À Marseille, une ancienne élue LR profère des menaces à l’encontre de deux députés LFI

À gauche, Manuel Bompard, à droite, Sébastien Delogu, tous deux députés LFI dans les Bouches-du-Rhône. Photo : Marsactu

“Ah, la belle équipe, vous allez bien, messieurs dames ? Moi, je suis très heureuse de l’attaque du Hezbollah. Ça vous a pas fait plaisir ? Vos bipeurs, ils n’ont pas sonné ? Bip bip ? Ah moi, je suis très contente que les terroristes, ils meurent.” Les propos sont clairs et parfaitement audibles. Dans une vidéo publiée sur les réseaux jeudi dernier, on découvre une passante qui s’adresse à quatre personnes attablées à la terrasse d’un restaurant. Parmi ces personnes, l’on aperçoit Sébastien Delogu, député La France insoumise des Bouches-du-Rhône. Une autre vidéo de la même scène filmée sous un autre angle fait apparaître un autre député de ce parti, Manuel Bompard.

La référence à l’attaque qui a causé la mort d’au moins 12 personnes et fait des milliers de blessés au Liban après l’explosion d’appareils de télécommunication ne fait pas de doute. Une attaque qui visait les membres du Hezbollah et dont Israël est très probablement à l’origine. “Ça va péter”, conclut un homme qui accompagne la passante. L’histoire pourrait à ce stade être classée dans la case faits-divers, bien qu’elle se produise dans un contexte géopolitique d’une extrême violence au Moyen-Orient et un climat de politique nationale très crispée sur le sujet. Sauf que la passante en question, qui poste elle-même la vidéo sur les réseaux sociaux, n’est pas une anonyme localement.

Élue dans le 6/8 et fille d’un président du Crif

Anouck Aragones, avocate au barreau de Marseille, a été élue sur les listes LR de Jean-Claude Gaudin dans le 6/8 où elle exerçait la fonction de sixième adjointe déléguée au commerce. Un mandat qu’elle a occupé de 2014 à 2020. Cette dernière fait également partie d’une famille connue dans la communauté juive. En effet, Anouck est la fille d’Isidore Aragones, ancien président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) de Marseille-Provence.

Jointe par Marsactu, cette dernière nous a accordé quelques minutes d’échange avant de couper court à la conversation. Pour Anouck Aragones, ses propos n’avaient rien de menaçant. “Vous croyez vraiment qu’ils se sont sentis menacés ? Mes propos ne contenaient ni menaces, ni injures. C’était de la moquerie”, se défend la principale intéressée. La violence de l’événement auquel elle fait référence ne place-t-elle pas l’apostrophe au-delà de la moquerie ? “Oui, il y a eu des morts, des civils qui n’étaient pas ciblés, mais surtout des terroristes”, répond l’avocate avant de raccrocher.

Plainte en cours

“Moquerie” ou menaces, cela n’a en tout cas pas faire rire les députés visés. “J’ai appelé mon avocat ce matin pour qu’il dépose plainte pour menace de mort. Elle-même est avocate et sait très bien ce qu’elle fait. Elle est obnubilée par ce qu’il se passe [le conflit israélo-palestinien, ndlr] et on devient ses victimes. On est là dans du fanatisme sioniste, elle le dit elle-même”, réagit Sébastien Delogu.

“Vous croyez vraiment qu’ils se sont sentis menacés ? Mes propos ne contenaient ni menaces, ni injures. C’était de la moquerie”

Anouck Aragones

À la fin de la vidéo, on entend effectivement la jeune femme dire : “Je suis sioniste”. Manuel Bompard, s’il

soutient la procédure qui va être engagée par son homologue, n’a pas confirmé en revanche porter plainte en son nom. Ce dernier a pourtant également reçu un message privé d’Anouck Aragones, dans lequel elle écrit : “Vous me trouverez toujours devant vous pour vous rappeler votre antisémitisme et votre médiocrité.” 

Depuis l’annonce des élections législatives anticipées, des membres de La France insoumise sont régulièrement taxés d’antisémitisme. Une critique qui vient principalement d’opposants politiques, mais qui créait aussi de houleux débats au sein du Nouveau Front populaire. LFI s’est en effet clairement positionné sur le conflit israélo-palestinien en soutien aux Palestiniens et peine à clarifier sa position sur la problématique de l’antisémitisme grandissant en France, à l’instar du chef de file Jean-Luc Mélenchon.

Vengeance ?

Manuel Bompard, lui, voit la motivation de cette prise à partie ailleurs. Le coordinateur de LFI, comme Sébastien Delogu, se pose la question d’une “vengeance” de la part d’Anouck Aragones. Il pointe ainsi sur les réseaux sociaux et auprès de Marsactu le fait que son père est également le nouveau président de l’entreprise Laser Propreté, dont l’actualité est mouvementée. En effet, la SNCF et la RTM ont récemment mis un terme à leurs délégations de service public pour le nettoyage de la gare Saint-Charles et du métro avec cette entreprise qu’elles accusent de “fautes graves” et “pratiques frauduleuses”. Or, les deux députés visés par les propos de la jeune femme ont saisi la justice au sujet de la gestion de Laser Propreté et exprimé leur soutien aux salariés en grève.

“Voilà qui est la fameuse « passante » qui insulte et menace de mort des députés de la République. Ne l’insultez pas, ne la menacez pas : méprisez-la. Et continuez à vous battre pour le peuple palestinien et à soutenir les salariés de Laser Propreté ! “, tweete ainsi Manuel Bompard dans un étonnant crossover. Anouck Aragones, elle, a retiré sa vidéo.