Boulesteix : "Notre bataille pour la métropole, c'est l'élection au suffrage direct"

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le 21 Fév 2013
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Vous avez été l'un des premiers à rendre public l'avant-projet de loi sur la métropole. S'agit-il d'un mouton à cinq pattes?

Ce qu'il faut regarder en premier lieu, c'est ce que ce nouvel espace métropolitain existe dans ce texte. Cela correspond à la fois à ce que vivent les gens et aux nouvelles exigences de démocratie. Au point de blocage où nous sommes parvenus, il y aurait pu ne pas avoir de métropole du tout. C'est un acquis. Je ne sais pas s'il s'agit d'un mouton à cinq pattes, mais cela relève d'un fonctionnement pour le moins bizarroïde. Et sur le plan démocratique, c'est une vraie usine à gaz.

Vous voulez parler des échelons intermédiaires que sont les conseils de territoire ?

Effectivement. Même si le texte laisse la possibilité de renégocier le périmètre de ces territoires, lors de sa dernière visite à Marseille, Marylise Lebranchu a clairement laissé entendre que le périmètre de ces conseils de territoire serait celui des intercommunalités actuelles. Or, elles n'existent que depuis dix ans et n'ont pas acquis une vraie légitimité aux yeux des citoyens. En réalité, la création de ces conseils de territoire correspond à une simple convenance politique. Parmi ces intercommunalités, il y en a une qui ne compte que trois communes et 60 000 habitants [le pays de Martigues, ndlr] tandis que la communauté urbaine de Marseille en compte 18 pour 1 million d'habitants. On trouve également d'autres anomalies : Saint-Martin-de-Crau est la plateforme logistique du port de Fos mais la commune ne fait ni partie d'Ouest Provence, ni de la métropole. Il faudrait pouvoir discuter avec tout le monde de cette question des territoires pertinents plutôt que de repartir dans ce système des intercommunalités. Ce n'est pas comme ça que l'on peut apporter des solutions aux problèmes concrets. 

Le flou persiste également sur les relations avec le Département…

On sent bien qu'il s'agit de concessions qui ont été faites des deux côtés pour des raisons politiques. Alors qu'à Lyon, le problème a été tranché. Les gens qui réfléchissent là dessus à l'échelle du territoire distingue deux types de départements : les départements ruraux où le conseil général joue un rôle très important sur le plan de l'égalité du territoire et de l'accès au service public et les départements urbains où il a un rôle tout autre. Je ne sais pas s'il fallait faire un Département métropolitain ou une métropole départementale mais il fallait trancher la question. Celle-ci persiste également à l'échelon régional dans le partage des compétences. Et c'est la même chose sur le rôle des maires. Je pensais que la métropole pouvait permettre de reconnaître le rôle des maires en redonnant des compétences à cet échelon essentiel de la vie démocratique. 

Votre principal grief porte sur la question démocratique et le mode électoral. Sur ce point, le texte de loi ne dit rien…

Visiblement, cela sera l'objet d'un autre texte de loi. Là où je suis un tout petit rassuré, c'est sur le dispositif de fléchage qui devrait se mettre en place lors des élections municipales. Ce n'est pas un mode de suffrage direct mais ce n'est pas non plus totalement indirect. Ce n'est plus un simple jeu d'élus qui se choisissent entre eux. En revanche, cela ne permet pas de faire émerger un vrai programme avec un risque politique. Il faut arrêter de penser qu'un élu peut avoir plusieurs jobs en même temps. C'est aussi pour cette raison que je suis opposé au cumul des mandats. Il ne faut pas craindre le conflit d'intérêts entre les élus de différents échelons. Il faut que ces conflits soient maîtrisés, débattus publiquement et non pas marchandés sans contrôle démocratique. Or, c'est ce qui se passe aujourd'hui à la communauté urbaine de Marseille comme à la communauté du pays d'Aix. Finalement, l'intercommunalité la plus avancée sur ce point est Ouest Provence grâce à l'antériorité historique du San [Syndicat d'agglomération nouvelle créé dans les années 70]. Regardez les plans locaux d'urbanisme : sur les 2500 intercommunalités françaises, deux seulement ont fait le choix de faire un plan à l'échelle intercommunale. Or, le plan local d'urbanisme cristallise bien le pouvoir des maires et, dans le sud, il donne du grain à moudre aux associations anti-corruption.

Sur quoi allez-vous mener bataille ?

Notre bataille immédiate pour la métropole, c'est le suffrage direct. Un certain nombre de maires et de grands élus en France souhaitent ouvrir ce débat. La semaine dernière, à Nantes, se tenaient les rencontres nationales des conseils de développement. Les 150 conseils de développement présents se sont mis d'accord pour porter deux demandes : que nous soyons reconnus par la loi avec un vrai rôle d'évaluation des politiques publiques et que les conseillers métropolitains de Lyon et Marseille soient élus au suffrage direct. 

Mais certains craignent que ces élections métropolitaines deviennent le lieu d'une nouvelle bataille idéologique où les partis prendraient le pas sur le territoire. N'est-ce pas votre cas ?

Je crois qu'il ne faut jamais avoir peur du suffrage universel. C'est la base de notre système démocratique. Ensuite, je ne suis pas favorable à des listes uniques sur l'ensemble de la métropole où Jean-Claude Gaudin serait sur la même liste que Maryse Joissains et Eugène Caselli à côté de René Raimondi. Il faut garder un système électoral qui parte des territoires mais encore faut-il que ceux-ci soient cohérents. Nous nous battrons pour que le débat sur le suffrage direct ait lieu au parlement. Mais je ne sais pas si on a une chance de gagner cette bataille.

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Commentaires

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  1. savon de Marseille savon de Marseille

    J’ai quand-même sorti ma calculette !

    Etats Unis : 315 millions d’habitants ….. 100 sénateurs
    France : 64 millions d’ habitants …. 348 sénateurs.

    Donc ..Métropole AMP ….. 1,9 millions d’habitants en 2016 : 1 conseil de Métropole + 1 conseil des territoires + 1 conseil des Maires
    TOTAL : 117 Maires + 112 vices Présidents ????

    + Conseil Régional …
    + Conseil Général …

    Ma calculette explose. C’est hallucinant.

    Il fallait à mon sens la méthode violente : dissolution des EPCI , de MPM et du CG avec mise sous tutelle pour les transports et ce , pendant 2 ans, élection cet l’été d’un conseil Métropolitain de 20 membres au suffrage Universel dans le 13.

    L’ Etat est devenu un ventre mou, complètement pétrifié dans ses propres technostructures toxiques.

    Complètement incapable de jouer la simplification et l’accélération Quitte à défaire des carrières.

    Vous pouvez oublier par exemple la L2 pour 2015.

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  2. jdeharme jdeharme

    Pour vous et moi les mesures c’est tout de suite pour les élus c’est toujours plus tard d’ici 2017 ils trouveront une bonne raison pour encore décaler le non cumul. Pas de révolution , pas de changement

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  3. Démocrite Démocrite

    Superbe prise de position. Ce Monsieur a raison.
    Il faut que l’élection au suffrage directe permette ENFIN l’émergence de programmes politiques à l’échelle du territoire métropolitain.
    Les Maires ont assez bloqué jusqu’à présent et notre vie quotidienne est invivable pour nous, les jeunes, qui ramons comme des malheureux pour nous déplacer et trouver un boulot intéressant.

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  4. MG MG

    Mauvais calcul @savon de marseille !! Pour les USA tu oublies de compter les parlements de chaque état fédéré, ce qui fait du coup une proportion comparable à celle de la France…
    Dissoudre les EPCI ??? Pour concentrer tout le pouvoir et tout le fric dans les mains des seuls marseillais ????? Meme le gouvernement n’est pas stupide à ce point-là !!! On a vu la gestion marseillaise depuis 50 piges, on n’a pas envie de l’étendre au reste de la région…

    En outre, comparer notre espace métropolitain aux autres métropoles françaises est une grossière erreur : là où les métropoles sont le plus souvent organisées autour d’une ville-centre indiscutable (Paris, Lyon, Lille, Nantes, Toulouse, Bordeaux, Montpellier…) notre espace métropolitain est le SEUL en France à être à ce point éclaté : aucune centralité digne de ce nom ne permet d’y organiser l’espace sur le modèle français traditionnellement jacobin, et il faut donc inventer un modèle multipolaire qui préserve la proximité entre les citoyens et leurs élus; ce projet publié ne m’emballe pas, mais il me paraît une avancée notable…

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  5. athe athe

    Il y en a qui vivent vraiment dans le déni de réalité le plus total. La Ville-centre (la métropole) c’est tout simplement Marseille. Cela peut plaire, ou pas – c’est juste un constat. Il suffit de comparer la situation de toutes ces communes avec celles des communes du Vaucluse p.ex. pour comprendre qu’elles profitent toutes d’une façon ou d’une autre de la proximité de Marseille. Sur le plan économique et social, la métropole est un état de fait; ce n’est pas plus compliqué que cela.
    Ceux par contre, qui auraient vu par hasard le dernier ouvrage de propagande de Mme Joissains Masini (“la métamorphose d’une ville” – 74 pages au frais des contribuables du Pays d’Aix), comprennent un peu mieux que nos amis Aixois vivent dans un monde parallèle.
    Le TGV Méditerranée, MP2013, l’université, ITER, c’est évidemment grâce à elle, grâce à Aix. Bientôt Aix(!) sera directement reliée à Londres – j’imagine Londres attend avec impatience. De toute façon, si on suit ces 74 pages consacrées entièrement à l’œuvre de la mairesse (en plus on a droit à des photos de Madame au sommet de sa gloire, légèrement retravaillées dans le style d’un Gerhard Richter), c’est Paris, Londres, Aix… puis plus rien.
    Bref tout cela pour comprendre un peu mieux le monde dans lequel vivent non voisins. Aix c’est certainement une ville à part, une vraie ville au sens économique et politique du terme – et la seule, mais vraiment la seule, sur le futur territoire de la métropole – avec une identité à part. Mais une ville (riche et chic) de banlieue.
    Sans Marseille, il n’y aurait ni aéroport, ni TGV, ni port, ni les infrastructures, ni les services… et Aix serait une charmante bourgade provençale, avec son marché provençale et son festival lyrique une fois par an, et plein, plein, plein de résidences secondaires autour – et rien d’autre.

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  6. Manipulite Manipulite

    Ouest-Provence l’inteco la plus aboutie ? Son président est condamné pour corruption ! Bonjour l’exemple de M. Boulestex !
    Il faut juste reconnaître que Marseille n’est pas une ville gérée avec un minimum d’efficacité. Elle est répulsive et ne donne pas envie de s’allier avec elle. Et ce n’est pas une question de richesse ou de pauvreté.
    La ville centre, et ce ne peut être que Marseille, aurait dû commencer par être légitime dans son rôle de fédérateur de la Métropole. Or cette ville violente, sale, gangrenée par le clentélisme politico-syndical n’est guère attractive. Sans parler de la “menace Tapie” qui se profile !

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  7. M34 M34

    Il faut tout remettre à plat : la dimension de nos territoires et le nombre d’élus
    trop de communes de moins de 1 500 habitants
    des départements trop serrés car ils ne correspondent pas à des territoires économiques
    des régions qui ne sont pas à l’échelle européenne

    dans le meme temps on ne peut nier Marseille- ce n’est pas grace à Avignon ou Aix qu’il y a un développement portuaire, ces villes ont d’autres qualités mais pas celle de ville phare

    en permanence Lyon est cité en exemple mais “ils nous ont mis 30 ans dans la vue” et nous persistons à ne pas vouloir comprendre

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  8. Tresorier Tresorier

    Nous sommes revenus a la republique des roitelets locaux de la IIIeme republique ….. Quelle vjsion d’ensemble et d’avenir attendre de ces incapables, omnibules par leurs prebendes et indemniteS, interesses seulement par la defensede leurs clienteles electorales…..

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  9. Tresorier Tresorier

    Parceque vous trouvez les elus capables ??

    Vous trouvez la situation si excellente et allant dans le bon sens qu’il faut continuer la meme politique ???
    Nous avons les elus que nous meritons. S’ils usent voire abusent des lois, ils n’en sont pas condamnables. C’est nous les coupables !!

    Il faut au contraire changer les lois, nos exigences envers nous memes et nos elus. Nous ne sommes pas condamnes a avoir toujours des elus aussi nuls.

    Mais vos propos semblent au contraire normale la situation actuelle, ce qui ne permettra evidemment pas de changer le foutoir actuel. C’est vrai qu’on s’habitue a tout…..

    C’est votre cas. Heureusement, ce n’est pas le cas de tout. Permettez donc d’etre plus exigeant que vous….

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