Jeux, émoi
Combattants, dans l’esprit olympique?
Les Français n'ont toujours obtenu qu'une médaille. Mais ils s'illustrent dans les combats d'après-match. Comme Camille Lacourt, le dossiste marseillais.
Combattants, dans l’esprit olympique?
Les compétiteurs français prennent cher en ce début de Jeux. Les commentateurs n’y vont pourtant pas à fond, car ils se méfient d’un retour de flamme, si les médailles se mettaient subitement à dégringoler dans le panier. Mais il ne faut plus attendre trop de patience de leur part.
Les vertus de guerriers des sportifs français sont mises en doute.
L’escrime, par exemple, a vu ses trois représentantes au sabre éliminées par la même Russe chevronnée, Sofia Velikaïa. Ce qui ne lui a pas porté bonheur puisqu’après avoir gagné deux assauts à la touche décisive (15-14), elle a perdu sur le même score en finale, contre sa compatriote Anna Egorian. Pas de chance : elle avait déjà échoué en finale à Londres. La médaille de bronze, curieusement, est aussi revenue à la même sabreuse qu’il y a quatre ans, l’Ukrainienne Olga Kharlan, qui a dominé la jeune Française Manon Brunet, encore dépitée d’avoir manqué la finale. Brunet n’a que 20 ans, et l’escrime, le sabre particulièrement, demande beaucoup d’expérience, même si la fougue de la jeunesse s’y exprime aussi bien. Un bel avenir lui semble promis, peut-être dès l’épreuve par équipes.
La difficulté à mettre la dernière touche est-elle un épiphénomène ou bien un mal récurrent ? On est enclin à croire que les Français, d’une manière générale, s’occupent un peu trop de la technique et du beau jeu, et pas assez du mécanisme mental qui électrise le corps au moment d’un geste décisif. Or le langage corporel à la mode, c’est celui qui fait avancer le gagnant pour tout emporter sur son passage. Gagner en restant bien coiffé, c’est devenu exceptionnel.
Il n’y a qu’à voir les ratés, assez exaspérants à la longue, des joueuses et joueurs tricolores de basket et de hand, au moment de transformer un lancer-franc ou un pénalty. Leurs adversaires se sont aperçus de cette faiblesse, ce qui les incite plus volontiers à tenter de les déstabiliser au moment crucial et à accumuler des fautes qui risquent d’avoir moins de conséquences au score.
Où les Français se font remarquer, en revanche, c’est dans les combats d’après-match, quand on utilise la langue comme arme fatale et qu’on donne des leçons à tout le monde, ce que tout le monde attend des Français depuis des millénaires. Certains de nos représentants allument les Fédérations internationales ou nationales, le CIO, les organisateurs brésiliens, la presse, le temps qu’il fait… Un judoka, Pierre Duprat, a même fait très fort en indiquant que les protestations du clan français après la disqualification discutable de Priscilla Gneto avaient placé toute la délégation dans le collimateur des arbitres pour le reste de la compétition. Cette déclaration peu apaisante ne va pas arranger les choses, en admettant qu’elle soit fondée. Si Teddy Riner perd sur une décision arbitrale discutable, comme cela lui était arrivé en 2008 à Pékin, il saura qui aller remercier.
De la même manière, les déclarations de Camille Lacourt, le nageur marseillais, après sa 5e place sur 100 m dos ne vont pas améliorer son image, qui était d’ailleurs assez jalousée par d’autres « copains » qui trouvaient que sa surface médiatique valorisait plus ses grands yeux clairs que l’excellence de ses résultats. Envoyer paître le CIO, la fédération internationale de natation, les agences anti-dopage n’est pas du meilleur goût quand son pays brigue l’organisation des Jeux de 2024.
Lacourt n’est pas qu’un beau gosse, doué et désinvolte. C’est aussi un combattant, comme il l’a prouvé en revenant à son plus haut niveau après de graves soucis de santé. Mais son plus haut niveau n’est plus suffisant. Il a réalisé 52’’70 en finale, alors que son record personnel est de 52’’11, ce qui lui aurait valu la médaille d’argent s’il l’avait réédité le jour J. Il est meilleur, avance-t-il, sur 50m dos, mais l’épreuve n’est pas au programme des JO. Cependant, il n’était pas en tête au passage des 50m durant la finale…
Lacourt a raison sur un point : les contrôles anti-dopage permettent d’attraper désormais quelques gros poissons.. qu'on remet aussitôt à l'eau. Encore faut-il vouloir les écarter du jeu. Ce qui n’a pas toujours été le cas par le passé, et a entravé la carrière de plusieurs grands nageurs français, comme Stefan Caron, Catherine Plewinski ou Malia Metella. Mais faudrait-il être certain que TOUS les sportifs français pissent clair. Et si ce n’était pas le cas, accepter de les sanctionner vraiment, pour ne pas compromettre aux yeux des mauvais perdantsl’image de leurs copains restés propres .
Le combat est un pilier fondamental des Jeux Olympiques, en dépit des proclamations pacifiques et humanistes qui n’ont cours que pendant la cérémonie d’ouverture.
Au programme des JO, qui comporte 28 disciplines (29 si on extrait le water-polo de la natation), il y a six sports de combat, imposés d’entrée par le climat guerrier qui baignait la fin du XIXe siècle lors de la renaissance des Jeux. On compte ainsi Escrime, Lutte, Boxe, Tir, rejoints depuis par le Judo (qui s’est installé partout dans le monde) puis par le Taekwondo (imposé par un membre coréen influent au CIO, et jamais enlevé depuis).
On pourrait y ajouter le Tir à l’arc, voire le Pentathon moderne et l’Equitation, pratiqués par de nombreux militaires. Et les affrontements du Rugby et du Handball exaltent également les corps à corps et les vertus de guerriers.
Ce n’était sans doute pas assez, et le Karaté va rejoindre les JO à Tokyo en 2020, comme le Judo l’avait fait en 1964.
A ce propos, la France devrait réfléchir aux disciplines qu’elle souhaitera faire figurer au programme si elle obtient l’organisation des Jeux 2024. S’il faut vraiment un sport de combat supplémentaire, elle peut proposer la savate, ou boxe française de son appellation plus sophistiquée. La pétanque ferait aussi l’office : c’est un sport (?) universel, dans lesquels les Marseillais et Provençaux ont de bonnes dispositions et qui pourrait même s’organiser dans notre région. On peut aussi penser aux échecs, discipline cérébrale mais aussi physique, qui attend son tour depuis bien longtemps. Comme on ne manque pas de le souligner en ce moment, les échecs sont aussi une spécialité française…
La présence de la lutte au programme ne devrait pas se discuter : c’est un sport fondamental, qui existait déjà dans les épreuves d’Olympie, et qui est pratiqué sur tous les continents devant un public passionné par des sportifs qui ne participent jamais aux Jeux, et y feraient certainement un malheur. Il s’agit aussi d’un sport universitaire, assez élitiste, comme aux Etats-Unis où il a un porte-parole de renom avec le grand écrivain John Irving.
Pourtant, il fait l’objet de menaces incessantes de disparition du programme olympique, ce qui lui a coûté déjà la présence de la lutte gréco-romaine (merci pour Olympie !) pour lui permettre la promotion de la lutte libre féminine. C’est un sport de force et de noblesse, dont tous les champions doivent être salués bien bas.
On sera plus circonspect à propos des épreuves de tir, dont on se demande ce qu’elles ont encore d’admirable, quand certains des compétiteurs jouent les snipers dans la mort réelle. Mais bon, cela a permis au Vietnam de conquérir son premier titre olympique, et cela permet à nos biathlètes de briller pendant les Jeux d’hiver.
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