À quoi pourrait ressembler le “RER à la marseillaise” ?
Marseille figure parmi les dix métropoles ciblées par Emmanuel Macron pour développer un réseau ferroviaire adapté à leur bassin de population. Calendrier, lignes principales et projets alternatifs : état des lieux d'une vieille idée métropolitaine.
Un TER entrant en gare de Gardanne. (Photo : LC)
Une séance de questions-réponses sur YouTube pour amorcer “une grande ambition nationale”. Ce dimanche, Emmanuel Macron a fait part de sa volonté de doter dix métropoles françaises de réseaux de transports de type RER. “On découvre qu’il est petit-fils de cheminot et qu’il a les larmes aux yeux quand il voit un train. Ça tombe bien nous aussi !”, se félicite Gilles Marcel, président de l’association NosterPACA, en pointe pour le développement du ferroviaire dans la région.
Si cette lignée picarde du président de la République ressurgit, son précédent quinquennat avait déjà bien balisé le sujet. En 2019, une loi lançait cette course aux RER hors Paris par le biais notamment d’un rapport commandé à la SNCF. Un an plus tard, cette dernière plaçait Aix-Marseille parmi les dix métropoles “à fort potentiel” pour développer un service de type RER. Statut confirmé par le chef de l’État lui-même lors de son discours du Pharo, en septembre 2021, au cours duquel il a déroulé son plan “Marseille en grand”.
Un RER, oui mais lequel ?
S’il y aura bien un RER sur le territoire d’Aix-Marseille, reste à savoir lequel… et quand. “Ce qui est déjà positif c’est que pour Macron, le RER c’est du ferroviaire. Ces dernières années, la métropole a eu tendance à reprendre ce vocable mais en mettant des cars à la place des trains”, reprend Gilles Marcel.
Les colonnes vertébrales sont identifiées de longue date, sous la forme de trois lignes : Marseille-Aubagne, Marseille-Aix et Marseille-Vitrolles-Miramas. Celles-ci correspondent aussi aux trois “corridors” où se concentrent plus de la moitié des déplacements interurbains dans la métropole. Pour ces distances de plus de 7 km, l’enjeu est immense avec 96 % de part modale pour la voiture.
Mais pour le détail, il faudra encore patienter. Interrogé sur BFM Marseille Provence, le vice-président délégué aux transports de la région Jean-Pierre Serrus renvoie aux conclusions d’une étude en cours. Missionné par la métropole, de concert avec la région et l’État, le groupe privé Egis doit rendre sa proposition d’“armature ferroviaire” en juillet. Le cahier des charges donne toutefois le ton en terme d’échéance imaginée : 2035 comme “horizon intermédiaire” et 2050 pour le “long terme”. Le plan du président de la République permettra-t-il d’accélérer ?
Le verrou de la gare Saint-Charles
L’horizon 2035 n’est pas choisi par hasard par les initiateurs de l’étude : il s’agit de la perspective de livraison de la gare souterraine à Saint-Charles. De fait, ce grand chantier est souvent présenté comme la clé pour améliorer les TER. Il libèrerait en effet la gare de surface pour les circulations régionales en concentrant les TGV en sous-sol, qui accueillerait par ailleurs de nouvelles liaisons “diagonales” entre Avignon, Marseille et Toulon.
Dans son discours du Pharo, c’est d’ailleurs le seul projet cité par Emmanuel Macron pour illustrer son “RER à la marseillaise”, à côté d’un enjeu de modernisation de la signalisation ferroviaire. “Le problème c’est que cela conduit les institutions à se caler sur ce calendrier et à attendre cette traversée souterraine. Or, on peut faire bien des choses avant”, défend Gilles Marcel. Une première phase de travaux est toutefois prévue en amont sur plusieurs infrastructures marseillaises, avec un budget de 371 millions d’euros, contre 2,23 milliards pour la deuxième phase, qui comprend la gare souterraine.
Rognac remonte sur le Ring
Cette position d’anticipation, c’est celle que défend plus largement le collectif Provencexpress, où l’on retrouve des associations, trois mairies (Pertuis, Velaux et Coudoux) et trois parlementaires (les députés Renaissance Jean-Marc Zulesi et Anne-Laurence Petel ainsi que le sénateur écologiste Guy Benarroche). Publié en août 2022, leur rapport plaide en particulier pour la réouverture aux voyageurs de la ligne Aix-Rognac, actuellement limitée au fret. Cette idée remonte aux origines même de la métropole, en 2014, lorsqu’une mission interministérielle planchait sur ce grand dossier des transports. Parmi les scénarios, elle avait alors proposé une organisation baptisée “Ring”. Aix-Rognac constituait un maillon essentiel de l’anneau. “Cela permet de faire Aix-Arenc en passant par Vitrolles et ainsi relier des pôles d’emplois majeurs”, appuie Gilles Marcel.
De fait, si une étude a bien été réalisée par la suite, c’est plutôt le scénario suivant, davantage basé sur le car, qui a été poursuivi depuis la création de la métropole en 2016. “Je ne vais pas vous cacher qu’aujourd’hui, nous sommes un peu tous seuls à porter le sujet, reconnaît Jean-Marc Zulesi, député Renaissance du pays Salonais et de l’Est de l’étang de Berre. La SNCF n’y croit pas, la métropole n’y croit pas et la région, officiellement chargée des TER, dit que puisque les autres n’y croient pas, elle ne va pas s’exciter là-dessus.” Pour lui, “l’intervention du président est un argument supplémentaire dans ce sens, nous devons saisir la balle au bond”. Parmi les autres idées défendues par le collectif, on trouve une préfiguration de la liaison “diagonale” Vitrolles-Toulon en passant par la gare de la Blancarde et en évitant Saint-Charles.
Tirer parti de l’existant
Mais revenons à la définition d’un RER. À la suite du président Macron, le porte-parole du gouvernement Olivier Véran l’a précisée sur France inter avec une exigence de fréquence au quart d’heure en heures de pointe. Une cadence que les trois corridors de base sont en réalité déjà capables de tenir. Les jours de semaine, entre 6 h 02 et 9 h 08, la ligne Marseille-Aubagne, aligne 14 trains, soit un toutes les 13 minutes. Idem pour la ligne Aix-Marseille entre 6 h 53 et 8 h 23.
Le problème, comme l’a déjà détaillé Marsactu, c’est que cette capacité maximale est sous-exploitée une bonne partie du temps. Les usagers du TER Aix-Marseille peuvent ainsi attendre 1 h 42 un train au cœur de la matinée. Dans son schéma de référence remis au gouvernement, la SNCF considère qu’“en heures creuses, la desserte serait constituée d’un train à la demi-heure pour éviter des « trous »”. Autre caractéristique souhaitée, “l’offre du samedi devrait être proche de celle de la semaine : identique pendant les heures courantes de la journée et moins fréquentes en heures de pointe. L’offre du vendredi soir et du samedi soir devrait s’étaler jusqu’aux environs de minuit. Le dimanche, un service régulier d’un train toutes les heures voire davantage devrait être offert. Les heures de fin de journée seraient renforcées.”
Une logique approuvée par Gilles Marcel. “La dernière enquête locale sur les déplacements montre qu’une grosse part a lieu en dehors du cadre domicile-travail”, observe-t-il. Ce niveau de service est principalement entre les mains de la région, qui passe une commande annuelle à la SNCF.
Quelle traduction après YouTube ?
Concrètement, que change cette intervention, qui a pris tout le monde de court si l’on en croit Le Monde ? “On est interrogatifs car il est resté dans le vague”, commente Gilles Marcel. Le député Renaissance Jean-Marc Zulesi imagine, lui, une déclinaison “à court terme du plan “Marseille en grand” dans un plan “Métropole en grand””. C’est aussi le souhait de la chambre de commerce et d’industrie, qui demande dans un communiqué “à la métropole et à l’État d’inscrire ce projet de RER et le financement associé à l’ordre du jour des prochains travaux du GIP mobilités” créé récemment pour superviser les projets de tramway et de bus en site propre dont le financement est déjà annoncé.
Mais le dossier pourrait rester encore un peu dans les sphères nationales, avant de redescendre par la région. Le conseil d’orientation des infrastructures, un comité d’experts auprès du ministère des Transports, doit rendre d’ici un mois une hiérarchisation des projets selon plusieurs trajectoires budgétaires. Très rapidement, cette base sera déclinée dans les négociations entre l’État et la région pour un plan d’investissement de cinq ans.
C’est de cet exercice récurrent qu’est le “contrat de plan” que devrait tomber une bonne part des financements pour les trains régionaux. Les autres domaines avaient déjà été validés par Renaud Muselier avec le Premier ministre Jean Castex en 2021. Seul le volet mobilités était suspendu, comme partout en France, pour cause de retard de la précédente liste de chantiers. Cela aura laissé le temps à Emmanuel Macron de prendre un peu d’avance sur la communication.
Commentaires
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Le RER c’est bien, mais la différence, c’est qu’à Paris Intra-muros, il y a une offre correcte et dense de métro, bus, tram, ce qui n’est pas le cas à Marseille où le transport en commun est souvent indigent. Donc s’ils arrivent à Saint Charles et que là ils attendent 1/2 h un bus erratique, pas sure que le RER suffise à changer de mode de transport
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Ceci est exact. Si vous habitez Aix ou Rognac et allez bosser à Saumaty, compte tenu des transports intra-muros, autant prendre la bagnole.
Même chose d’ailleurs si vous résidez vers l’Estaque et devez vous déplacer quotidiennement vers les quartiers Sud ou Est de Marseille. Vous prenez la L2!
En attendant la réalisation de la gare souterraine, il serait donc bien utile de développer sans tarder le tramway ou le métro dans Marseille, sur des axes mal desservis. Tout le contraire de ce que fait la Métropole avec son tramway des Catalans qui emprunte un axe pourtant déjà bien pourvu! Mais à Marseille, j’oubliais, nous avons depuis longtemps des TC électoraux (cf la desserte de St-Barnabé par le métro et deux lignes de tramway).
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Pas besoin d’aller si loin
Dans le même genre pense a ceux qui habite a la Savine ou la Castellane et qui bosse soit chez Auchan st loup et carrefour le Merlan OU CEUX QUI HABITE MONTREDON ET QUI BOSSE A SAUMATY
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Merci pour cet article exhaustif et richement documenté. Très intéressant sur les possibilités, les études déjà menées, et… le retard pris.
Il ne manque que la volonté politique d’accélérer et d’y mettre les moyens (là plutôt qu’ailleurs).
Je me dis que l’arrivée sur Marseille et environs de nombreux “Parisiens”, habitués au RER, peut aider à l’accélération…
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Volonté politique de (re)construire un service public (oui j’ai osé écrire le mot honni en nos temps de libéralisme) du transport ferroviaire. Les deux gros titres du Marsactu d’aujourd’hui sont parallèles: Monsieur François Crémieux, directeur de l’AP-HM, prône la (re)construction d’un service public de la santé dans la totalité du territoire et cet article qui envisage un maillage ferroviaire dans tout le territoire. Il ne faut pas compter sur l’entreprenariat privé pour proposer un service public.
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Un idée mais l’infrastructure suivra t’elle ?
Quand on voit les problèmes du RER parisien, notamment dans sa partie nord où l’on préfère un TGV Paris CDG vide au doublage de l’infrastructure RER déjà insuffisante lors de son ouverture, on se demande si c’est à souhaiter pour Marseille…
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Il faut tenir compte de l’énorme différence d’échelle entre l’agglomération parisienne et l’agglomération marseillaise.
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Le saviez-vous ? La carte RTM que la Ville de Marseille fournit à ses agents (et finance en grande partie) ne permet pas les déplacements en train intra-muros, ce qui occasionne une réelle perte de temps pour certains déplacement professionnels.
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Pour les TER existants, c’est bien beau d’avoir une fréquence au quart d’heure mais Aix-Marseille en train c’est en moyenne 45 minutes (sans compter la correspondance métro). C’est très souvent moins long de le faire en voiture, même quand y’a des embouteillages “normaux”.
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quand je lis 2035 et 2050 j’abandonne !!
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Macron démantele les services publics que ce soit ceux de l’ecole’ de la santé ou des transports en commun et ses promesses n’engagent que celles et ceux qui l’écoutent. Cela fait quand même 6 ou 8 ans qu’il est au pouvoir comme président ou ministre de l’économie. Qu’a-il fait de positif depuis dans ces differents domaines ?
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Ca fai seulement 37 ans que j en entends parler de ce rer marseillais….alors 2050…….
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On est encore au XIX ème siècle. Il est facile de faire des aix aubagne des miramas toulon et pas besoin de tout empiler à Saint Charles surtout que c’est une butte et qu’il n’y a pas grand place disponible. Des arrêts à l’estaque, une gare vers st louis. Et si vous n’avez pas d’imagination demandez gentiment à Mac Kinsey.
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Je rejoins la réflexion sur la congestion dans Marseille, qui va limiter les bienfaits d’un RER. Tant qu’à investir des millions puis des milliards, il vaudrait sûrement mieux commencer par fluidifier la mobilité intra-muros. C’est ce qui pourrait sevrer les Aixo-Marseillo-Métropolitains de leur bagnole.
ça serait le job de ce fameux GIP Mobilité que de répartir les investissements de manière avisée. J’ai eu beau chercher, j’ai pas trouvé son site internet, à cette structure. On sait qu’elle est née début 2022, qu’elle est “détenue” à 51 % par l’état, à 49% par la Métropole … Bon. Un an pour mettre la machine en route, c’est déjà un peu longuet. On attendrait au moins un minimum de com sur un site, et pas seulement avec la tête de sa présidente (on la connait) en page d’accueil. Des projets, des délibérations, des tendances, du cohérent quoi …
En l’état, ce projet de RER, il est surtout bon pour les habitants de Pertuis / Coudoux / Velaux. Pas sûr que ça rejaillisse beaucoup sur ceux de Vitrolles par exemple, qui continueront à prendre leur voiture pour aller bosser dans Marseille, et vice versa … Marseille éternelle oubliée, quelle que soit sa “grandeur” ?
Au passage, félicitations pour l’article, très clair, documenté et synthétique.
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Merci à Marsactu pour cet article bien documenté sur ce RER Métropolitain qui vient à l’ordre du jour avec les récentes déclarations du Président Macron.
En lisant les contributions à cet article on voit la désespérance des usagers. C’est vrai la Métropole AMP est une terre de mission pour la mobilité quotidienne (14 % des ges)! La création du GIP et l’engagement de la Nouvelle Municipalité montrent cependant que les choses sont en train de changer pour Marseille intramuros avec le programme Marseille en Grand. Il faudra certes encore de nombreuses années (6-8 ans ?) et de grands travaux pour que les tramways circulent enfin qui accompagneront la nécessaire rénovation urbaine, mais il semble que le projet est bien engagé.
C’est la priorité, mais la construction du RER, qui doit venir s’articuler sur ce réseau en construction, est aussi d’une urgente nécessité pour tous, y compris pour les habitants de Marseille pour la mobilité quotidienne. Les grands pôles d’activité de la deuxième Métropole de France (1 900 000 habitants et 3150 km2) ne peuvent être en effet maillés que par un RER : un réseau ferroviaire électrifié, avec des trains le parcourant à des vitesses moyennes de l’ordre de 60 km/h comme dans le Grand Paris Express (40 milliards d’investissement).
For heureusement on peut s’appuyer sur le réseau ferroviaire historique qui couvre notre territoire.
Il n’est donc pas besoin d’attendre la gare souterraine de St Charles (2037 !!!) par exemple :
• Pour électrifier Aix-Marseille (2 millions de litres de gazole par an !) et dédoubler les voies.
• Réouvrir aux voyageurs très vite, la ligne Aix Rognac qui est en parfait état et les gares de La Calade et de Venelles, pour desservir le Pôle d’Activité des Milles englué dans la congestion et pollution du trafic automobile. A terme un tram-train est adapté pour ce secteur de la Métropole.
• Rénover la ligne de la Côte bleue et l’électrifier.
Il faut que la Région et la Métropole conçoivent et présentent un projet en concertation avec les usagers, en définissent la gouvernance (syndicat mixte ou établissement public) et le financement avec participation de l’Etat.
FNAUT-PACA et Association de Tram-train du pays d’Aix
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