Entre guéguerre interne et rivalités chroniques, Renaissance 13 se cherche un nouveau patron

Actualité
le 12 Déc 2022
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Le parti présidentiel doit désigner à la fin du mois de janvier son nouveau leader départemental par un vote des adhérents. Une équation complexe à résoudre du fait des tensions entre marcheurs historiques et recrues issues de la droite locale.

Bertrand Mas-Fraissinet est l
Bertrand Mas-Fraissinet est l'actuel référent départemental de Renaissance. (Photo : ML)

Bertrand Mas-Fraissinet est l'actuel référent départemental de Renaissance. (Photo : ML)

Il est des élections plus aisées que d’autres. “En ce moment, c’est un peu le bordel”, glisse sans détours un militant de Renaissance dans les Bouches-du-Rhône. Le parti présidentiel, ex-La République en marche, va désigner son nouveau ou sa nouvelle présidente les 28 et 29 janvier prochains. Et c’est peu dire que le scrutin qui s’annonce est l’enjeu de bien des tensions au sein de l’antenne départementale.

Sur le papier, les choses sont simples. Le dernier week-end de janvier, les adhérents locaux “à jour de leurs cotisations” seront appelés à élire “une équipe de 20 à 25 personnes, car il s’agit d’un scrutin de liste et non de candidatures personnalisées”, précise Bertrand Mas-Fraissinet, actuel référent départemental et conseiller régional de la majorité Muselier. Les membres élus au bureau du département désigneront ensuite un ou une cheffe. Les adhérents ont jusqu’au 31 décembre pour prendre leur carte. Jusqu’ici, rien que de très classique.

Sauf que dans les faits, le “bordel” cité plus haut prend la forme de sérieux tiraillements autour des diverses candidatures possibles. Comme autant de lignes de fracture qui traversent une formation politique dans laquelle les “historiques” n’apprécient pas l’arrivée fracassante et le pouvoir grandissant des ralliés des derniers mois, issus pour beaucoup de la droite marseillaise. “Entre les vieilles haines recuites, le mépris des Marseillais pour le reste du département et ceux qui se disent de la première croisade plus valeureux que ceux de la deuxième… les clivages sont très complexes”, analyse avec ironie un proche de Renaud Muselier.

400 adhérents

Le président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, élu à la tête d’une liste composite après avoir quitté Les Républicains, vient d’adhérer à Renaissance. Il a brandi sa carte toute neuve, non sans rouler des muscles, et a rappelé à qui voulait l’entendre que les statuts du nouveau parti faisaient de lui le leader régional incontestable. Ils lui octroient de fait un regard dans la désignation des présidents départementaux. “Politiquement, ces statuts sont cohérents, pose Sabrina Agresti-Roubache, députée Renaissance de la 1ʳᵉ circonscription des Bouches-du-Rhône et conseillère régionale élue sur les listes Muselier. Les députés sont les patrons de leur circo et Renaud Muselier, celui de la région. Qui imagine quelqu’un au-dessus de lui ?” Une autre voix locale abonde : “Stéphane Séjourné, le secrétaire général de Renaissance, cède tout ça à Muselier parce qu’il est temps de payer ceux qui ont aidé le président et ont gagné sous sa bannière.”

Il s’agit aussi pour Renaissance de bâtir les fondations d’un ancrage local qui reste pour l’instant bien fragile. “Aujourd’hui, le parti compte environ 400 adhérents. C’est peu, raison pour laquelle nous avons la volonté de le structurer politiquement”, relève le député Lionel Royer-Perreaut, ancien LR passé dans le giron présidentiel en février dernier. Or, à ce jeu-là, les vieux briscards issus de la droite ex-UMP et-LR ont de l’expérience. Ce qui peut réjouir certains membres du parti présidentiel comme en effaroucher d’autres.

À l’ancienne

“Vous croyez qu’on le voit pas venir Lionel Royer-Perreaut ? Il est tout à fait capable de faire adhérer des gens, de faire rentrer 400 cartes pour être élu.”

un adhérent

Un adhérent s’irrite : “Vous croyez qu’on ne le voit pas venir, Lionel Royer-Perreaut ? Il est tout à fait capable de faire adhérer des gens, de faire rentrer 400 cartes pour être élu.” En creux, la critique pointe “les pratiques à l’ancienne” des transfuges des Républicains. L’entourage de Renaud Muselier balaye l’argument, jugé ridicule.

Mais nous, on ne veut pas que Renaissance 13 devienne le marigot qu’était la droite locale d’ici avant”, embraye un marcheur de longue date qui ajoute : “Notre parti ne doit pas servir de marchepied pour les municipales à Marseille ou à régler de vieux comptes avec Martine Vassal.” Plus tempérée, Anne-Laurence Petel, députée élue en 2017 et 2022 dans la 14e circonscription à Aix sous les couleurs d’En Marche, manifeste néanmoins son désir de voir Renaissance 13 “rester fidèle à ses valeurs fondatrices de 2016, notamment en termes de renouvellement politique”.

Ces dissensions qui secouent la macronie départementale, le député de la 8e circonscription des Bouches-du-Rhône, Jean-Marc Zulesi, ne les élude pas. “C’est présent, ça se ressent, ça se comprend”, résume-t-il. Dans ce paysage chahuté, le divorce consommé entre la députée Anne-Laurence Petel et Renaud Muselier semble un des points de crispation les plus importants. Le président de la région est proche de Sophie Joissains (maire UDI d’Aix) à laquelle la marcheuse s’oppose frontalement au conseil municipal aixois et il n’a pas soutenu la députée sortante aux dernières législatives. Ce qu’elle ne digère pas. “Ça doit se régler par un dialogue entre eux et ça ne doit pas gêner le processus d’élection”, plaide le député du nord de l’étang de Berre.

“Les historiques ? Ils servent à rien”

Pour l’instant, ça coince encore. Dans l’entourage de Renaud Muselier, un élu ne retient pas ses coups : “Les historiques de LREM à quoi ils servent ? À rien. Ils ont tout perdu. Il ne faut pas que Renaissance 13 soit une machine à récompenser l’échec.” Jean-Marc Zulesi , pourtant marcheur de la première heure, prend plus de pincettes, mais glisse un message voisin. “Il y a une recomposition politique très nette dans ce département, il faut en tenir compte. Être un historique ne rend pas plus légitime qu’un autre”, observe-t-il.

Un petit caillou jeté dans le jardin de Bertrand Mas-Fraissinet. À la tête de la succursale bucco-rhodanienne jusqu’au scrutin, ce dernier n’annonce pas pour l’heure s’il se représente. “Mais cette nouvelle organisation départementale, cela fait sens que j’en fasse partie”, avance prudemment ce pivot du mouvement macroniste, membre du bureau exécutif du parti.

Castaner dans le paysage

À ce stade, d’ailleurs, les volontaires à la présidence ne se bousculent pas au portillon. Lionel Royer-Perreaut ? “Ce n’est pas le sujet”, répond-il, même s’il juge légitime “en tant que parlementaire de jouer un rôle dans la structuration du parti, son organisation et son animation”. Sabrina Roubache n’est pas tentée et Jean-Marc Zulesi qui a le profil du “gendre idéal” pour beaucoup de ses pairs, préfère se concentrer sur ses missions de président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale.

“Cette liste unitaire devra être représentative des rapports de force. Les parlementaires se voient, se parlent et travaillent à cela”

Lionel Royer-Perreaut

Le retour de Christophe Castaner localement avec son arrivée au conseil de surveillance du Grand port maritime de Marseille chatouille aussi une partie des marcheurs du cru. L’ex-ministre de l’Intérieur compte-t-il jouer un rôle dans les instances départementales ? “Je n’ai pas d’information sur le fait qu’il veuille s’impliquer”, évacue Bertrand Mas-Fraissinet. Quant à Anne-Laurence Petel, elle ne dit pas non plus si elle va s’aligner. Mais comme tous les autres acteurs, quelle que soit leur obédience, elle réclame l’élaboration d’une liste de consensus. “Cette liste unitaire devra être représentative des rapports de force. Les parlementaires se voient, se parlent et travaillent à cela”, reprend Lionel Royer-Perreaut.

Mais là encore, c’est l’épineuse équation de la représentation des équilibres qu’il s’agit de résoudre. Et à les entendre les uns et les autres, chacun a échafaudé un scénario, pas toujours compatible avec celui du voisin. Renaud Muselier, désormais grand manitou régional, laisse aux troupes départementales jusqu’au 15 décembre pour trouver une solution, avant de mettre les mains dans le cambouis. Une réunion est prévue ce mercredi avec tous les parlementaires du 13 sur le sujet. Après un précédent rendez-vous mercredi dernier. Aucune fumée blanche n’en est sortie.

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Commentaires

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  1. julijo julijo

    quadrature du cercle ou/et mission impossible.
    cet ensemble d’élus opportunistes semble être hors sol au vu des préoccupations quotidiens des électeurs et citoyens en général.

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  2. ruedelapaixmarcelpaul ruedelapaixmarcelpaul

    Et dire que la « cheffe naturelle », après sa déclaration d’amour a Macron en pleine délibération sur l’Ukraine en conseil municipal, n’est toujours pas officiellement Renaissance… quelle injustice !

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    • PierreLP PierreLP

      Il y aurait des chicayas ?

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  3. vékiya vékiya

    dès le prochain scrutin les engatses commenceront

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  4. BRASILIA8 BRASILIA8

    Ex UDF, ex RPR, ex LR, ex PS …. ce n’est pas Renaissance mai Recyclage

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    • ruedelapaixmarcelpaul ruedelapaixmarcelpaul

      Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme

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  5. Alceste. Alceste.

    A titre informatif ,Renaissance 13 c’est combien d’adhérents dans les BdR ?

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    • vékiya vékiya

      lisez l’article

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  6. Alceste. Alceste.

    400 adhérents ?.

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    • vékiya vékiya

      c’est impressionnant, non ?

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    • julijo julijo

      les bouches du Rhône, un peu plus de deux millions d’habitants !

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    • Zumbi Zumbi

      S’il y avait réellement 400 adhérents sérieusement structurés et militants, ça se verrait : là c’est manifestement plutôt de petits clubs de supporters de tel ou telle chef.fe.

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  7. MPB MPB

    Et combien de militants locaux chez les Verts ? Au PS ? Chez LR qui verrouillait tout il y encore deux ans ?
    Joker pour le RN et les Insoumis.
    Un tableau pathétique, et des querelles de petits boutiquiers.
    Faut-il pleurer, faut-il en rire ?… Font-ils envie ou bien pitié, je n’ai pas le coeur à le dire (merci Jean Ferrat)

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  8. Marc13016 Marc13016

    Ça “marche” plus comme à la première heure, apparemment.
    Fini l’esprit pionnier, retour à l’esprit droitier … .
    Symptomatique d’un manque d’ancrage local pour le parti présidentiel. Voire d’un manque d’ancrage tout court : au début, il recrutait des gens avec les pieds dans l’économie, la société civile, etc. Maintenant, il recrute des gens avec des pieds dans la politique locale ( pour rester poli). Dure réalité des décomptes électoraux, faut qu’ça rentre, les voix ! Celui qui tient le bon bout à ce jeu, c’est bien celui qui peut créer 400 électeurs !

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  9. bpmhannart bpmhannart

    Pathétique, cette tambouille politicienne au corpus idéologique plat comme une limande, sauf à satisfaire quelques egos en perdition.

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