À Belsunce, l’avenir du centre médico-psychologique menacé par les dealers
Début juillet, le centre médico-psychologique Pressensé a fermé ses portes en raison d'intimidations venues du point de deal voisin. La préfecture de police a présenté des mesures pour tenter de répondre aux inquiétudes de la direction et des salariés.
Le CMP de la place Louise-Michel a fermé ses portes en raison de la cohabitation avec un point de deal. (Photo : Floriane Chambert)
À 9h du matin, la place Louise-Michel est calme. Le “point stup” n’ouvre que deux heures plus tard. Les dealers ne sont pas encore installés devant la fresque représentant le parrain de la drogue de cinéma Scarface. Juste en face de Tony Montana, le centre médico-psychologique (CMP) Pressensé est lui aussi recouvert de tags. Un patient régulier, chapeau vissé sur la tête et porte-documents en main, se présente à l’entrée pour se rendre à son rendez-vous. Le rideau métallique est entrouvert mais à l’intérieur seul le vigile est présent. “Le centre est fermé, il faut appeler les numéros de téléphone sur la porte ou se rendre à l’hôpital Edouard-Toulouse dans les quartiers Nord”, indique-t-il. “Je ne supporte pas les transports en commun. S’il faut aller jusqu’à Edouard-Toulouse, j’irai à pied même si je dois mettre 3 heures”, répond le patient, très étonné qu’on ne l’ait pas prévenu.
On est habitués aux intimidations et aux menaces mais on n’avait encore jamais eu d’intrusions.
Pascale, infirmière
La fermeture du centre s’est faite dans la précipitation. Le 3 juillet, en plein après-midi, comme l’a raconté La Provence, un jeune homme, torse nu et visage caché par son t-shirt fait brutalement irruption dans les locaux et menace de brûler le CMP. La raison : deux heures avant, une violente altercation entre dealers éclatait à la vue de tous. L’équipe médicale prévenait alors la police pour qu’elle intervienne. Pascale, infirmière depuis 23 ans en psychiatrie, en poste au CMP Pressensé depuis deux ans, a assisté à l’ensemble de la scène. “Ce jeune homme, c’était un des dealers d’en face. Ils sont venus nous menacer parce qu’on a appelé la police. Ils nous voient comme des balances. On est habitués aux intimidations et aux menaces mais on n’avait encore jamais eu d’intrusions. C’est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase.” Le personnel soignant décide de faire immédiatement valoir son droit de retrait. Le CMP ferme ses portes et l’équipe, craignant des représailles, quitte l’établissement escortée par des policiers.
Depuis cet évènement traumatisant, le CMP Pressensé a été transféré dans une aile de l’hôpital psychiatrique Edouard-Toulouse dont il dépend. Une solution temporaire mais loin d’être satisfaisante tant pour les patients que pour les soignants. Les adultes pris en charge par ce CMP sont tous domiciliés en centre-ville. Pour des personnes atteintes de troubles mentaux et bien souvent non véhiculées, le trajet jusque dans les quartiers Nord s’apparente à un parcours du combattant. Le service multiplie donc les allers-retours pour prodiguer des soins à domicile.
“Depuis trois semaines, on met tout en œuvre pour éviter les ruptures de soin notamment pour ceux qui ont des piqûres-retard [injections médicamenteuses, ndlr] mais beaucoup de nos patients n’ont pas de papiers. Il n’y a pas de noms sur les sonnettes et il y en a beaucoup que l’on ne retrouve pas”, explique Pascale. Si cette délocalisation venait à se prolonger, Kader Benayed, secrétaire général du Syndicat SUD Santé, craint que des drames ne surviennent. “Les ruptures de soin sont potentiellement des passages à l’acte”, alerte-t-il.
La cohabitation avec les dealers devenue invivable
Le travail de Pascale et de ses collègues s’est considérablement compliqué depuis le transfert du centre, mais rester dans les locaux de Belsunce n’était, pour eux, plus une option. Le réseau de drogue est implanté depuis bien longtemps sur la place Louise-Michel face au CMP, ce qui a toujours posé problème. Beaucoup de patients ont des problématiques addictives et la proximité avec un point de vente ne facilite pas le processus de soin. Par ailleurs, un certain nombre d’entre eux se sont plaints de faire l’objet de racket de médicaments par les dealers.
“Ça fait véritablement un an que nos relations se sont dégradées avec les dealers. Avant, on arrivait encore à parler aux jeunes. Il a dû y avoir un changement de réseau et depuis, on est régulièrement la cible d’intimidations. On ne peut pas sortir fumer une cigarette sans qu’on ait une réflexion comme « pourquoi tu me regardes comme ça ? » Dès qu’on arrive en voiture, ils nous balancent leurs chiens dessus. J’en suis venue à me demander, chaque jour en sortant du travail, s’ils n’allaient pas me suivre jusqu’au métro”, se confie Pascale. Le danger ne s’arrête pas aux intimidations ou aux menaces. Le personnel et les patients ont même été témoins d’une fusillade durant les horaires d’ouverture, le 28 octobre dernier. Signe de la gravité de la situation, le CMP Pressensé est le seul à Marseille à être doté d’un agent de sécurité, selon Kader Benayed.
Après l’exercice du droit de retrait par son personnel, Thierry Acquier, le directeur de l’hôpital psychiatrique Edouard-Toulouse a lancé un appel à l’aide à l’ensemble des pouvoirs publics. Dans une longue lettre datant du 4 juillet consultée par Marsactu, il est sans équivoque : “Sans un retour rapide à la sécurité publique, je me verrais contraint de ne pas ancrer le CH Edouard Toulouse dans ce territoire en ne donnant pas suite à la promesse d’achat des locaux faite auprès du conseil départemental. Je serai également dans l’obligation, en ma qualité d’employeur, et des obligations d’assurer la santé et la sécurité de mes personnels, d’envisager un départ du service public d’accès aux soins en santé mentale dans ce quartier du centre-ville”.
Il est, en effet, prévu que le centre hospitalier rachète les locaux dans lesquels est implanté le CMP Pressensé. La négociation est déjà bien avancée avec le conseil départemental, qui en est le propriétaire. Un renoncement de la part d’Édouard-Toulouse exposerait l’hôpital à des pénalités.
La préfecture de police annonce des mesures
Les pouvoirs publics, de leur côté, semblent s’enquérir du problème. “Je veux absolument qu’ils restent. Dans cet arrondissement, on est le réceptacle de personnes errantes avec des problèmes psychiatriques. Il est très important que le service public de santé mentale se développe ici”, commente Sophie Camard, maire des 1er et 7e arrondissements de Marseille. Jeudi dernier, une réunion s’est tenue avec le directeur de l’hôpital Edouard-Toulouse, l’Agence régionale de santé et la préfecture de police des Bouches-du-Rhône.
“On ne laissera pas le service public partir sous la pression des dealers”, assure Yannis Bouzar, sous-préfet de police chargé de ce dossier, à Marsactu. Parmi les mesures annoncées : renforcer la présence et les contrôles de la police, notamment des CRS aux abords du CMP ; établir un référent direct au sein de la police nationale que le personnel pourra contacter en cas de danger ; remettre en service la vidéo-surveillance sur la place mais également conseiller le service hospitalier pour la mise en place de nouveaux équipements comme un sas de sécurité ou un gardiennage renforcé.
L’enjeu est aussi de rassurer le personnel qui reste très sceptique à l’idée de revenir travailler dans les mêmes locaux. “L’ensemble de l’équipe n’est pas pour l’achat des lieux. On n’éradiquera pas le problème de la drogue. On craint des représailles si la police passe plus souvent. On craint que nos relations avec les dealers ne s’aggravent encore plus” confie Pascale.
Deux solutions s’offrent désormais au directeur du centre hospitalier qui n’a pas donné suite à nos sollicitations : compter sur les promesses de la préfecture de police et consolider l’implantation du CMP Pressensé à Belsunce, ou renoncer au rachat des locaux et en chercher d’autres en centre-ville. Une seconde solution qui nécessiterait du temps et contraindrait l’équipe médicale à rester délocalisée à Edouard-Toulouse sur une longue période. Selon Kader Benayed du Syndicat SUD Santé, la direction de l’hôpital a assuré qu’il n’y aurait pas de réintégration forcée du personnel dans les lieux.
Commentaires
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C’est dramatique que “l’impuissance public” se reveille apres les évènements, comme toujours. Le point de deal n’est pas nouveau donc pourquoi Camard, le prefet et consorts s’empressent de donner leur points de vue à Marsactu? A leur place, je raserai les murs.
Au passage, la camera remise en service que maintenant? Avant 2020, nous avions des branques ok mais depuis 3 ans Ohanessian il fait quoi? Pour rappel le contribuable marseillais les a payé cher ces caméras!
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il faudrait réfléchir sur le problème du trafic, la légalisation de la vente se fait déjà dans plusieurs pays, il faudrait étudier comment cela se passe
C’est des milliards d’euros que rapportent ces trafics, la lutte point de vente par point de vente est inefficace; ils se recréent immédiatement.
Une caméra cela se casse, le trafic se fait toute la nuit, combien de policiers pour surveiller tous les points de vente…
Après accuser la Mairie, le département, la préfecture, la police ou … d’être inefficaces c’est se tromper soi même et avoir bonne conscience
Alors il faut une véritable réflexion sur la légalisation et inspirons nous de ce qui se fait ailleurs
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Je ne suis pas sûr que la légalisation soit la solution. Malheureusement.
Des spécialistes expliquent que, celle ci se faisant sur la base de drogues type shift raisonnablement dosées, les trafiquants s’adapteront en proposant des produits beaucoup plus forts. C’est d’ailleurs déjà le cas.
Rien ne sera donc réglé et il n’y a qu’à voir le cas de la Hollande. .
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“Le réseau de drogue est implanté depuis bien longtemps sur la place”
Il a fallu des événements graves et le retrait du personnel pour que l’État daigne enfin prendre quelques mesures contre un point de deal bien connu. Mais tous sont bien connus!
Il y a quelques mois, c’était la Fondation Abbé Pierre qui pliait bagages rue Loubon sous la pression des trafiquants.
Pendant combien de temps va-t- on encore tolérer ces trafics??!
Les plus vulnérables en sont les premières victimes ainsi que les jeunes des cités dont beaucoup voient désormais des modèles dans ces gangsters et s’enferment dans un système clanique imperméable aux règles de la société ( cf les dernières émeutes qui n’avaient rien d’une contestation sociale, n’en déplaise à LFI). Avec ce phénomène, chaque nouvelle génération est plus destructurée et violente que la précédente, comme l’illustre encore le cas de ce centre médical.
Ces trafics sont mortifères, destructeurs, un cancer social. Mais qu’attend on pour prendre vraiment le problème à bras le corps?
Au passage, un grand merci aux bobos fumeurs de joints qui alimentent ce trafic, car sans client point de commerce.
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Bien d’accord avec vous ! c’est pas possible qu’après tout ce temps personne n’ait rien à proposer pour lutter contre ça.
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Vous pensez vraiment que ce sont les “bobos” qui alimentent le trafic 🤣
Je connais des ambulanciers, chauffeurs livreurs, travailleurs sociaux, chauffeur RTM, profs, secrétaires, étudiants, chercheur CNRS, lycéens, proviseur de collège, maçon, animateur sportif,.. Bref en faisant le calcul, près de 60% de mon entourage fume du canabis et pour certains, au boulot et toute la journee. Je ne porte aucun jugement et je ne suis pas bobo ni mes relations mais une bonne légalisation – comme pour la prohibition de l’alcool – réglerait pas mal de choses
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LN, le “bobo” est juste une image . Il faudrait que tous ces gens bien insérés dans la société que vous citez comprennent que ça n’a rien de “cool” de fumer un peu de shit et que ce faisant, ils alimentent un trafic mortifère.
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Les dealers font leur loi au su et au vu de tous jusqu’en centre ville.
La mise en vente libre de la drogue, hypothèse en soi pas stupide pour tuer les réseaux, ne semble pas donner des résultats concluants dans les pays qui l’expérimentent.
Alors reste la solution de la force légitime de la police et de la justice, n’en déplaise aux mélenchonistes et consorts qui braillent “tout le monde déteste la police”. Alourdissement pénal, et rafles massives de police pour expédier tous ces délinquants aux Baumettes, pour “un certain temps”.
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C’est dramatique.
Un centre de soins psychiatriques qui ferme dans un quartier sous doté.
Des patients qui vivent une rupture de soins.
Des personnels dévoués qui ont peur dorénavant d’aller travailler.
A cause d’un point de deal.
Connu depuis longtemps.
En plein centre-ville.
N’ya t-il vraiment rien à faire, rien de possible, contre ces réseaux ? (Ce n’est pas le petit delinquant du bout de la chaîne le problème, mais bien les réseaux qui dépassent la cité, le quartier, la ville, ces reseaux sont nationaux et internationaux,
les “têtes” ne sont pas marseillaises). La ville est-elle à leur merci ? Les pouvoirs publics locaux et l’état dans l’incapacité d’agir ? Vraiment ?
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Les têtes marseillaises sont bien ” marseillaises” ,d’ailleurs évitons le terme générique de marseillais, je n’ai rien à voir avec ces voyous comme la majorité des habitants, qualifiez les de trafiquants ou de ce que vous voulez qui vivent dans cette ville et qui en fait se planquent à Dubai ou en Algérie.
Être mélangé à cette clique m’horripile.
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moi c’est les gens qui ramènent toujours tout à eux qui m’horripilent.
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darmanain est là pour lutter contre les eco-terroristes qui sont les vraies menaces
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Polipola si cela vous plaît d’être inclus à ces trafiquants, puisque l’inclusion est tendance, et bien faites vous donc inclure.Tous goûts sont dans la Nature.
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Pour “pacifier” facilement ce point deal,et ramener un peu de quiétude ,peut être faudrait- il implanter une annexe policière ou militaire,directement adjacente au centre de soin psychologique.Un genre de pôle d’entraînement et d’instruction militaire spécialisé dans les combats urbains.Je pense déjà que les dealers ravaleraint leur agressivité devant même un simple regard furtif d’un Commando marine ,un Dragon parachutiste ou un policier du RAID… Une infirmière,on n’y touche pas,un centre de soins, non plus.Que pourraient faire les pouvoirs publics dans cette cité pour éradiquer cette inquiétante et insidieuse violence qui s’est installée ?La distribution de claques est dépassée…
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Il y a eu d abord les cités… depuis quelques années le centre ville dans certains quartiers est en train de devenir une zone de non droit, jusqu’ou cela ira-t-il ? Il suffit d’ouvrir les yeux pour observer là où cette économie parallèle est en train d’imposer ses régles au détriment du droit commun.: occupation abusive de l’espace public, intimidation , comportement agressif etc … La République baisse les bras et ferme les yeux. Pas rassurant pour l’avenir, mais que font ceux qui prétendent gérer la collectivité. Etre élu impose quelques exigences pas seulement des privilèges.
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Un point de deal, c’est plus facile à déménager qu’un CMP … A tout prendre, il vaut mieux que ça soit les trafiquants qui dégagent. Une bonne présence policière devrait y parvenir. Même si pas mal de ces jeunes trafiquants pourraient utilement recourir aux services du CMP, leur profil psy doit être assez border Line je crains. S’ils pouvaient le comprendre …
En attendant, une réaction républicaine semble nécessaire pour neutraliser des petits jeunes qui ont trop vu de films policiers ou trop joué à des jeux de “combattants” dans le virtuel. Fût un temps où ils étaient recadrés et canalisés sans trop de peine. Plus compliqué maintenant semble-t-il !
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