Mes châteaux d’If: Bella Ciao par Baru.
Rencontre avec Baru, auteur de Bella Ciao (Tre) à la Réserve à Bulles (Marseille)
Mes châteaux d’If: Bella Ciao par Baru.
Il est à l’heure et c’est pas commun chez les auteurs. «Salut EDIKA ! lancé-je pour tester l’humour du bonhomme qui est en tournée mondiale pour son troisième volume de Bella Ciao.
Ah, justement, me répond le beau gosse de 75 ans, bien en forme comme un prof de gym à la retraite. «J’ai une anecdote avec lui, enfin avec son frère Caralli. Figure-toi qu’il pensait que j’étais juif avec ce nom. Mon nom c’est Baruela, italien quoi ! » Ça y est c’est parti pour trente minutes de digressions autour de Giuseppe Garibaldi, la gauche, les mines dans l’ Est…Tu vois le topo?
«Quand j’étais môme, j’étais bon élève et mon père voulait que je devienne ingénieur. » A cette époque ; l’ingénieur est le rêve des parents comme celui d’informaticien l’est devenu dans les années 80 ou influenceur aujourd’hui. Un ça sert d’os en somme.
«Je change de direction. Je voulais un métier où je ne passe pas ma vie à la gagner. » On se comprend : Moi, c’est un métier où je ne passe ma vie. Point. Alors le sport, causons un peu? Et la boxe, dont il a fait deux albums, un sport prolétarien comme le vélo ? « J’ ai pris un coup dans le pif et j’ai arrêté. Pour le vélo, j’ai laissé le filon à Christian Lax»( dessinateur de l’Aigle sans orteils). Je lui recommande discretement quelques albums sur la boxe comme celui d ‘Eddy Vaccaro, Championze ou le boxeur de Kleist. (Disponible dans vot’ librairie en plus)
Baru ou l ‘Italie des pauvres.
« Mon truc c’est de parler des miens, des fils d’ouvriers, comment ils prennent en main leur destinée, par le sport par exemple.» Un coup d’œil attentionné aux planches de Baru suffit à voir le mouvement, notamment chez les mômes: Il y a vraiment un effort mis sur le mouvement des corps. Et une nostalgie des corps graciles et alertes. Dans Bella Ciao Tre, la famille passe son temps à faire la fête, du dimanche à la Saint Lundi. En Italie, si vous connaissez, on a conservé la fête portée sur le dimanche. C’est ce que retient Baru car le monde du travail est un monde interdit. Sauf pour le gamin qui va porter sa gamelle à son père qui fait ses seize heures (outch !) dans les hauts fourneaux à Villerupt.
«Et ce deuxième album alors? ? Le troisième me répond-t-il. Je ne me liquéfie pas car j’ai l’habitude d’en dire de plus grosses. ( Demandez à l’équipe de CQFD) Puis j’ai le bonheur de voir dans ces albums les approximations assumées du gonze. Ouf. Toute façon, Futuropolis, canal habituel, ne m’a même pas envoyé les albums alors…
« Dans cet album, je parle du prix à payer pour être transparent. Je déstructure les étapes historiques. » Pas facile de s’y retrouver dans ces plongées historiques entre garibaldiens engagés dans la première guerre mondiale et décimés dans les champs de la Marne et enfance rêvée, réinterprétée. Baru dans ces albums n’hésite pas à nous raconter ses errements et ses erreurs, un peu comme Sfar.
Ce troisième album est constitué autour de l’histoire des autres, des enfants de l’est de la France dont les parents ou grands-parents sont venus d’Italie fuyant la misère ou la guerre, pour devenir chair à patron.
La BD, chez Baru, c’est arrivé avec Vaillant, une publication pour la jeunesse du Parti Communiste puis au lycée il est tombé sur Hara Kiri, puis Charlie Mensuel et « là c’est Reiser qui m’a ouvert les portes.J’avais envie de m’exprimer pas forcement en bd, puis ça a été Wolinski «Je votais PC en lisant Hara-kiri et je suis plutôt casse couilles avec mes copains sur le sujet. » raconte celui qui vote Mélenchon aujourd’hui.
«Je ne soufre pas, sauf de la vieillesse. Je n’ai pas de problème pour remplir une feuille. Je prends un A4, que je replie puis je dispose mes personnages. Je passe 8 heures par jour au dessin. J’ai pu faire ça en étant prof de gym. » Ce qui fait quand même pas mal d’heures à plancher sur la barre. Comme sa famille, ces «macaronis » italiens , il raconte l’histoire de l’industrie dans le nord-est, la prix du travail, dangereux et coûteux en vie, comme le père d Ali qui meurt sous un tuyau mal arrimé et qui fait de lui le prochain sur la liste.
Mais tout cela ce sont des histoires, la famille de Baru n’a jamais combattu avec les chemises rouges de Garibaldi, ni avec les antifascistes italiens. «C’étaient des pauvres dans ma famille.» On échange un moment sur Garibaldi, ce super héros italien dont il a lu la biographie chez Milza et moi chez Max Gallo en se disant que c’est un vrai personnage de bande dessinée. « Mon grand-père n’était pas garibaldien mais était concierge aux bains douches»(pas la boite où s’encanaillait la jeunesse des années 80) mais ceux de son bled.
Tout ceci produit trois albums avec des images, de l’écriture aussi pour raconter la vie des Italiens en France mais dans une certaine confusion pour le lecteur. On se perd entre les personnages de la famille ou de la communauté. Diable, je crois que Baru s’est aussi perdu à vouloir mettre toute l’immigration italienne dans trois tomes. Il convoque même Emmanuel Todd pour expliquer des concepts sur la famille égalitaire en Calabre mais c’est quand il croque une cafetière italienne qu’on est sûr de parler de l’Italie.
Baru, quand il était môme aimait ses copains comme il aime ses potes d’aujourd’hui, Igort, Gipi ou Jean-Christophe Chauzy qui travaille beaucoup avec Jonquet. En matière de BD, il apprécie toujours comme un gamin attendant la sortie de Vaillant, Munoz, Tardi, qui vient de sortir le dernier Adèle Blanc sec, Larcenet, Davodeau, ou Lax, des auteurs retournant l’histoire du peuple avec leur pelle, une pelle en forme de crayon.
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Le dessinateur Baru était de passage à la Réserve à Bulles.
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