Fralib : au tribunal, on prend les mêmes et on recommence

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le 4 Avr 2012
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Fralib : au tribunal, on prend les mêmes et on recommence
Fralib : au tribunal, on prend les mêmes et on recommence

Fralib : au tribunal, on prend les mêmes et on recommence

Ne parlez pas de leçon de droit à Unilever concernant le deuxième plan de sauvegarde de l'emploi retoqué en novembre dernier : non non non, c'est simplement que la cour d'appel avait choisi d'être "plus exigeante que la loi". Toujours est-il que, ce matin, c'est une troisième mouture que les dirigeants de l'usine Fralib de Gémenos ont dû présenter au tribunal de grande instance de Marseille. Le nouveau plan de reclassement, en France uniquement (adieu la Pologne), et un plan de revitalisation plus détaillé étaient au coeur de l'argumentation de la multinationale. Tout à son amour des hôtels dans lesquels ses représentants se réfugient à chaque rendez-vous avec la presse, la firme nous a exposé sa position dans le sous-sol de l'Etap hôtel de la rue Sainte par la voix de son avocat. Magnéto Esther.

Comme le détaille maître Deschaud dans la vidéo, Fralib Unilever a été amenée ce matin à re-préciser les raisons de ces licenciements économiques dans une multinationale qui a réalisé 4,6 milliards d'euros de profit net en 2011 et dont le site de Gémenos est toujours rentable. L'entreprise avait déjà estimé auparavant que sa production de thé et d'infusions ne pourrait être à terme profitable que si elle la fondait sur trois sites contre quatre – sous-utilisés – à l'heure actuelle.

Les chiffres avancés ce matin sont contestés par les salariés. Ils estiment au contraire "dans la foulée de [leurs] experts" qu'il y a "une reprise de l'activité autour du thé". Un regain d'intérêt que notait déjà en 2010 le site spécialisé dans la distribution LSA mais qui concerne principalement les marques haut de gamme plutôt que les marques vendues en grande distribution qui se voient concurrencées par les sachets des distributeurs.

Cet aspect fait l'objet d'un débat qui enflamme les prétoires sachant qu'il n'est habituellement pas du rôle du juge de juger du caractère économique. La Cour de cassation doit d'ailleurs rendre un avis sur le sujet le 11 avril. Ce matin, Maître Ghenim, l'avocat du CE s'est engouffré dans la brèche :

Le débat n'est pas sur le bien fondé du motif économique. Nous introduisons un débat sur l'existence même du motif économique.

Bon, qui ne tente rien n'a rien. Mais ce n'était pas là le principal argument du représentant des salariés qui a fustigé un PSE incluant seulement 103 salariés. Depuis des semaines, le délégué CGT Olivier Leberquier, répète en boucle cette question :

Avec quel plan de sauvegarde de l'emploi sont partis les 79 salariés ?

Maître Ghenim  parle dans la même veine de "fraude sociale" quant au règlement au cas par cas du sort des salariés, qui entre la validation du 2e PSE en première instance et son annulation en appel avaient déjà reçu leur lettre de licenciement. A ses yeux, le CE aurait selon lui dû être consulté dans le cadre d'un PSE incluant les 182 employés avant que ne soit réglé les situations particulières. Magnéto Esther.

Côté direction, l'argumentation est la suivante. "Le deuxième plan de sauvegarde a été envoyé devant le juge du fond qui a validé la procédure estimant que l'obligation d'info avait été remplie, rappelle l'avocat. La cour d'appel est venue modérer la position le 17 novembre. Il est important de souligner que le projet de fermeture a été validée par le juge du fond comme la cour d'appel." Pour Fralib, les licenciements intervenus avant le résultat de l'appel restent par conséquent valables : ils ont été soldés par l'octroi d'une indemnité supplémentaire évaluée au cas par cas.

Le code du travail a prévu ce cas mais les interprétations diffèrent : pour la direction, les salariés pouvaient choisir entre réintégration et maintien dans l'entreprise donc "le droit d'option a bien été respecté". Pour Ghenim, c'est un autre élément de l'article qui cloche : tout versement supplémentaire aurait dû être prononcé par un juge , et non attribué dans le cadre d'une discussion interne.

Un PSE imprécis ?

Si, on l'a déjà dit, le CE estime que le PSE est trop réduit et donc caduc, il a tout de même été question de son contenu. Unilever, dans ses 103 postes proposés dans l'Hexagone, met sur la table des postes fixes et des postes dit "en sureffectif" qui ne seront créés qu'au cas par cas. "Il est de jurisprudence constante, a rappelé Maître Ghenim sans être contesté sur ce point, que le PSE doit comporter des dispositions concrètes, précises et pertinentes". "Au moins, elles sont imprécises", ajoute-t-il mettant en outre en exergue les postes proposés chez Amora, filiale moutardée d'Unilever, à Chevigny près de Dijon.

Pour le conseil, les postes fléchés devraient être réservés aux "70 salariés" restés sur le carreau depuis le plan social qui, là aussi, a touché le site en 2008-2009. Pour Unilever, cet autre PSE est terminé depuis longtemps et seules "quelques personnes" n'auraient pas retrouvé de travail. Une version patronale confirmée par le délégué syndical CFDT de l'usine de Côte-d'Or Bernard Deschamps pour qui les salariés sans emploi à l'heure actuelle "ne souhaitent pas réintégrer l'usine". Le syndicaliste estime par ailleurs que les onze postes proposés dans son usine correspondent à un vrai besoin étant donné qu'elle a "fortement recours à l'interim".

Tous les éléments précédemment soulevés trouveront une réponse, vraisemblablement provisoire, dans le délibéré du jugement prévu le vendredi 20 avril. Aujourd'hui, certains salariés, ils étaient encore nombreuxce matin après un an et demi de lutte, poursuivent leur combat et promeuvent leur projet de reprise du site pour donner "Fralib aux Fralibiens". Quelque soit le résultat final de la procédure en cours, il y aura de toute façon encore du thé produit à Gémenos : le plan de revitalisation d'Unilever inclut un projet d'une entreprise de la fiière permettant le maintien d'une quarantaine d'emplois sur site.

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