Der de der

Christian Estrosi s’y voit encore

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le 7 Déc 2015
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Avec 26,5% des voix au premier tour des élections régionales, Christian Estrosi (LR) est loin derrière les 40,5% de Marion Maréchal-Le Pen. Même si le candidat socialiste, Christophe Castaner (16,6%) a annoncé le retrait de ses listes, la tâche sera rude pour le dernier rempart contre l'extrême droite.

Au soir du premier tour des élections régionales, en 2015, Christian Estrosi fait face à la presse.
Au soir du premier tour des élections régionales, en 2015, Christian Estrosi fait face à la presse.

Au soir du premier tour des élections régionales, en 2015, Christian Estrosi fait face à la presse.

Christian Estrosi patiente depuis de longues minutes, micro en main, en attente d’un direct avec LCP. Derrière lui, quelques élus du parti Les Républicains font tapisserie, la mine tout a fait sombre. Soudain, le député et maire de Nice s’agace et apostrophe directement son staff : “Mais, bon sang, est-ce quelqu’un écoute le discours de Cambadelis ?”. Il a, dans l’oreillette, le direct de la chaîne télé où tout le monde se focalise sur la position à venir du premier secrétaire socialiste, Jean-Christophe Cambadelis. Après avoir fait valider par le bureau national sa position déjà ficelée du barrage au front, il va demander quelques minutes plus tard le retrait des listes socialistes arrivées en troisième position.

Aussitôt son visage s’éclaire. Peu à peu, alors que le direct démarre, l’arrière-plan s’étoffe. La plupart des candidats LR et UDI rejoignent leur leader. Ils ont l’air enfin soulagé. Dans son discours, on retrouve les premiers éléments de langage du candidat républicain qui, seul, affrontera Marion Maréchal-Le Pen, loin devant avec 41%. Il n’a que sept jours pour faire un retard de près de 13 points et séduire les électeurs de gauche qui se sont portés sur les listes de Christophe Castaner et de la Région coopérative. Jamais les sondages ne l’avaient prédit aussi bas. Jamais ils n’avaient vu son adversaire aussi haut. Le coup est rude pour celui qu’on imaginait au pire, au coude à coude.

Le candidat socialiste qui espérait perpétuer un règne de dix-huit ans de gauche à la tête de la région s’est en effet résigné au terme de la soirée à déserter l’hémicycle de la porte d’Aix. La décision ne faisait pas l’unanimité dans ses rangs et Castaner lui-même s’était employé pendant la campagne à peindre Estrosi en copie conforme du Front. Dans la soirée, il a tenu à échanger avec Sophie Camard et Jean-Marc Coppola, les chefs de file d’un mouvement rouge et vert réduit à sa portion congrue (6,15 %). L’hypothèse de “combattre dans l’arène” régionale selon les mots du président du MRC PACA Ladislas Polski était tentante mais irréaliste politiquement. Député socialiste en début de carrière, Castaner était dans une équation nationale au sein de laquelle et depuis longtemps, les voix de l’exécutif portaient bien davantage.

“Faire barrage au Front national”

L’ultime appel a finalement été lancé les yeux rougis : “Il nous faut, et c’est cela aussi être socialiste, avoir le sens des responsabilités. Avoir le sens des responsabilités, c’est se retirer, avec beaucoup d’émotion, avec beaucoup de peine. […] Je décide d’appeler solennellement ici le peuple de Provence Alpes Côte d’Azur à faire barrage au Front national.” 

Ce dernier discours sera-t-il suffisant pour convaincre les quelque 300 000 électeurs ayant voté pour lui de choisir Estrosi dimanche prochain ? Seul un report massif semble pouvoir permettre au maire de Nice de l’emporter. Après une fin de campagne où il tentait de recentrer son image, le candidat LR fait de la lutte contre le chômage son premier objectif de président de région : “Afin d’éviter qu’en premier lieu, les chefs d’entreprises choisissent de s’expatrier.” Il a en tête les nombreux patrons qui ont exprimé leurs inquiétudes à voir le FN l’emporter en Provence-Alpes-Côte-d’Azur.

Il a aussi une pensée pour “les droits des femmes pour lesquelles le général De Gaulle s’est battu et, après lui, une grande dame comme Simone Veil”. Il est le “candidat qui n’a pas la main qui tremble” et sans trembler il peut rétorquer à une journaliste qui l’interroge : “Le problème, c’est que les médias que vous représentez n’ont pas expliqué aux Français ce qu’il allait se passer pendant six ans à la tête de nos régions. On n’a pas fait de pédagogie. On n’a pas expliqué que le président d’une région n’allait pas chasser l’immigration, qu’il n’allait régler les problèmes d’insécurité. C’est lui qui par contre pouvait faire baisser le taux de chômage.” Pourtant, une semaine après les attentats de Paris, il était le premier à annoncer 250 millions d’investissements sur six ans pour faire de la région un “bouclier sécuritaire”.

Muselier convoque l’esprit de la Résistance

Ce candidat qui ne tremble pas serre les dents. La tension a beau laissé place à une once de soulagement, “cela va être très compliqué”, lâche Arlette Fructus, secrétaire départemental UDI et candidate derrière lui. “Les carottes sont cuites… même si on va tout faire pour y arriver”, lâche un autre candidat, habitué des calculs électoraux. Car même en pariant sur un sursaut républicain “des abstentionnistes et des électeurs qui ont fait d’autres choix”, le chemin de la victoire est étroit et tortueux. Tête de liste dans les Bouches-du-Rhône, Renaud Muselier rappelle les racines gaullistes du candidat Estrosi et la résistance qui mêlait les patriotes de droite, les socialistes et les communistes “contre les fascistes”.

Ce chemin difficile vers la victoire débute pour lui ce lundi à Vitrolles par une visite de terrain à Vitropole, pôle d’activités de la municipalité socialiste, jadis symbole du Front national aux affaires et qui a donné 46,6% des suffrages exprimés à Marion Maréchal Le Pen. À quelques kilomètres de là, Marignane du maire de droite Éric Le Dissès mettait le Front national en tête avec 57 % des voix.

Benoît Gilles et Jean-Marie Leforestier

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Commentaires

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  1. Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

    Un “dernier rempart contre l’extrême-droite” qui a beaucoup fait pour lui ressembler, et dont les thèmes de campagne successifs, presque toujours sans lien avec les compétences régionales, ressemblent plus à des virages en tête d’épingle qu’à des convictions… (http://www.lemonde.fr/elections-regionales-2015/article/2015/12/07/regionales-la-soiree-coup-de-massue-de-christian-estrosi-en-paca_4826025_4640869.html)

    Quand Sarkosi persiste dans le “ni-ni”, comment Estrozy, son meilleur représentant local, va-t-il démontrer à l’électorat de gauche qu’ici, il ne faut au contraire surtout pas de “ni-ni” ?

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  2. Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

    Michel Pezet et Jean Viard : « (…) nous espérons pour la force du débat démocratique que Christian Estrosi et ses amis se rappelleront qu’ils ont été élus avec nos voix. »(http://www.go-met.com/regionales-michel-pezet-jean-viard-lancent-tristesse-appel-voter-estrosi/)

    Dis donc, Christian, on te parle : comme tu n’auras plus aucun élu de gauche devant toi si tu diriges la région, que proposes-tu pour reconnaître la dette que tu auras envers l’électorat de gauche ?

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  3. Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

    “Nous nous en remettons aux valeurs du Conseil national de la Résistance.” Dixit Estrosi (http://www.laprovence.com/actu/politique-en-direct/3704283/estrosi-lr-sera-le-resistant-sur-ses-affiches.html), dont le maître à penser Sarkozy était plutôt enclin à défaire méthodiquement ce que ledit CNR avait construit : https://blogs.mediapart.fr/republicain/blog/191211/denis-kessler-il-sagit-de-defaire-methodiquement-le-programme-du-cnr

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  4. julijo julijo

    Oui, Estrosi s’y voit encore. On peut toujours rêver.
    Je ne comprends pas, ou plutôt je comprends trop bien…Hollande veut apparaître comme “le seul” ?? rempart contre le FN et donc le PS national ordonne aux candidats de se retirer. C’est parait il républicain. Or on (le PS) nous serine quand même que ce sont les élections ré-gio-na-les et pas na-tio-na-les !! de quoi se mêle solférino ????
    Autre sujet d’étonnement pour moi : le choc prétendu de ces résultats…m’enfin!!!!! Combien d’élections précédentes nous ont amené à ce score ? Combien de baffes faut-il recevoir pour espérer comprendre que les citoyens ordinaires en ont marre….et changer d’attitude ?
    Bref, moi pour dimanche prochain…on a les candidats qu’on mérite…oui il faut faire barrage….à qui ??? pour l’instant, dimanche j’ai piscine.

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  5. leravidemilo leravidemilo

    Déjà, la semaine dernière était à la limite du soutenable : on a entendu un premier ministre de “goche” (forcement de “goche”) féliciter un président du medef d’avoir dénoncé la tantine LePen de nous mitonner un programme économique d’extrème gauche ??!?!!? Cette semaine commence à peine que l’on voit Estrosi invoquer la résistance, s’en remettre “aux valeurs de la résistance”, s’auto intituler résistant (“nous avons travaillé toute la nuit pour en arriver à ce mot”…que n’a t il plutôt dormi, parait que ça porte conseil…). Que n’a t il pas potassé le programme du C.N.R, celui que Sarkozy, et le gouvernement dont faisait parti le motodidacte, s’est évertué à “détricoter” comme son copain Denis Kessler (vice président du medef) en a fait l’aveu tardif. … Les semaines à venir m’inquiètent au plus haut point; sont vraiment déchainés! Comment quelqu’un de si sensé que Pezet peut il penser qu’ils se rappellerons par qui ils ont été élus ! Ils ne voient rien venir, ne se rappellent de rien, sont en pleine bouffées délirantes, totalement déstabilisés par un évènement pourtant prévisible, qu’on a eu tout le temps de voir venir, et qui, pour l’essentiel, est le résultat de leurs propres actions, de leur politique, U.E, B.C.E, troîka, négation de la souveraineté populaire…. se rappellent même pas de 2005, et voudrais nous renvoyer en 43, 44, 45… On ne peut même pas compter sur un minimun de décence de leur part. Non content de nous pourrir l’existence continument et méticuleusement, sont même pas foutu de laisser dormir les morts, Henri Rol Tanguy, Jean Moulin, De Gaulle, Charlotte Delbos, Casanova… ne les commettez pas dans vos plans com, … foutez leur la paix!

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  6. barbapapa barbapapa

    1 petite faute à corriger ici “Il a en tête les nombreux patrons qui ont exprimé leurs inquiétudes à voir le FN l’emportait en Provence-Alpes-Côte-d’Azur.”

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