RÉINVENTER LA VILLE
Les élections municipales ont lieu demain et le coronavirus aujourd’hui
RÉINVENTER LA VILLE
Comme toutes les villes de France, Marseille vit dans l’attente de la désignation d’une nouvelle municipalité, et, comme peut-être toutes les villes du monde, elle vit, aujourd’hui, dans la confrontation à une crise sanitaire, celle du coronavirus. Peut-être faudrait-il rapprocher ces deux événements pour réinventer la ville, pour repenser l’identité marseillaise.
Comme souvent dans l’histoire, un événement n’a pas de sens en soi, de façon isolée : c’est sa confrontation à d’autres événements qui lui donne sa signification. C’est en rapprochant cet événement d’autres événements qui ont lieu dans le même temps ou d’autres événements comparables qui ont eu lieu avant lui, dans l’histoire, que l’on peut lui donner une signification. Il en va de même, aujourd’hui, à propos de Marseille. Si l’attente des élections municipales et de la désignation d’une nouvelle municipalité avait une signification, celle du bilan de la municipalité dirigée par J.-C. Gaudin et de l’élaboration de projets nouveaux pour la ville, son rapprochement avec la crise sanitaire du coronavirus construit une autre signification, celle de la recomposition d’une identité urbaine. Sans doute est-ce à cela que nous devons nous attacher, aujourd’hui.
Une nouvelle identité urbaine
Mais, d’abord, qu’est-ce qu’une identité urbaine ? Comme celle d’un pays, mais à une échelle plus réduite, l’identité d’une ville s’institue dans l’articulation d’un espace, d’une citoyenneté et d’un contrat social. L’espace, c’est l’espace urbain, l’espace de la ville, fait de constructions et d’aménagements, de circulation et de réseaux, d’activités et d’échanges, de formation et d’éducation. C’est autour de ces quatre instances que se construit l’identité de la ville et qu’il convient, par conséquent, d’imaginer ce que sera la nouvelle identité de la ville. Mais, aujourd’hui, à ces quatre dimensions vient s’en ajouter une autre, qui existait auparavant, mais qui n’exerçait pas sur l’espace de la ville la tension et la pression qu’elle impose aujourd’hui : la santé. L’identité urbaine, à Marseille comme ailleurs, est aussi faite d’une politique active de prévention sanitaire et de traitement des maladies. Mais, aujourd’hui, cette politique sanitaire qui contribue à construire l’identité de la ville s’inscrit dans ce que l’on peut appeler la contrainte de l’urgence. Si l’appartenance à la ville a un sens, c’est justement dans l’apport que nous pouvons en attendre pour répondre à l’urgence. Il est sans doute aberrant de parler de guerre comme l’a fait le président de la République, mais, en revanche, il y a lieu de parler d’urgence, d’un autre temps pour penser la politique municipale de la santé publique – y compris dans ses incidences sur le monde de l’école comme de nombreuses voix le rappellent autour de l’exigence que la ville contribue aussi à nourrir les enfants qui lui sont confiés.
Une nouvelle relation entre municipalité, citoyenneté et solidarité
C’est drie que cette nouvelle identité urbaine se fond aussi sur l’exigence de la solidarité. C’est que la solidarité fait partie de la citoyenneté. La citoyenneté se fonde, pour une grande part, sur ce que Rousseau appela, en son temps, le contrat social. La solidarité désigne la relation que la citoyenneté institue entre tous ceux qui, en habitant la ville, sont porteurs de la citoyenneté urbaine. La citoyenneté ne consiste pas seulement à aller voter tous les six ans pour désigner une municipalité, mais elle se fond aussi sur la relation aux autres que désigne le fait d’habiter la ville. Réinventer la ville, à l’occasion de cette rencontre entre l’élection municipale et la survenue du coronavirus, cela signifie aussi réinventer les formes et les institutions de la solidarité urbaine. Peut-être faudrait-il, ainsi, donner une signification nouvelle, pleine, à ce troisième mot de la devise de la République qui a tendance à être quelque peu négligé : Fraternité. Habiter la ville, nous le savons aujourd’hui mieux qu’à d’autres moments de l’histoire de Marseille, cela signifie aussi manifester cette solidarité avec les autres qui fonde la citoyenneté.
Un nouvel espace urbain
Mais, dans ces conditions c’est un nouvel espace urbain que nous devons imaginer, que nous devons construire, pour qu’il réponde à trois exigences. La première de ces exigences est la continuité de l’espace de la ville : il faut en finir avec les ruptures, avec les discontinuités, qui séparent les quartiers de la ville et empêche la solidarité et la citoyenneté de prendre leur place dans la politique de la ville. La deuxième exigence de ce nouvel espace urbain est la garantie que cet espace ne soit plus pollué et offre à ceux qui l’habitent un environnement vivable, et, en particulier, un environnement qui ne soit pas porteur de maladie ou qui ne vienne pas aggraver des maladies dont ils seraient porteurs. Enfin, dans cette nouvelle urbanité que la prochaine municipalité devra construire, la ville sera un espace pleinement politique, un espace qui ne sera pas livré aux promoteurs ni au marché de l’immobilier, un espace qui ne sera pas soumis à ceux qui le possèdent, mais qui sera aménagé et pensé par ceux qui l’habitent et pour eux.
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