : et si le conseil municipal était contraint de revoter ?

Une semaine après le début de la tempête médiatique autour de la subvention municipale du concert de Guetta à Borély, l'onde de choc a largement dépassé le cadre marseillais. Tandis que l'info tourne, reprise par les médias nationaux, la contestation tente de se structurer à Marseille. "Ce n’est pas DJ Oil contre David Guetta"  rappelle Lionel Corsini, le fondateur du groupe Facebook. L'ancien membre des Troublemakers, loin d'être un inconnu de la scène électro s'avoue très agacé par  "l'amalgame inévitable" fait au cours cette semaine mouvementée.

Son Commando anti 23 juin a grandi à la vitesse de la lumière. Il s’est alors retrouvé bloqué, dans l'impossibilité de changer le nom du groupe une fois le nombre de 250 membres dépassé. Il a donc fallu garder ce nom quelque peu agressif qui reflète mal l'intention première de ses initiateurs. Et bien que Lionel Corsini ait martelé que le but n’était pas d’annuler le concert mais de remettre en cause la subvention de la Ville, rien n’y a fait. Le mur du groupe a été pendant un temps infesté de publications anti-Guetta. Il lui a alors fallu poser des barrières, pour éviter tout écart quant aux contenus postés par certains membres du groupe. "Je suis tout de même surpris qu'il ait fallu un mobilisation citoyenne pour soulever ce cas" s'étonne le DJ.

Mais si son groupe a vite dépassé la barre des 25 000 membres, garder un débat constructif semble avoir été très difficile. "Beaucoup de gens m'ont contacté, beaucoup ont signé ou adhéré au groupe mais pour parler dans les médias, porter un discours structuré, peu finalement répondent présent". Lassé, il souhaite prendre un peu de recul et laisser d'autres membres du collectif prendre le relais, notamment dans les médias. "depuis cette affaire, je n'ai pas plus de fans sur ma page Facebook professionnelle", explique t-il, alors que la mobilisation se révèle chronophage. Et si elle continue, ce ne sera plus lui qui mènera le combat sur le devant de la scène.

Les élus prennent le relais

Lionel Corsini a été contacté par certains élus locaux depuis que l'affaire a éclaté, mais il tient à garder une certaine distance à leur égard. Sa seule fierté est d'avoir créé un mouvement citoyen et une indignation à l'égard des politiques de soutien à la culture. "Lundi, des centaines de personnes ont suivi le conseil municipal en streaming pour voir ce qui ce disait sur l'affaire Guetta. Sans ça, ils ne l'auraient jamais fait !", explique le musicien. S'il continuera à appuyer le mouvement de contestation, il ne veut plus en assumer seul la responsabilité et en être le porte-parole. La suite pour les 25 000 membres du groupe ? La pétition numérique, dont la liste des membres sera imprimée et déposée à la mairie. La balle rebondit donc sur le terrain politique.

Côté politique justement, Christophe Madrolle (Modem) a opportunément été le premier à s'indigner du montant de la subvention. Lundi, à la suite du conseil municipal, c'est le député-maire Patrick Mennucci (PS) qui a écrit au préfet pour lui demander de se saisir du dossier, s'appuyant sur une décision de justice précédente concernant Adam Concert et la mairie de Six-Fours. Quelques jours plus tard, les élus d'EELV ont également envoyé une lettre au préfet. Ils s'appuient sur une erreur de date dans la convention de mise à disposition du Parc Borély passée entre la Ville et Adam Concerts. Pas de réaction de la part de la préfecture pour l'heure. Quant au nouveau président du groupe Faire gagner Marseille, le socialiste Christophe Masse, il préfère calmer le jeu pour concentrer ses flèches sur d'autres aspects de la politique municipale.

G comme Gaudin

Si certains médias nationaux comme l'Express ou le Figaro estiment que la contestation retombe, c'est aussi que les citoyens indignés ont du mal à voir quel débouché peut avoir leur mouvement. Peut-il y avoir une remise en cause de la décision municipale de subventionner un concert payant? Méconnue, il existe une autre possibilité de recours. Une sorte d'équivalent du référendum d'initiative populaire au niveau local. Si pour l'instant nul ne semble l'avoir soulevé, le règlement du conseil municipal prévoit une procédure de saisine citoyenne. L'article 5 intitulé "Contenu de l'ordre du jour" dispose d'un point g prévoyant que peut-être mis à l'ordre du jour : 

Toute question d’intérêt local, soumise par pétition d’au moins 10 000 habitants  de la ville, ceci dans un délai maximum de trois mois après la remise de cette pétition

Toutefois, si la pétition sur internet compte 13 000 membres, il faudrait que ceux-ci soient tous domiciliés à Marseille pour que le recours soit valable. Pourtant, selon les responsables du site Change.org qui abrite cette pétition, celle-ci a "une valeur légale". "En effet, nous disposons des noms, prénoms et adresses des signataires, critère constitutif d'une pétition", détaille Sarah Durieux, en charge de cette campagne. Elle précise également que de très nombreux Marseillais l'ont signée. Cela accrédite l'hypothèse d'un recours à l'article 5 du règlement du conseil municipal. Un tel recours forcerait la majorité municipale à remettre la convention passée entre la Ville de Marseille et Adam Concerts à l'ordre du jour du prochain conseil municipal. Le prochain est en mars. Mais le camp UMP pourrait jouer la montrer puisqu'il dispose de trois mois pour faire suite à la demande citoyenne. 

Réglement du conseil municipal de Marseille :