En Provence, le gendarme du nucléaire a du boulot

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le 15 Mar 2011
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En Provence, le gendarme du nucléaire a du boulot
En Provence, le gendarme du nucléaire a du boulot

En Provence, le gendarme du nucléaire a du boulot

Pendant qu’au Japon les centrales s’emballent, le président de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) André-Claude Lacoste assurant à Reuters qu’ »on est dans une catastrophe tout à fait évidente« , nos 58 réacteurs se rappellent au bon souvenir des Français et le débat sur les risques qui n’avait pas été mené en amont du programme nucléaire se retrouve relancé.

Avec bien entendu des sorties rassurantes dans les JT de ministres (Eric Besson et Nathalie Kosciusco-Morizet) et de la patronne d’Areva Anne Lauvergeon. Et de l’autre des opposants qui rebondissent sur les événements en cours, notamment à Marseille, où une manifestation était organisée sous la pluie à midi devant la préfecture.

Un lancement du débat… qui fait débat. Ce matin, l’édito de La Marseillaise, estime que « c’est un procédé honteux que celui de tenter de récupérer quelques voix aux cantonales sur le dos des dizaines de milliers de morts japonais ». Une « indécence » qui n’est pas que dans les rangs des anti-nucléaires, note de son côté Arrêts sur images, qui s’étonne toutefois du peu d’intérêt pour une autre catastrophe industrielle : les complexes pétrochimiques en feu de l’archipel nippon.

Ces réserves en tête, Marsactu a toutefois souhaité faire le point avec Pierre Perdiguier, chef de la division de Marseille de l’ASN, sur la gestion des risques dans notre région, qui compte notamment 18 installations nucléaires de base (réacteurs de recherche, laboratoires de fabrication des combustibles, centres de gestion des déchets…) à Cadarache (Bouches-du-Rhône) et 4 à Marcoule (Gard).

Marsactu : comment le risque sismique est-il pris en compte en Provence ?

Pierre Pierdiguier : La France métropolitaine est une région à sismicité modérée, voire très modérée. En revanche le Sud-Est est davantage concerné et on a eu par le passé un certain nombre de séismes dévastateurs : on a commémoré il y a deux ans le séisme de Lambesc de 1909.C’est donc une risque avéré par rapport auquel il faut prendre des mesures de précaution et c’est encore plus vrai pour les installations nucléaires. L’ASN a élaboré une réglementation qui impose qu’en cas de séisme elles ne doivent pas s’effondrer mais aussi rester intègres, c’est-à-dire qu’il n’y ait pas de fuites dans l’environnement. On recense l’ensemble des séismes passés dans la région sur une période qui recouvre environ mille ans, et on identifie les plus puissants. Puis on rajoute des hypothèses défavorable pour imaginer le pire des cas en plaçant l’épicentre au plus près des installations nucléaires et en multipliant par 5 la puissance (soit 0,5 de plus sur l’échelle de Richter, ndlr). Pour le site de Caracache, la référence est le séisme de Manosque en 1709, ce qui donne avec la marge une magnitude de 5,8. Pour Marcoule elle est de 5,3.

L’ASN a pourtant récemment mis en demeure le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) de Cadarache de faire des travaux au Lefca, l’une des installations, sous peine de sanctions administratives et pénales…

La connaissance sur le risque sismique évolue rapidement, et la réglementation évolue donc en conséquence. Un certain nombre d’installations ont été construire avant qu’elle soit applicable. L’ASN impose que tous les dix ans un réexamen de sûreté au regard des nouvelles normes. Et s’il ne tient pas, l’ASN demande que des renforcements soient faits – comme le réacteur Cabri ou le Lefca – ou dans les cas où ils ne sont pas envisageables impose la fermeture de l’installation, et le démantèlement – comme l’ATPu. Pour le Lefca, les travaux ont été pour la plupart menés dans les délais, qui ont permis le mettre à niveau pour résister au séisme de référence. Par contre, il reste encore une étape à franchir en cas de concomitance avec une liquéfaction du sol, c’est-à-dire une remontée de la nappe phréatique. Ces travaux de pose de drains ont commencé.

Vous évoquiez l’atelier de technologie du plutonium (ATPu). Dans un autre domaine, un incident s’y était produit en 2009. Et le dernier compte-rendu d’inspection n’est pas parfait…

L’incident portait sur une sous-estimation significative des quantités de plutonium présentes et avait été classé au niveau 2. L’ASN avait alors suspendu les opérations et n’a depuis autorisé leur reprise que progressivement, avec des critères d’estimations et de mode opératoire. Une inspection a en effet été menée en début d’année sur le thème de la criticité, qui a indiqué un certain nombre d’axes d’amélioration, notamment sur la prise en compte de l’incertitude dans les calculs. L’ASN a donc fait des demandes d’actions correctives et d’informations complémentaires. Nous serons particulièrement vigilants à la réponse qui sera faite et aux mesures qui seront mises en place.

Les inspections dans les autres installations de Cadarache menées en début d’année relèvent également systématiquement des « écarts notables ». Ce n’est pas très rassurant…

Le travail des inspecteurs de l’ASN est d’examiner un certain nombre de points et en particulier la conformité avec les règles. Quand des points sont jugés non conformes, l’ASN fait une demande et on suit avec attention les réponses qui nous sont faites. C’est quelque chose qui est dans notre relation quotidienne avec les exploitants nucléaires.

Un lien Face au risque sismique, le CEA joue la montre à Cadarache, sur Marsactu

Un lien Le site de la journée d’information séismes et nucléaire à Marseille

Un lien 22 kilos de plutonium en trop à l’ATPu : l’ASN prévenue trois mois après, sur Terra eco

Un lien Pour plus d’infos sur le Japon, le site spécial de l’ASN et le blog Effets de Terre

Un lien Nucléaire : un si long silence, émission d’archives d’Arrêts sur images disponible gratuitement

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Commentaires

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  1. zenon zenon

    Entre deux échelles de Richter, par exemple entre 5.4 et 6.4, l’énergie du séisme est multipliée par 30 donc le facteur de sécurité de 5 semble largement insuffisant en cas de très gros séisme

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  2. charlessxx charlessxx

    Confirmation, si les centrales de la vallée du Rhône ont été bâties pour résister à 5.8 on n’est pas du tout protégé contre un fort tremblement de terre… Ni contre les terroristes en Airbus… Ni contre les inondations… et comme à Marseille on est sous le Mistral, c’est chez nous qu’il faut distribuer les masques et les pastilles d’iode…

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  3. Lougabian Lougabian

    Hé les enfants du calme, ici la sismicité est modérée depuis 1000 ans ce qui n’est pas le cas au Japon où les tremblement de terre de niveau 6 à 7 ont lieu tous les ans

    Le tremblement de terre de 9 au Japon était de l’ordre du possible selon les experts, alors qu’un tremblement de terre même de niveau 7 ici n’est qu’infinitésimal. Et au Japon il y a eu la conjonction de deux catastrophes qui ne pourraient pas arriver au Tricastin ou dans les terres. Car c’est le tsunami le problème pas le tremblement de terre dans le cas qui nous occupe. Sans tsunami il n’y aurait pas eu ces pannes

    Le plus grand risque c’est en revanche celui d’un fort de tremblement de terre en Italie ou au Portugal qui conduirait à un tsunami. Mais nous n’avons pas d’installation nucléaire en bord de Mer en PACA

    En revanche sur l’Atlantique (à Blaye par exemple) ils peuvent s’inquiéter car le tremblement de terre de Lisbonne au 18ème siècle avait fait des dégâts jusqu’en Angleterre à cause d’un tsunami

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  4. Ginetto Ginetto

    @ Lougabian : tu voulais dire 100 ans ? Parce qu’en 1909 à Lambesc, ça a tremblé à 6,2 je crois. Le tremblement avait fait 46 morts et 250 blessés.

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