Délogée par un péril, l’association Destination familles désespère de retrouver Noailles

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le 1 Fév 2024
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L'immeuble du 43, rue d'Aubagne est frappé d'un nouvel arrêté de péril, cette fois-ci en urgence. Poussée dehors depuis avril du fait de l'insécurité des lieux, l'association qui sert de centre social peine à obtenir des réponses concrètes sur son retour au cœur du quartier.

Les locaux de Destination familles sont frappés d
Les locaux de Destination familles sont frappés d'arrêté de péril imminent depuis décembre. Photo : B.G.

Les locaux de Destination familles sont frappés d'arrêté de péril imminent depuis décembre. Photo : B.G.

Tous les Marseillais qui fréquentent Noailles connaissent cette adresse discrète du milieu de la rue d’Aubagne. Au numéro 43, très tôt le matin, les habitants du quartier attendaient patiemment que les salariés de l’association ouvrent le rideau de Destination Familles. Depuis 16 ans, l’association joue le rôle de centre social dans un quartier populaire qui en est toujours dépourvu. Mais, depuis de longs mois, le rideau n’a pas bougé et les habitants, en attente d’un conseil, d’un coup de main ou d’une écoute, ont été priés d’aller voir ailleurs. Le mal qui touche l’association est banalement commun : le quartier est même devenu le symbole de cet habitat indigne qui ronge les murs et fragilise les plafonds.

En avril dernier, les salariés de l’association soutenus par les nombreux bénévoles ont fait valoir leur droit de retrait, estimant ne plus être en sécurité du fait des infiltrations d’eau et d’un réseau électrique chancelant. À l’époque, un arrêté de péril donnait sept mois aux propriétaires de mettre fin aux nombreux désordres.

Parmi ceux-ci, en première ligne, la Ville de Marseille, propriétaire du local en rez-de-chaussée et soutien financier de l’association. “Le problème est que nous sommes un copropriétaire minoritaire, constate Patrick Amico, adjoint délégué au logement. Nous sommes dépendants de l’autre propriétaire qui, jusqu’à présent, s’est montré plutôt réticent à agir. Nous avons envisagé différents scénarios, dont des travaux d’office“. Mais pour l’heure, cette procédure de prise en main par la collectivité au nom de la sécurité n’a pas été activée.

Aggravation de l’état de l’immeuble

Cette absence d’action a des conséquences directes sur l’état du bâti. Patrick Amico a été contraint de prendre un second arrêté qui prescrit l’interdiction d’occupation sur le rez-de-chaussée et une partie du quatrième étage. “Risque imminent de rupture des ouvrages dégradés et de chute de matériau sur les personnes“, peut-on lire dans l’arrêté de mise en sécurité du 21 décembre dernier. Cette fois-ci, l’adjoint a eu recours à la procédure d’urgence et donné sept jours aux copropriétaires – et donc pour partie à lui-même – pour qu’ils mettent fin à la situation de danger. Pour l’heure, rien n’a été fait. Même si, en coulisses, les choses commencent à lentement bouger.

Le propriétaire souhaite vendre son patrimoine à la Ville. Il n’a pas les moyens pour faire face à des travaux qui pourraient être importants.

Le gestionnaire, Citya

Ce lundi, les copropriétaires avaient rendez-vous avec un bureau d’études techniques pour une visite sur les lieux. Le propriétaire principal, Ytro Trabelsi, ayant apuré une partie de sa dette des charges locatives, le syndic peut commencer à faire évoluer le dossier. “Je suis en attente du rapport de visite, précise le gestionnaire pour le compte du cabinet Citya. Dès qu’on a leur retour, nous serons en position pour lancer les travaux“. Pour lui, le propriétaire principal ne fait pas obstacle à la sortie du péril. “Il souhaite vendre son patrimoine à la Ville, relate le gestionnaire. Il est plutôt coopératif, mais il n’a pas les moyens pour faire face à des travaux qui pourraient être importants. Et il manque d’accompagnement”.

Gérant de plusieurs SCI pour plusieurs hôtels meublés,Ytro Trabelsi n’a pas souhaité répondre à nos questions quand nous l’avons rencontré sur son lieu de travail. “Rien ne m’oblige à coopérer avec vous. Je ne vous demande pas où vous dormez et dans quel état est votre chambre”, répond-il, derrière le comptoir de sa bijouterie, spécialisée dans le rachat d’or. En plus des deux arrêtés de péril qui frappent son bien, le propriétaire a été destinataire, en juin dernier, d’un arrêté d’insalubrité signé par le préfet, concernant deux appartements du premier étage. Il impose le relogement d’un des occupants et prononce l’interdiction définitive d’habiter pour son logis. Marsactu n’a pas pu vérifier sur place si le propriétaire avait appliqué l’arrêté préfectoral.

Une activité éclatée

En attendant que les arrêtés soient suivis de travaux, les salariés de Destination familles désespèrent de retrouver la rue d’Aubagne. Depuis l’automne, l’association a installé ses bureaux au premier étage du 52, la Canebière. Les usagers de l’association sont contraints de prendre rendez-vous par téléphone. Et même si les locaux sont spacieux et lumineux, ils n’offrent pas les mêmes avantages de centralité que la rue d’Aubagne.

Il est certain que cela nous impose de revoir notre façon de fonctionner. Avant, il y avait plus de circulation entre les différentes fonctions que remplit l’association, plus de fluidité dans le travail.

Nadine Ughetto, présidente de l’association

Les autres activités de l’association sont éclatées sur trois autres sites : le soutien scolaire et les animations ont lieu rue Jean-Roque. Le centre aéré se passe sur l’école Chabanon et l’accompagnement des ménages bénéficiaires d’une aide alimentaire sur un troisième site. “Il est certain que cela nous impose de revoir notre façon de fonctionner, constate Nadine Ughetto, la présidente de l’association. Avant, il y avait plus de circulation entre les différentes fonctions que remplit l’association, plus de fluidité dans le travail. C’est dommage parce que nous sommes labellisés Espace de vie sociale par la Caisse d’allocations familiales et nous ne pouvons pas pleinement jouer ce rôle.

L’arrêté de péril leur permet au moins d’espérer une prise en charge totale de leur loyer, le temps que le péril soit résolu. Jusqu’à lors, la Ville prenait en charge la différence de loyer entre le local de la Canebière et le siège historique de la rue d’Aubagne. “Mais il est surtout difficile de se projeter sans certitude sur une réintégration“, se désole la présidente. Avec l’étirement des délais, la construction du futur centre social de Noailles que le quartier attend depuis des lustres aura démarré avant que la grille de Destination familles rouvre rue d’Aubagne.

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