Christian Estrosi et Maud Fontenoy recrutent un ancien du FN
En février, un ancien candidat sur les listes FN aux municipales de Nice est devenu chargé de mission à la région. Il épaulera Maud Fontenoy à la délégation au développement durable. Loin des engagements de Christian Estrosi contre le "recyclage" de frontistes ? L'entourage du président explique que la règle ne s'applique pas à un simple ex-"militant du FN".
Christian Estrosi et Maud Fontenoy recrutent un ancien du FN
C’était l’ultime question de voeux à la presse à rallonge, les premiers de sa mandature de président de région. Nous avions interrogé Christian Estrosi sur la possibilité ou non de “recycler des élus FN au sein de la droite républicaine” durant son mandat. Quelques semaines après sa victoire, le “résistant” du second tour, rempart contre l’extrême-droite, brandissait toujours la croix de Lorraine (pour les curieux, le son est ici) :
“Que les choses soient claires, ma réponse tient en un mot, c’est non ! De près ou de loin. De près ou de loin. À partir du moment où un jour, quelqu’un a décidé de franchir cette ligne, ça ne correspond pas aux idées que je me fais des valeurs de la République, ça ne correspond pas aux valeurs morales qui sont les miennes et donc, les allers-retours dans ce domaine ne sont pas possible et je ne les accepterai jamais.”
Quelques mois plus tard, Christian Estrosi et sa vice-présidente au développement durable, la médiatique rameuse Maud Fontenoy viennent pourtant de recruter un ancien du Front national. Romain Cardelli est officiellement “chargé de mission” auprès de la vice-présidente (et nouvelle salariée du très droitier hebdomadaire Valeurs actuelles) comme il l’affiche sur le réseau social Linkedin.
Candidat FN aux municipales à Nice
Le jeune homme de 25 ans n’est pourtant pas un novice en politique malgré son jeune âge. En 2014, il était même candidat aux municipales à… Nice, sur la liste Nice bleu Marine emmenée par l’eurodéputée Marie-Christine Arnautu. Il coordonne alors le “projet pour les jeunes” de la candidate opposée à Christian Estrosi. Au sein de l’équipe de campagne, il s’occupe aussi de développement durable comme l’explique sa chef de file de l’époque devant ses militants.
Douzième sur la liste, il ne sera pas élu puisque le huitième sera le dernier candidat à siéger à la mairie. Cela ne va pas empêcher le jeune homme de rebondir. Dès le mois de septembre, il va devenir employé de la mairie de Nice. Son recruteur ? L’ancien directeur de campagne pour les européennes de Jean-Marie Le Pen dans la grande région sud-est, Gaël Nofri. Celui-ci crée son propre groupe dissident du FN, celui des élus niçois indépendants (ENI). “Nous étions en désaccord avec Marie-Christine Arnautu notamment sur le rapprochement avec les identitaires niçois”, explique aujourd’hui Nofri, candidat aux dernières régionales sous les couleurs de Debout la France comme tête de liste dans les Alpes-maritimes. Militant FN, il critique sa chef de file et sera viré du parti au sein duquel Arnautu pèse. Dans une lettre ouverte au vitriol, il expose ses griefs et défend ses choix : “Aucun des collaborateurs qui participent [à l’action du groupe ENI] au quotidien n’est un ennemi de la cause patriote”, affirme-t-il.
Parfait dans le rôle du transfuge pendant les régionales
Embauché en septembre 2014, Cardelli quittera le groupe peu avant d’annoncer son soutien à Christian Estrosi pour les régionales en juillet 2015 et d’adhérer aux Républicains. Il joue alors le rôle du parfait transfuge. Dans son communiqué d’annonce, le “patriote niçois” critique un parti “où s’agrègent Olivier Bettati, ardent critique du FN il y a encore un an et allié à des membres du PS, et Philippe Vardon, issu d’Unité radicale et cadre du Bloc Identitaire”. En octobre, il est interrogé par Libération : “Le FN de Marine Le Pen sortait du cadre. Elle faisait des constats qui me semblaient justes sur l’insécurité, la montée du communautarisme, la perte d’influence de la France au niveau international. J’ai pris ma carte en 2012. Avec le recul, c’est surtout celui qui parlait le plus fort qui a eu le plus d’écho en moi”, se défend-il. Libé explique que “trop de complaisance avec la gauche, c’est ce qui a fait fuir Romain Cardelli du Front national”.
Aujourd’hui récompensé pour son engagement, Romain Cardelli ne semble pas gêné par le discours d’ouverture aux citoyens de gauche servi à l’occasion par Christian Estrosi qui sait que sans ces électeurs, Marion Maréchal-Le Pen siègerait aujourd’hui à sa place. À une opposante à la loi travail du gouvernement, il revendique même sur Twitter “aimer son travail”. Mais nous n’en saurons pas plus puisqu’il n’a pas donné suite à notre demande d’interview.
.@carolinedehaas cette semaine j'ai été heureux de ne pas compter mes heures. Quelqu'un qui aime son travail, c'est un aliéné? #OPNC
— Romain Cardelli (@RomainCardelli) April 9, 2016
Face à ce qui ressemble à un recasage en règle, Anthony Borré, le directeur de cabinet de Christian Estrosi et habituel porte-parole du président de région comme du maire de Nice, balaie nos questions : “
“ Tout son parcours montre pourtant que Romain Cardelli n’était pas un simple colleur d’affiches du Front.Son arrivée vient souligner la porosité toujours existante entre la droite et l’extrême-droite en PACA. “Il ne faut pas s’attacher aux étiquettes. Il y a beaucoup de militants et de sympathisants qui ont fait le chemin de la droite vers l’extrême-droite et après, ils font le chemin dans l’autre sens, c’est logique”, lâche Gaël Nofri qui se définit aujourd’hui comme “divers droite”.
Dans les couloirs de la région, un conseiller régional FN à qui nous demandons de réagir refuse de s’exprimer officiellement sur le sujet. Mais il lâche, amusé : “C’est le même Christian Estrosi qui avait proposé en 1998 à Jean-Marie Le Pen de mettre Jean-Marie Le Chevallier [ex maire FN de Toulon, ndlr] président et lui, premier vice-président donc ça ne me surprend pas.” Si la remarque est facile pour les pourfendeurs de l’“UMPS”, elle vient en tout cas souligner qu’à la région aussi, il n’y a pas de résistance sans tensions.
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Pas très enthousiasmant de suivre l’actualité politique. Après la main tendue à la gauche pour qu’elle vote pour lui face au FN, lorsqu’on voit comment Estrosi s’entoure, on est catastrophé.
De son côté, le PS n’a pas voulu participer à l’exécutif métropolitain, après qu’il ait aussi boycotté la conférence régionale d’Estrosi, une instance consultative dont le PS avait pourtant souhaité la mise en place.
Chaque coq se retrouve donc sur son tas de fumier avec ses poules bien à lui. Parfois d’ailleurs, le coq est une poule (le PS hors Marseille et dans Marseille). Avec Joissains à Aix, c’est un peu pareil. On est finalement face à une parité à laquelle on ne s’attendait pas.
Le PS est en retrait, il n’affronte pas. Il a de belles revendications sociales et des prises de position à formuler, il va élaborer des programmes et des alternatives, avec les écologistes peut-être, sans s’interroger sur leur faisabilité. Sans savoir que le monde est différent de ce qu’il pense et que c’est de là qu’il faut partir. La gauche a peur de se coltiner à cette réalité. Mélenchon et le Front de gauche ont été une valeur refuge, tandis que le gouvernement se coltinait une réalité sur laquelle les penseurs du PS n’avaient pas travaillé. Tourner manège, on recommence.
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