Feuilles de papier, essuie-tout… Les petits Marseillais contraints de fournir les écoles

Actualité
le 6 Sep 2017
11

Est-il bien normal de devoir glisser une ramette de papier, un rouleau d'essuie-tout et une boîte de mouchoirs dans le cartable de son bambin le jour de la rentrée ? Si dans certaines écoles marseillaises, la pratique est devenue une habitude, elle continue de faire réagir des parents et des enseignants, qui dénoncent des dotations municipales insuffisantes.

Feuilles de papier, essuie-tout… Les petits Marseillais contraints de fournir les écoles
Feuilles de papier, essuie-tout… Les petits Marseillais contraints de fournir les écoles

Feuilles de papier, essuie-tout… Les petits Marseillais contraints de fournir les écoles

“Livraison ce matin dans notre école (publique), à dos de minots, de 250 ramettes de papier A4 et 250 boîtes de mouchoirs en papier fournies par les familles….”, écrivait sur le ton de l’ironie un commentateur de Marsactu sur un article consacré à la rentrée des classes à Marseille. Sur les réseaux sociaux, le débat se poursuit. “Trafic de ramettes”, pointent les uns, tandis que d’autres rapportent, comme ce journaliste de l’AFP, qu’en plus des stocks de papier, on demande à certains parents de mettre dans le cartable de leur enfant le jour de la rentrée un rouleau d’essuie-tout, un gobelet en plastique ou des boîtes de mouchoirs en papiers.

Des enfants qu’on imagine en petits sherpas pour ce premier jour d’école de l’année, venant ajouter leur pierre à la pile de ramette de papier au fond de la classe. Comme le symbole d’une école publique aux moyens si resserrés qu’elle demande aux parents de compléter ses besoins de matériel collectif. En moins d’une heure, nous recueillons en tout cas une dizaine de témoignages sur des écoles différentes allant dans ce sens, et pour qui le bloc de papier dans la liste des courses de rentrée est devenu une habitude.

“Ça nous permet d’acheter des manuels récents”

Reste un constat : des besoins élémentaires pour le fonctionnement d’une classe ne sont pas couverts par l’école publique. “Les équipes font des choix, témoigne Pascal Pons, enseignant à l’école Saint-Louis-Le Rove dans le 15e arrondissement et syndicaliste CGT. Les ramettes prenaient une grosse partie du budget, on a donc décidé d’en demander aux parents pour faire des dépenses sur autre chose. Dans notre école, on ne leur demande pas de cahiers, en dehors des cahiers de brouillon.” Les ramettes sont donc mises en commun “en mode coopératif”, afin de constituer un stock dans chaque classe pour passer l’année. “Normalement l’école est gratuite, bien sûr. Je suis contre le fait de demander autant de choses, mais je suis obligé, déplore Pascal Pons. Ça nous permet d’acheter des manuels récents, qui coûtent extrêmement cher, alors que l’incitation à les renouveler régulièrement est très forte. La dotation de matériel par la mairie est largement insuffisante”. 

Le budget dont dispose les écoles pour les dépenses en fournitures est laissé à la discrétion de la mairie, qui alloue à Marseille 38 euros par élève, 42 en zone prioritaire. La liste de rentrée relève ensuite de la responsabilité des enseignants et des directions d’établissement. “Les enseignants font ce qu’ils veulent avec les dotations que nous leur accordons, se dédouane Danièle Casanova, l’adjointe à l’éducation. Ils commandent ce qu’ils veulent dans les catalogues de nos fournisseurs, et nous négocions une réduction de 30% pour toutes les commandes. S’ils veulent commander du Sopalin ou des ramettes, ils le peuvent”. 

Pour l’adjointe les “3,5 millions d’euros de fournitures cette année” (en ajoutant les 13 610 élèves du privé aux 77 700 écoliers du public) sont suffisants. Pourtant, le contraste existe avec les autres villes, assure Pascal Pons : “Les enseignants qui partent de Marseille nous disent après que, niveau fournitures, c’est un tout autre monde”.

La loi semble en tout cas prévoir une prise en charge plus large par la puissance publique du matériel. “La commune a la charge de toutes les fournitures à usage collectif. Celles qui sont destinées à un seul et même élève et restent sa propriété ne relèvent pas du principe de gratuité”, rappelait en 2008 la Cour des comptes. Ainsi, il semble difficile d’inclure l’essuie-tout ou les ramettes de papier dans la catégorie des fournitures individuelles.

“Selon les municipalités, des dotations de classes qui passent du simple au double”

Du côté d’un autre syndicat enseignant, le SNUIPP (FSU), le ton est plus nuancé sur le sujet. “Cela arrive qu’on demande des ramettes de papier, mais c’est à la marge, assure Claire Billès, secrétaire générale, mais il est vrai que selon les municipalités, on peut avoir des dotations de classes qui passent du simple au double”.

La dotation marseillaise est “à peu près dans la moyenne”, juge-t-elle, plutôt “dans la moyenne basse”, pour Pascal Pons de CGT Éduc. En 2011, une étude du SNUIPP plaçait la moyenne des dotations par élèves à 45 euros en primaire. Malgré les efforts pour remettre en état les établissements après la polémique sur leur vétusté à l’hiver 2016, le retard important de Marseille pour ce qui est des dotations aux écoles peine à s’atténuer.

Cet article vous est offert par Marsactu
Marsactu est un journal local d'investigation indépendant. Nous n'avons pas de propriétaire milliardaire, pas de publicité ni subvention des collectivités locales. Ce sont nos abonné.e.s qui nous financent.

Commentaires

L’abonnement au journal vous permet de rejoindre la communauté Marsactu : créez votre blog, commentez, échanger avec les autres lecteurs. Découvrez nos offres ou connectez-vous si vous êtes déjà abonné.

  1. mrmiolito mrmiolito

    Fournir des choses, passe encore, c’est de bonne guerre. Moi ce que j’aimerais c’est ne pas apprendre le jour de la rentrée (comme ce lundi) que de la tétralogie cantine/TAP/garderie/Centre aéré (4 dossiers dûment remplis, pour certains avant l’été), AUCUNE n’est en fonction au démarrage ! Les parents n’ont qu’à se dém…der pour boucher les trous ! Et ce pour une rentrée où rien d’important n’a changé (même délégataire de cantine, même centre aéré, même école…)
    Qu’il y ait un manque de moyens certes, mais aussi manque d’organisation des choses. Ca me dérangerait pas que mon niston serve de sherpa pour l’école s’il y trouvait en arrivant une organisation prête à tourner !
    Vous savez, il faut vraiment l’aimer, l’école publique dans cette ville….

    Signaler
  2. Minh Derien Minh Derien

    Quand le président de la république en appelle aux propriétaires pour compenser les 5€ de baisse des APL qu’il a décidée, peut-on s’étonner que les écoles, faute de moyens municipaux, se mettent à “taxer” les gamins de ramettes de papier (combien serviront au courrier administratif ?), d’essuie-tout,…et bientôt de papier toilette, comme cela semble être les cas dans certains établissements scolaires ?
    On peut aussi s’étonner du fait que les versements aux coopératives scolaires (pourtant regroupées au sein d’une association) ne permettent aucune réduction d’impôts, contrairement aux dons à de très nombreuses associations…

    Signaler
  3. LaPlaine _ LaPlaine _

    Comme beaucoup d’autres sujets, une des missions régaliennes de cette municipalité qui est d’assurer le fonctionnement de l’école de la république est un fiasco. Dans ce domaine aussi (malheureusement pour les enfants), l’incompétence et la gabegie semblent généralisées. On remerciera également au passage FO pour sa contribution au bon fonctionnement des institutions marseillaises.

    Signaler
  4. Pauline Bosset Pauline Bosset

    Pour nous, 3 enfants scolarisés en primaire à Marseille : 6 ramettes de papiers, 6 boites de mouchoirs, de l’essuie-tout et 1 carte RTM de 10 tickets (car là aussi, la mairie ne fait aucun cadeau aux élèves).
    A la 7ème rentrée on en finit presque par croire que c’est normal…

    Signaler
  5. Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

    Le plus drôle dans cette affaire, c’est que le CM du compte Twitter de la ville semblait découvrir, hier, le “trafic de ramettes” pourtant habituel à chaque rentrée : https://twitter.com/marseille/status/904978920126246913

    Aucun doute, de haut en bas, la ville est gérée.

    Signaler
  6. LaPlaine _ LaPlaine _

    L’incompétence et le je m’en-foutisme généralisés se font jour un peu dans tous les domaines, cette ville est en faillite politique et financière.

    Signaler
  7. Happy Happy

    Le “trafic de ramettes” s’est tellement banalisé que les palettes de ramettes sont exposées bien en évidence au rayon des fournitures de rentrée au Monoprix Canebière. C’est sûr que vendues à l’unité en grande surface, la marge commerciale doit être plus intéressante que pour une commande centralisée… par la mairie par exemple. En plus de la question de qui prend en charge le coût des fournitures, on devrait aussi poser la question de leur coût global, forcément plus élevé sans achat centralisé.

    Signaler
  8. Tarama Tarama

    Ah ben je suis bien intégré. Je ne suis même plus choqué des fournitures à fournir (trois rouleau de sopalin ici).
    Et 30€ pour la coopérative scolaire.

    Signaler
  9. Tarama Tarama

    Quant à la dame du Snuipppmachin qui dit que ce n’est pas systématique… LoL

    Signaler
    • neomars neomars

      C’est des marges qui prennent toute la page A4.

      Signaler
  10. MaryAA MaryAA

    Je viens de LImoges … je suis enseignante .. et je demandais aussi aux enfants du matériel scolaire et des mouchoirs en papier .. les enfants ne font absolument pas attention aux feutres , gaspillent les mouchoirs en papier … Bien sûr , il faut les éduquer à plus de respect pour le matériel … Mais effectivement , les manuels scolaires sont coûteux … Les feutres Weleda pour le tableau et des ramettes de papier ..je les achetais sur mes deniers personnels ..

    Signaler

Vous avez un compte ?

Mot de passe oublié ?


Ajouter un compte Facebook ?


Nouveau sur Marsactu ?

S'inscrire