Fin du charbon à Gardanne : les dockers agitent la menace d’une grève dure

Actualité
le 18 Fév 2022
7

Face à l'impact de l'arrêt du charbon, la CGT des dockers de Fos réclame que le gouvernement acte un projet industriel pour la centrale de Gardanne afin de générer du trafic sur les terminaux. Les représentants syndicaux agitent la menace d'un conflit social long.

Au centre des nombreux représentants CGT, le secrétaire général du syndicat des ouvriers dockers du golfe de Fos Christophe Claret prend la parole.
Au centre des nombreux représentants CGT, le secrétaire général du syndicat des ouvriers dockers du golfe de Fos Christophe Claret prend la parole.

Au centre des nombreux représentants CGT, le secrétaire général du syndicat des ouvriers dockers du golfe de Fos Christophe Claret prend la parole.

La mise en scène est soignée. Devant l’entrée du terminal conteneurs du grand port maritime de Marseille-Fos (GPMM) sur les bassins Ouest, les militants bloquent l’accès du quai aux véhicules. Sous des chaleurs presque printanières, l’ambiance est bon enfant avec un barbecue, des palettes qui brûlent et quelques fumigènes. La majorité des personnes présentes portent le gilet rouge de la CGT ou leur vêtement de travail de dockers, mais l’on aperçoit aussi des membres de Berre l’Etang, d’ID Logistics ou de la centrale de Gardanne.

Le lève-conteneur réquisitionné se drape de banderoles de plusieurs sections pour montrer la solidarité entre elles. Mais c’est bien celle des dockers qui est la plus en évidence. Car ce sont eux qui sont à l’initiative de ce rassemblement pour défendre les emplois touchés par la baisse des trafics de vracs solides. “Nous avons perdu le charbon avec la fermeture de la centrale de Gardanne et la bauxite avec Alteo, sans obtenir de relais de croissance pour compenser. La biomasse ne marche pas et nous attendons toujours l’alumine. La baisse des vracs solides impacte 150 équivalents temps plein sur le port”, peste Christophe Claret, secrétaire général CGT des ouvriers dockers du golfe de Fos, qui est le premier à prendre la parole.

À ses côtés se trouvent Nicolas Casoni, secrétaire général CGT de la centrale de Gardanne, Olivier Mateu secrétaire de l’UD CGT 13 ou encore Serge Coutouris, représentant de la fédération CGT nationale des ports et docks pour ne citer qu’eux. “Forcément en étant plus nombreux, cela nous permet d’être plus fort. Il y a de la solidarité, mais notre situation les impacte aussi“, reconnaît Nicolas Casoni. Tous réclament que le gouvernement acte un projet industriel pour la centrale thermique de Gardanne, après l’abandon du charbon sur décision de l’État, et que les 40 salariés licenciés soient réembauchés.

“Nous allons poursuivre et amplifier la mobilisation”

Une première série de mobilisations en janvier avait été stoppée grâce à la promesse d’une table ronde. Cette rencontre entre syndicats et représentants des ministères n’a rien donné.

Du côté de Gardanne, le conflit autour de l’ex-centrale à charbon dure depuis trois ans. Mais depuis le début de l’année les dockers haussent le ton sur le sujet et espère donner à leur mouvement une envergure nationale. “La fin du charbon touche d’autres ports en France, comme Dunkerque ou Nantes, nous faisons déjà une démarche commune avec 24 heures de grève ici et une heure dans les autres ports français. Nous allons poursuivre et amplifier la mobilisation”, avance Serge Coutouris.

Chez les dockers de Fos, le discours est plus virulent. “S’il faut sortir de l’enceinte portuaire et tout niquer on le fera, s’il faut sortir des engins et envahir le siège du GPMM à Marseille on sait le faire”, prévient Christophe Claret. Une première série de mobilisations en janvier avait été stoppée grâce à la promesse d’une table ronde. Cette rencontre entre syndicats et représentants des ministères n’a rien donné. En décembre 2020, un “pacte” signé sous l’égide de l’État listait bien de multiples projets susceptibles de créer de nouveaux emplois, notamment dans la filière bois et dans les nouvelles énergies. Mais celui de l’exploitant de la centrale Gazel Energie, basé sur l’hydrogène vert, est jugé trop lointain, et la déclinaison portuaire encore floue.

Une prochaine réunion est prévue en mars, mais les syndicalistes assurent que cette fois ils poursuivront la mobilisation tant que le gouvernement n’aura pas acté de projet industriel.  “Toutes les actions se tiendront tant qu’une décision ne sera pas prise”, insiste Olivier Mateu. Une position que reprennent tous les représentants CGT à l’image de Serge Coutouris : “Ce n’est pas un coup d’épée dans l’eau malgré les courriers du gouvernement pour nous calmer.”

Après Gardanne et Alteo, au tour d’ArcelorMittal

Le blocage du port mettrait fin à plusieurs années de paix sociale -hormis durant l’opération nationale “port mort” en janvier 2020- sur la rade marseillaise et fosséenne. Les décideurs du GPMM expliquent d’ailleurs à l’envi lors d’opérations de promotion qu’ils travaillent depuis longtemps pour réussir à retirer l’étiquette “en grève” qui colle à la réputation de Marseille-Fos.

Reste à savoir si une mobilisation sans concession peut être largement suivie, et combien de temps cela peut durer. La CGT espère obtenir satisfaction sur le cas de la centrale de Gardanne avant la présidentielle. “Les ministères essaient de gagner du temps car pendant la période électorale nous savons que plus aucune décision ne sera prise“, juge Serge Coutouris.

Mais le charbon gardannais ne pourrait être que le premier épisode d’autres mécontentements. Christophe Claret s’inquiète d’ores et déjà du futur de l’activité d’ArcelorMittal, qui génère un important trafic dans le port. Le géant de la sidérurgie va fermer l’un de ses deux hauts-fourneaux et a annoncé le 3 février le remplacement de l’autre par un four à arc électrique pour se spécialiser dans l’acier recyclé. Ce qui signifie un changement de processus dans la fabrication et le recours à de la ferraille plutôt qu’à du minerai de fer et du charbon. “Cela veut dire qu’il y aura besoin de moins importer de minerais, nous ne savons pas encore combien cela pourrait concerner d’emplois mais quand nous voyons comment ça s’est déroulé avec Gardanne et Alteo, ça fait peur”, confie le syndicaliste. Le groupe n’a pas précisé les volumes que la ferraille représenterait, ni sa provenance. Il vante néanmoins une démarche circulaire. Ce qui ne présage rien de bon pour l’emploi portuaire… local.

Cet article vous est offert par Marsactu

À vous de nous aider !

Vous seul garantissez notre indépendance

JE FAIS UN DON

Si vous avez déjà un compte, identifiez-vous.

Commentaires

L’abonnement au journal vous permet de rejoindre la communauté Marsactu : créez votre blog, commentez, échanger avec les autres lecteurs. Découvrez nos offres ou connectez-vous si vous êtes déjà abonné.

  1. Bertrand B. Bertrand B.

    Bonjour Marsactu, pouvez vous illustrer l’article par des courbes de quantité annuelle de charbon et bauxite transitant par les docks. Et pour le charbon avoir la part destinée à la centrale de Gardanne.
    On pourra ensuite diviser ces quantités par 150 équivalent temps plein.
    Un historique de 10 ans serait sympa.
    Merci

    Signaler
  2. petitvelo petitvelo

    Si le port ne sert plus, il me semble qu’il y a du boulot dans le ramassage et le tri des déchets … avec probablement moins de privilèges que le statut de docker, il est vrai .

    Signaler
  3. Patafanari Patafanari

    Il faut savoir se reconvertir. Ils seraient parfaits sur une plateforme téléphonique de vente : » Tu vas me les acheter ces fenêtres! Ou je viens tout niquer chez toi! »

    Signaler
  4. Bertrand B. Bertrand B.

    Le site suivant met à disposition la production électrique horaire de chaque groupe de production en France:
    https://www.services-rte.com/fr/home.html
    Donc pour le groupe charbon de Gardanne:
    En 2018, il a fonctionné 729h soit environ 30jours
    En 2019: 19h soit 1 jour
    En 2020: 23h soit 1 jour
    En 2021: 0h
    En clair, le groupe charbon ne produit plus rien depuis 2019. Ça veut dire que depuis 2019, il n’y a plus de charbon destiné à ce groupe qui transite sur le GPMM.
    Ça me paraît abusif d’invoquer l’arrêt du charbon pour justifier la grève et la menace sur 150 emplois.
    Et juste pour info, le groupe ne tourne plus car les salariés sur site sont en grève.

    Signaler
    • Alceste. Alceste.

      Cela va les occuper, la grève étant leur activité principale.

      Signaler
  5. MPB MPB

    Analyses pour le moins simplistes…
    Ce n’est pas la CGT qui met systématiquement en péril la pérennité de secteurs stratégiques

    Signaler
    • Alceste. Alceste.

      J’adore votre qualificatifs de systématiquement, pour le moment la CGT ,et elle n’est pas la seule ,a bien fichu le port en l’air et si Gardanne était stratégique cela se saurait.Ce site n’a aucune utilité, hors mis d’être maintenu sous perfusion.

      Signaler

Vous avez un compte ?

Mot de passe oublié ?


Ajouter un compte Facebook ?


Nouveau sur Marsactu ?

S'inscrire