En campagne avec le député RN José Gonzalez : “on n’arrive plus avec la croix gammée”

En campagne avec le député RN José Gonzalez : “on n’arrive plus avec la croix gammée”

“Ce n’est pas impossible que je sois réélu au premier tour.” José Gonzalez, élu député du Rassemblement national (RN) dans la 10e circonscription des Bouches-du-Rhône en 2022, est confiant. Et pour cause : il y a deux ans, le conseiller municipal d’Allauch avait laissé la candidate de la gauche, Marina Mesure, sur place au second tour, en doublant son score d’un tour à l’autre pour atteindre 59% de suffrages exprimés. Dernièrement, son parti a dépassé les 43% aux européennes du 9 juin dans sa circonscription, un des plus hauts scores du département pour l’extrême droite.

Ce mercredi 19 juin, à Allauch, José Gonzalez commence sa journée en campagne dans un bar de quartier. Accoudé au comptoir, jus d’orange à la main, le parlementaire nous accueille avec assurance : un petit compliment sur le physique, une pression appuyée sur le bras en guise de première approche. Le candidat perd cependant son sourire d’un coup en découvrant ses premiers tracts de campagne, tout juste sortis de l’imprimeur. “Tu as que ça ?”, s’étonne-t-il auprès de son suppléant, Stéphane Simond. Sur la table, la pile est mince, en effet. Mais, de toute façon, seulement une dizaine de flyers partiront aujourd’hui. Pas en raison d’un désintérêt des habitants, mais plutôt parce que ces derniers semblent en fait déjà convaincus par l’élu, et surtout, par ses idées.

Pas de kalachnikovs à Allauch, mais…

Le candidat, son suppléant, et des militants, se lancent ainsi sur le marché hebdomadaire d’Allauch pour débuter le tractage. “Donnez-moi un appart et je vote pour vous”, l’interpelle une commerçante. “Les gens qui le méritent on vous le donnera”, lui répond le député sortant. “Ceux qui le méritent” ? Très vite, la suite de la discussion ne laisse plus de place au doute. “C’est moi qui suis chez moi ici”, s’enflamme la vendeuse. Le suppléant nous glisse avec fierté : “Vous voyez, ce n’est pas nous qui le disons.” Sous notre regard, José Gonzalez commence à être mal à l’aise face à certaines déclarations. Jusqu’à nous chuchoter à l’oreille, il tente : “Les gens ne sont pas racistes, mais ils en ont ras-le-bol.”

Mais quand les Allaudiens parlent de leurs problématiques et inquiétudes du quotidien, on revient toujours sur l’immigration, et l’insécurité, qui sont intrinsèquement liées dans le discours de l’extrême droite. “Sur Allauch, on est privilégiés, mais ça nous inquiète quand même, alors on anticipe, explique Alexandra, ancienne sarkozyste, aujourd’hui militante au sein du parti de Marine Le Pen. L’atout majeur du RN c’est la sécurité, quand je descends à Marseille, je suis très inquiète.” Sa fille, Victoria, 17 ans, partage le même sentiment : “Ça nous fait très peur.” La comparaison avec la ville voisine revient régulièrement. “Après ce n’est pas la même chose qu’à Marseille, il n’y a pas encore eu des kalachnikovs à Allauch, mais on a quand même des cambriolages”, complète José Gonzalez.

“Chaque tribu de singes a besoin de son territoire”

“Vous voulez voir le bar de Plus belle la vie ?”, nous propose ensuite le candidat pour détendre l’atmosphère. À quelques mètres du marché se trouvent en effet les nouveaux décors de la série télévisée. À l’ombre de la place, deux électeurs se lâchent un peu plus, à condition de garder leur anonymat. “On le pense tout ça, mais on le dit pas, car quand vous dites ce que vous pensez on vous poignarde”, justifie l’un d’entre eux. “Les gens sans arrêt, ils nous traitent de racistes, mais ça, c’était avant. La plupart, ils sont cons et ils ont pas de cerveaux. Parler encore de chambres à gaz et de Hitler, c’est n’importe quoi, expose ainsi un jeune homme, son panier dans une main et un tract du RN dans l’autre. On est obligés d’être raciste quand on entend que untel a été agressé par untel.”

“À Allauch je ne crains pas, mais au Carrefour de Saint-Barnabé, je dois tout le temps regarder si il y a pas quelqu’un derrière moi, puis c’est toujours les mêmes”, souffle une retraitée qui se tient à ses côtés. Les deux clients du marché ont cependant du mal à accepter de poser des mots pour qualifier ces “toujours les mêmes”, ou “untel” et “untel”. Puis leur exposé est écourté. Le député sortant, qui jette une oreille tout au long de l’échange, essaye de nous presser le pas pour mettre fin à la discussion. L’élu semble encore une fois mal à l’aise face aux propos de ses sympathisants. Et essaye de clarifier : “Le racisme à l’état pur, on n’en veut pas.” Avant de lâcher : “On assume la préférence nationale. C’est humain, c’est logique. Chaque tribu de singes a besoin de son territoire.”

“Je ne suis pas d’extrême droite, précise encore le candidat du parti de Marine Le Pen. Qu’ils nous montrent les gens extrémistes au RN. Ça ne marche plus la diabolisation. Ils savent qu’on n’arrive plus avec la croix gammée.” L’attitude enthousiaste des passants sur le marché lui donne raison. “Pas la peine de me parler, je suis déjà complètement pour”, lance une habitante qui passe en coup de vent. D’autres récupèrent timidement un tract. Plusieurs glissent une poignée de main amicale. “J’ai adoré votre discours sur l’Algérie française à l’Assemblée, vous m’avez donné les larmes aux yeux”, le salue un vendeur de t-shirt.

José Gonzalez, lui, ne manque pas de partager son affection pour une jeune militante, à grands renforts de caresses sur les épaules, dans les cheveux. “17 ans et belle comme ça”, lâche-t-il devant Marsactu et la mère de l’intéressée. Laquelle, comme sa fille, parait flattée de ces mots venant de l’octogénaire frontiste. Pas de doute, Allauch est sous le charme.

Les candidats de la gauche et du centre au combat contre l’extrême droite et José Gonzalez

Face à José Gonzalez (RN), dans la 10e circonscription des Bouches-du-Rhône, les autres têtes d’affiche du scrutin législatif, Véronique Bourcet (Modem) et Jimmy Bessaih (Nouveau Front populaire), vont avoir du mal à déloger le député sortant de son fauteuil du palais Bourbon. “Je combats le Front national (FN) depuis mon adolescence, explique la représentante du camp présidentiel. Aujourd’hui le RN fait encore peur quand même, quand vous parlez aux électeurs de ce que sera un gouvernement avec eux.” Pour ce territoire, veut-elle croire, “il y a d’autres solution que l’extrême droite”. Jimmy Bessaih, qui avait réussi à atteindre le second tour en 2022, alors qu’il était le suppléant de Marina Mesure, voit ce nouveau scrutin comme un “combat” face auquel il prend ses “responsabilités”. Si “en 15 jours c’est compliqué de s’organiser”, l’élu municipal de Gardanne expose sa stratégie : “Il faut parler aux abstentionnistes et à ceux qui combattent l’extrême droite”.

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