Fralib, à quoi joue Unilever ?

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le 8 Nov 2011
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La multinationale propriétaire de Fralib a fait donner ces derniers jours sa directrice de la communication, qui sur un ton d’infirmière en chef dans un service de soins palliatifs a expliqué un peu partout que cette fermeture était inéluctable, que non, non, non ce n’est pas une délocalisation, même si la production est aujourd’hui majoritairement partie en Pologne, et que oui, oui, oui, les 182 salariés licenciés retrouveront rapidement un job. Ils n’ont qu’à demander à leurs voisins de Netcacao ce qu’ils en pensent.

Et bien entendu, Unilever est tout à fait prêt à aider et encourager tout projet de reprise, même si, sur un ton largement condescendant, ils ont immédiatement rejeté celui présenté par un collectif de salariés. Ils ont demandé au cabinet d’expertise comptable Salustro de faire bosser quelques HEC histoire de torpiller le business-plan alternatif des salariés.

Avec d’autant plus de facilité que seul Unilever connait les chiffres du marché, les coûts de matière première, de marketing et de commercialisation, comme Marsactu vous l’a déjà raconté. Des infos confidentielles, qu’ils ne veulent pas livrer, et du coup, Progexa, le cabinet qui conseille les salariés est obligé de travailler à l’aveugle. La partie est forcément inégale.

« Les mains de la concurrence »

Comme en plus la marque « Elephant » n’est pas négociable, la fenêtre de tir pour une reprise est étroite. En réalité, et comme souvent dans ces dossiers de fermeture, la grande crainte d’Unilever est que l’usine puisse être récupérée par un concurrent. Alors que la dir com du groupe raconte, histoire de prouver sa bonne foi, que si la marque ne peut-être cédée, en revanche, les machines peuvent être elles apportées à un projet de reprise, le directeur de l’usine Angel Lllovera  dans une interview donnée la semaine dernière à 20 Minutes, parlait lui beaucoup plus cash :

 » Quant aux machines, nous voulons en garder six dont les spécificités ne doivent pas tomber entre les mains de la concurrence et les 32 autres sont destinées à la revitalisation du bassin régional : les entreprises qui le souhaitent peuvent les récupérer et celles qui ne trouveront pas preneur seront récupérées et envoyées dans des pays à forte croissance comme la Russie ou en Asie « .

La vérité sort toujours plus facilement de la bouche des directeurs d’usine que de celles des communicants. Ils ne perdent pas de temps avec les éléments de langage. Comme l’écrivait le mois dernier Bruno Witvoet le PDG d’Unilever France en réponse à un courrier de François Hollande et de Michel Vauzelle qui, suite à leur visite auprès des Fralibs, l’avaient interpellé sur l’avenir de l’usine :

« Nous avons déjà sollicité 30 repreneurs potentiels. A ce stade aucun ne souhaite aujourd’hui investir sur ce site, malgré les machines que nous nous sommes engagés à mettre à disposition de porteurs de projets viables » Pas de chiffre pour construire un business-plan fiable, pas de marque, et pas les bonnes machines, on comprend que les repreneurs ne se bousculent pas au portillon.

Et pour poursuivre dans sa stratégie de pourrissement, la multinationale a choisi d’envoyer hier matin quelques gros bras aux portes de l’usine, pour accompagner le mal-prénommé Angel Llovera (sans doute histoire de vérifier si ses six machines sont toujours là) conforté par une décision de justice qui oblige les salariés qui occupent l’usine depuis sa fermeture à les laisser passer.

Nous n’étions pas là, on ne sait pas ce qui c’est exactement passé, et qui a envoyé la première gifle. Et ce n’est pas parce qu’ils ont fabriqué du thé et des infusions toute leur vie que les CGTistes de Fralib ont adopté les bonnes manières de Nadine de Rotschild. En tout cas, ces grands garçons ont échangé quelques bourre-pifs, sous les yeux de gendarmes appelés en renfort par Unilever et des caméras de nos amis de France 3 Provence-Alpes :

Comme il se doit, la direction de la communication de Fralib a immédiatement réagi : « Ce matin, des salariés et leurs représentants ont pris à partie les gendarmes et attaqué violemment les agents de sécurité, dont trois ont été blessés« . Comme disait l’excellent Christian Labit « un bourre-pif de temps en temps n’a jamais tué personne« .

Bon, de leurs côtés les Fralibs sont allés raconter ce matin leur mésaventure à Jean-Paul Celet, secrétaire-général de la Préfecture de Région :

Et tout ça forcément dans l’indifférence générale de nos élus locaux. Personne ne bouge, tout le monde s’en fiche. Unilever aurait donc tort de se gêner.

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Commentaires

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  1. VIEUX PATRIOTE REPUBLICAIN VIEUX PATRIOTE REPUBLICAIN

    Depuis Giscard le promoteur du libéralisme avancé (comme un vieux calendo) la France sert de laboratoire,de banc d’essais aux “coups de génie” de la mafia de l’inspection des finances Ce sont ” Les Intouchables” décrits par Ghislaine Ottenheimer dans un excellent ouvrage “: Grandeur et décadence d’une caste : L’inspection des Finances On connaît leur palmarès :Haberer et la “banque industrie” au Crédit Lyonnais banque nationalisées que le directeur du trésor Trichet surveillait de trés loin Messier l’innocent aux mains pleines et Vivendi ,Bouton et la Société Générale, Minc celui qui souffle ses “petits conseils” dans l’oreille des présidents ,l’ineffable Baron Selliers spécialiste des compagnies aériennes etc
    Ils tentent de culpabiliser les français avec leur dogme “la compétitivité” car nous sommes sur terre pour en chier ,dés lorsqu’on ne fait pas partie de leur caste Mettre au chômage les Français exploiter les asiatiques et empocher la différence voila la façon de fonctionner de cette mafia et de ceux qui l’entourent ces fameux”investisseurs” ou les gens qui profitent du système
    Quelle boite multinationale n’a pas son directeurs de la Com, ses responsables de la Pub ,de Consultant ,de directeurs du marketing etc . Il faut bien caser les élèves des écoles de commerce ,refuges des fifilles et fi-fils à papa dont le nombre augmente en proportion de notre déficit commercial

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  2. Chris Chris

    Dans une société de consommation le Chef c’est le consommateur.
    Qu’il arrête d’acheter les merdes qui sortent de ces usines et ce genre de problème se règlera de lui-même : allez donc faire un tour chez les détaillants de VRAI thé, vous allez être surpris de voir quelle fortune sont vendus les sachets qui sortent de ces usines, et à quel point c’est de la m…e.
    (Ah oui mais j’oubliais à quel point mon discours est petit bourgeois : je fais la réclame pour le petit commerce, c’est pas bien au pays des gens coincés entre les syndicats et des grands distributeurs… ‘faut pas casser “l’outil de production”…)

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  3. aristache aristache

    Il faut arrêter avec Fralib.

    cette usine ne rime à rien et n’a jamais, à aucun moment de son existence, rimé à quelque chose si ce n’est exploiter encore plus les producteurs de thé.

    “Une production locale”, une “tradition” ….

    Où sont les arbres à thés ? Dans le massif de la Sainte Baume peut-être ?
    Quelle tradition ? Celle des santons ou des danses provençales ?

    Unilever fait à cette usine ce qu’elle même a fait au moment de la colonisation à nos porpres colonies. Juste retour de baton et juste retour des choses.

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