A Marseille, le film Hors-la-loi rouvre des plaies

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le 21 Sep 2010
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A Marseille, le film Hors-la-loi rouvre des plaies
A Marseille, le film Hors-la-loi rouvre des plaies

A Marseille, le film Hors-la-loi rouvre des plaies

Les drapeaux, les vieux slogans, et surtout les vieilles rancunes étaient de sortie hier soir à Marseille pour l’avant-première du film Hors-la-loi. Une centaine d’anciens combattants et de Pieds Noirs, agrémentés de quelques élus FN ou UMP et de militants d’extrême droite s’était massée devant le Pathé Madeleine pour dénoncer un « financement français pour un film anti-français« , en l’occurrence celui du Conseil régional. Et bousculer comme il se doit son vice-président à la culture, Patrick Mennucci (PS), aux cris de « Mennucci collabo« .

Plaies encore ouvertes

Le soutien au film « a été décidé par un comité artistique puis a été délibéré par notre assemblée. Nous avons voulu le faire car [le réalisateur] Rachid Bouchareb a beaucoup apporté à la compréhension entre les peuples« , a-t-il justifié avant la projection. Albert Guigui, conseiller UMP de la mairie du 3e secteur chargé des Rapatriés n’est pas de cet avis : « Je ne l’ai pas vu et je n’y tiens pas trop. Ca me fait trop mal, glisse-t-il. J’aimerais qu’on écrive l’histoire du 20 juin 1957, où mon père a été assassiné. Aujourd’hui j’ai 68 ans et la plaie est toujours ouverte« .

En face, quelques jeunes arborant des t-shirt du Parti des indigènes de la République brandissent des pancartes dénonçant la colonisation aux côtés d’élus comme Maurad Goual (adjoint UMP au maire du 5e secteur, mais démissionnaire) et Haouaria Hadj-Chick, conseillère d’arrondissement PC dans le 13/14. Illico, les esprits s’échauffent, on manque d’en venir aux mains. La police fait barrage. Des excités scandent « OAS », une dame lance des « extrémistes« , « pourris » et « dehors« . « On a encore raté une occasion de se parler« , résume Maurad Goual.

« Est-ce que c’est utile de réveiller les démons ? Je pense qu’aujourd’hui il faut tout faire pour essayer de vivre en harmonie. De toute façon, c’est trop délicat : en fonction du réalisateur c’est toujours tendancieux« , estime Albert Guigui. Face à cette position qui interdirait donc tout film sur le sujet, Patrick Mennucci affirme que « nous ne réussirons pas d’intégration totale si nous ne connaissons pas l’histoire. » Bref, on n’a pas avancé d’un pouce depuis la polémique au festival de Cannes.

Une histoire d’hommes, une histoire sur l’homme

Et de préciser cependant que « ce n’est pas un film à la gloire de qui que se soit. Le FLN n’est pas épargné et on y voit les grandeurs et les petitesses de la guerre. Mais c’est avant tout une histoire d’hommes, de trois frères. Il faut l’accepter comme une oeuvre de fiction qui s’appuie sur des faits réels« .

Ouf. A mouliner dans le vide sur le principe même du film, on en aurait presque oublié de regarder ce qu’il y a dedans. Et ce qu’il y a dedans confirme les propos de Patrick Mennucci : Hors la loi, et le cinéma, c’est avant tout de l’humain. C’est la dévotion à la cause du FLN d’Abdelkader, qui confine à la psychorigidité. C’est l’humeur sombre de Messaoud, qui sent sa vie familiale lui échapper. C’est l’arrivisme dépolitisé de Saïd. C’est le conflit entre le premier et le dernier, entre lequel se retrouve pris le second. Le film souffre parfois de longueurs (quelques autres griefs sur Respect Mag) et n’a la profondeur des Justes de Camus. Mais si le contexte peut rouvrir des blessures, le thème abordé est universel : peut-on et doit-on tuer, à commencer par son propre frère, au nom d’une cause ?

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Commentaires

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  1. céhère céhère

    “Une centaine d’anciens combattants et de Pieds Noirs, agrémentés de quelques élus FN ou UMP et de militants d’extrême droite”

    Quel beau mélange.

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  2. Ozz Ozz

    Le français est frustré. Le français à besoin de gueuler, c’est vital. Quelle que soit son origine d’ailleurs.

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  3. Abia Abia

    completement d’accord avec le com de Julien Vinzent.
    Et je pense que c’est justement les nons dits dans l’histoire commune de ces pays (idem pour l’afrique noire) qui ” foutre le feux aux cités”

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  4. momo momo

    je viens d’ecouter le reportage radio, j’étais sur l’autoroute, je n’arrêtais pas de pleurer, ils on sont encore là, je ne savais pas pourquoi je pleurais, je ne suis pas pied noir, bien qu’affiliée, je suis pas musulmane arabe, bien que concubinée, avec un arabe d’origine musulmane comment peut on encore crier, sale arabe retourne chez toi, les hommes ne grandiront ils jamais, ma solution ?
    je suis bouddhiste, religion philosophie, de la paix, j’ai réussi à convertir deux personnes d’origine arabe, une d’origine juive, qui elle même ont converti etc etc, dommage les médias ne parlent jamais de cette religion-philosophie, trop eloignée de leur conception peut être, pas enseigné à l’université, ni à sciences po, en attendant je fais mon ^petit bonhomme de chemin et je me dis en vous écoutant, comme j’ai raison.
    cela fait 20 ans que je défile dans les rues, 1968, 1995, 2005 etc, chaque fois c’était pour la bonne cause, contre la guerre en Irak par expemple sous la pluie, pendant des heures
    8 ans après j’avais raison , même les Américains reconnaissent qu’ils ont eu tord,
    je signe des pétitions, j’envoie de l’argent à Greenpeace, mais tout cela à quoi ça sert, la seule revolution valable, c’est la révolution humaine, se changer et le monde changera, mais j’ai l”impression de parler dans le vide, tant pis je continue

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