Mes châteaux d’If : Jack Johnson. Le dernier debout.

Billet de blog
le 25 Mar 2024
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Mes châteaux d’If : Jack Johnson. Le dernier debout.
Mes châteaux d’If : Jack Johnson. Le dernier debout.

Mes châteaux d’If : Jack Johnson. Le dernier debout.

Jack Johnson, fils d’esclaves et champion du monde.

Le dernier debout.

Ce pourrait être le titre pour un papier sur le Carnaval de la Plaine ou celui d’un concours entre piliers de comptoir dans un des bars de la ville. Mais c’est pas ça du tout!!

Le Dernier Debout est un très bel album graphique autour d’un boxeur mythique mais pas mutique- il parlait même pendant les combats- : Jack Johnson. Boxeur noir qui brisa définitivement la Color Line en battant facilement le champion du monde poids lourds Jim Jeffries. Seule cette catégorie était interdite aux rencontres Blancs Noirs. En 1908, il brise déja cette règle à Sydney en écrasant Tommy Burns.

Johnson qui vécut dans une grande misère s’en sorti avec les poings. Il quitta Galveston où il naquit, en sautant dans un wagon direction Chicago faire fortune. ” Je savais que j’avais d’autres perspectives que le poisson pourri, le sel marin et la sueur des dockers“. Il y parvint. Et ouvrit même le fameux Cotton Club.

Avec un montage en rounds qui fait des allers retours entre passé et futur du match du siècle – il y en aura d’autres- Johnson racontera dans un spectacle qu’il créera plus tard les aléas du match et des morceau de son histoire. ” Il faudrait croire à la peau blanche comme d ‘autres croient à Jésus. Comme si la peau blanche pouvait encaisser un uppercut du gauche…” Ce match aura lieu le 4 juillet 1910 à Reno,Nevada devant 22000 personnes. Devant un public qui l’invective d’insultes racistes, Johnson, fidèle à sa persévérance à sortir de sa condition, va monter sur le ring et se dominer pour ne pas écraser son adversaire avant le seizième round. La boxe est un spectacle. ” On n’avait jamais vu une foule pareille dans toute l’histoire de la boxe

La poésie d’ Adrian Matejka au scénario, citant fréquemment Shakespeare, se confond avec le boxeur qui raconte: ” J’ai boxé partout et de toutes les manières: en bleu de travail dans des rues désertes et des terrains vagues. En costume trois pièces dans un wagon de marchandises et dans une cave, une main attachée dans le dos. Partout où un adversaire a levé les poings.

Plus on avance dans le livre, plus le dessin prend de la force, plus Youssef Daoudi grandit et son dessin semble se libérer, devenir puissant. Le choix du lettrage et des polices de caractères ( Maïté Verjux et Youssef Daoudi) est extrêmement réussi. Exclamations comme dans les Marvels, les mots résonnent et cognent dans un choix de police expressif. Les insultes du public de Reno contre Johnson, ” T’es un singe, ta mère est une guenon, retourne en Afrique à la nage...” montrent que dans le racisme ordinaire, rien n’a changé.  La barrière de couleur, ou Color line interdisait aux athlètes noirs de se mesurer avec leurs semblables noirs. Ces derniers risquaient de l’emporter. Jack Johnson va poursuivre Tommy Burns tout autour du monde mais celui refuse de le combattre. Il va le coucher en Australie mais la caméra va s’arrêter de tourner quand il sera KO;

Johnson est haï aussi car sa compagne est blanche. ” Je ne serais dire si les Blancs détestent plus ma peau ou mes succès.” Les couleurs du blanc, rouge et noir sont en écho aux trois couleurs de l’histoire.

Ceux qui aimaient encore Jack London; l’écrivain, vont apprendre à quel point il était raciste et convaincu de la supériorité de la race blanche. Il parle du combat en ces termes: ” Le singe et le tigre en nous exigent ce combat.” pour faire gagner la race blanche. Ils découvriront à l’inverse Arthur Cravan qui lui affronta pour un show d’exposition Jack Johnson en Espagne, plaza de Toros le 23 avril 1916, après que le champion fusse condamné en vertu de la loi Mann à Chicago et qu’il fuit en Europe.

Plus de trois cent pages de combat pour un ouvrage dont les prémisses étaient pour Matejka l’année 2005. L’attente fut longue comme un match en quinze rounds.

 

Au théâtre les Bernardines.

Autre histoire que celle de Maria Martinez, chanteuse cubaine noire, ressuscitée par l’écriture de Marie N Diaye et dont Blandine Savetier a tenté de faire une pièce. Le texte a vraiment du mal à nous intéresser malgré la diction parfaite de Natalie Dessay, dont la voix magnifique, même pliée dans un piano, ne trouve pas les expressions d’une première année de théâtre. Cette confusion entre Marie Sachs, sorte de réincarnation de  Marie Martinez souffle un flou très artistique. Un flou qu’on voudrait voir décoller mais qui retombe après chaque prestation dansée de Anne-Laure Ségla. Seule la danseuse et comédienne  semble incarner à merveille cette danseuse parachutée à Paris dans un rôle évoquant Joséphine Baker. Encensée par Théophile Gautier, poète aussi raciste qu’anti communard ( Des cages ouvertes s’élancent les hyènes de 93 et les gorilles de la Commune: Voir Tableaux du siège), l’artiste cubaine se démène à Paris mais reste considérée comme une bête de foire. Si le racisme colonial de 1850 est évoqué à grands recours d’articles de presse, on a du mal à supporter la mise en scène. En somme, la pièce ne convainc pas; Le sujet reste passionnant.

 

Titre original: LAST ON HIS FEET.

Chez FUTUROPOLIS. YOUSSEF DAOUDI et ADRIAN MATEJKA; TRADUCTION DE SIDONIE VAN DE DRIES

Un pas de chat sauvage. Blandine Savetier. Aux Bernardines du 12 au 22 mars 2024.

 

Commentaires

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  1. Christophe Goby Christophe Goby

    Le dernier debout

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  2. mrmiolito mrmiolito

    Merci, intéressant pour le livre, ça donne envie comme toujours.
    S’agissant de la pièce, je me sens moins concerné.

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