UNE ÉCOLOGIE URBAINE MARSEILLAISE

Le retard écologique de la métropole

Partons d’un constat : pour toutes sortes de raisons dans l’histoire de la ville, Marseille connaît un retard considérable dans le domaine de l’écologie par rapport à d’autres villes, et c’est ce retard auquel il importe de mettre fin. À cet égard, c’est d’abord dans l’architecture des années soixante et soixante-dix, notamment dans les cités, que se situe le retard écologique de la métropole. D’abord, ce retard dans la politique écologique tient à une absence de considération pour l’écologie dans la culture politique des pouvoirs municipaux et métropolitains de Gaston Defferre, Jean.-Claude Gaudin ou Martine Vassal. Il ne s’agit même pas d’orientation politique, mais d’une culture politique qui ignore l’écologie. Par ailleurs, ce retard dans le domaine des politiques écologiques tient à une urbanisation mal pensée : la métropole a connu une densification mal régulée, la politique des transports a privilégié la voiture particulière, la politique du logement a donné naissance à de nombreuses « cités » ignorant les impératifs d’une véritable approche écologique de l’habitation.

Une écologie politique de l’espace urbain

Une écologie politique de l’espace urbain consiste à penser la ville comme un espace social écologique, conscient de son environnement et des nécessités de son énergie. Il s’agit, d’abord, d’un mode de rationalité politique. À Marseille, il s’agit de tenir compte d’impératifs écologiques comme la régulation des transports et de la circulation ou une politique du logement tenant compte de normes écologiques dans le domaine de l’énergie ou dans celui du chauffage. Par ailleurs, il s’agit d’élaborer un projet politique fondé sur une rationalité écologique. Cela consiste, par exemple, dans un projet politique ne se fondant pas sur des impératifs électoralistes ou sur une économie municipale libérale, mais sur la prise en compte d’un logement et d’un paysage urbain tenant compte des nécessités environnementales. D’autre part, une écologie politique de l’espace urbain comporte une dimension esthétique : il s’agit d’aménager des paysages. La ville ne doit plus se penser seulement comme une accumulation d’immeubles de logement, mais elle construit un paysage à regarder et dans lequel on puisse avoir du plaisir à se déplacer. De même, l’écologie urbaine marseillaise doit se fonder sur une action plus active des pouvoirs municipaux et métropolitains décidée à imposer une approche écologique des implantations d’entreprises dans l’espace urbain. Enfin, une écologie politique de l’espace urbain consiste à penser une ville écologique pour le présent et, en même temps, à l’imaginer pour le futur. L’écologie urbaine pense la ville dans le temps long et ne se réduit pas à un soi-disant confort des habitants dans le temps court.

Qu’est-ce qu’une écologie urbaine ?

Une écologie urbaine est une façon écologique de penser l’aménagement de l’espace urbain. Une telle écologie se pense, en particulier, dans trois domaines : l’habitation et le logement, les transports et les déplacements, l’aménagement écologique des nouveaux quartiers et la réhabilitation écologique de quartiers anciens. Dans le domaine du logement, il s’agit d’une articulation écologique entre l’habitation et l’espace urbain : l’écologie urbaine est une médiation, c’est-à-dire une articulation entre les besoins singuliers de l’habitat individuel et les logiques collectives de l’aménagement urbain. Dans le domaine du transport et des déplacements, il s’agit de reconnaître l’importance des modes collectifs de transport et de libérer la ville et l’espace de la métropole de la contrainte de la voiture particulière et des pollutions environnementales et sonores qui l’accompagnent. Dans le domaine de l’aménagement des quartiers, l’écologie urbaine consiste à prendre en considération les normes écologiques dans les exigences de l’urbanisation et à réhabiliter les quartiers anciens de manière à les rendre de nouveau habitables et à réhabiliter les paysages urbains classiques de la ville. À Marseille plus peut-être que dans d’autres villes, l’écologie urbaine est aussi une politique sociale : en effet, c’est par la politique écologique que la politique de la ville peut manifester un projet d’égalité, à la fois dans les politiques d’aménagement, dans les politiques de transports et de déplacements et dans les politiques environnementales (politique climatique, prévention des pollutions, aménagement des espaces publics).

Les urgences écologiques à Marseille

La politique écologique marseillaise ne se situe pas seulement dans le temps long : il s’agit aussi de répondre à des urgences. La première de ces urgences se situe dans le logement. Les immeubles anciens sont dégradés et il importe de profiter de leur réhabilitation pour prendre en considération les impératifs d’une urbanisation écologique. L’urgence consiste dans une politique du logement qui ne détruise pas les anciens immeubles, mais qui les réhabilite en les insérant dans des paysages urbains habitables, notamment dans les quartiers du centre. Une autre urgence écologique se situe dans les déplacements. Sans attendre l’élaboration d’un véritable plan de circulation répondant aux impératifs de l’écologie, deux urgences s’imposent à la politique marseillaise de l’écologie. La première est le développement des transports en commun susceptibles de mettre pleinement fin aux excès et aux nuisances de la voiture particulière. L’autre urgence est de développer la piétonnisation des rues du centre, mais aussi de développer les accès aux périphéries par les transports en commun et les modes de circulation écologiques comme le vélo. Une urgence écologique particulière se situe dans le climat. La ville et la métropole doivent inscrire les impératifs liés au climat dans la politique écologique de la ville. C’est ainsi, en particulier que la politique de l’écologie urbaine consiste à élaborer des projets de développement énergétique propres à éviter le réchauffement excessif et à penser des politiques urbaines de logement recherchant des usages de modes propres d’énergie, à éviter la dégradation de l’environnement et du climat. Enfin, il importe d’associer politique sociale et politique écologique dans la recherche d’une politique de solidarité du centre articulée aux impératifs écologiques. En effet, une véritable politique écologique du logement est aussi une politique sociale, qui recherche à la fois une véritable égalité et une véritable solidarité dans les usages de l’habitation et en permettant à toutes les classes sociales de disposer d’aménagements écologiques des logements et des espaces publics comme les écoles.