Propos sexistes et dégradants, mise au placard : le maire de Sausset risque l’inéligibilité
Maxime Marchand, maire écologiste de Sausset-les-Pins, comparaissait ce lundi 2 septembre devant le tribunal judiciaire d'Aix-en-Provence pour harcèlement moral. L'ancienne directrice du centre aéré municipal l'accuse de propos sexistes et d'une mise à l'écart professionnelle. Deux autres agents sont coaccusés dans ce dossier.
Maxime Marchand. (Photo : ML)
Dans les couloirs du tribunal judiciaire d’Aix-en-Provence, un jeune homme d’une trentaine d’années arrive AirPods aux oreilles, baskets blanches comme neuves, costume bleu marine parfaitement repassé, et lunettes de vue au nez. Il s’agit du maire écologiste de Sausset-les-Pins Maxime Marchand, élu en 2020 et plus jeune édile des Bouches-du-Rhône. Il rejoint rapidement une dizaine de personnes, conseillers municipaux et Saussetois qui ont fait le déplacement pour le voir aujourd’hui, et ses deux avocats qui l’attendent avec un dossier de 400 pages au bras. Car ce lundi 2 septembre, il va passer plus de sept heures sur le banc des accusés pour des faits de harcèlement moral.
Il est jugé au côté de deux autres fonctionnaires : Jérôme Ibanez, directeur général des services de la Ville de Sausset, et Isabelle Santini, cheffe du pôle enfance. La procédure a relevé des “familiarités insultantes”, des “mesures de dénigrement” ou encore une “mise à l’écart avec perte d’autonomie” qui mèneront à un “licenciement brutal” de la partie civile. Au terme d’une interminable audience, à plus de 23 heures, le procureur de la République requiert six mois de prison avec sursis contre le maire avec une peine d’inéligibilité d’un an et 3000 euros d’amende. Pour Isabelle Santini, il demande six mois de prison avec sursis ainsi que 2000 euros d’amende, et pour Jérôme Ibanez, quatre mois de prison avec sursis et 1000 euros d’amende.
Les faits reprochés remontent à 2020. Maxime Marchand est alors élu maire de Sausset-les-Pins. Audrey Gomila travaille quant à elle comme directrice du centre aéré municipal, où elle a été recrutée en septembre 2011 sous la direction de l’ancien édile de la Ville, Éric Diard. Selon cette agente, partie civile, le harcèlement moral commence dès la première rencontre avec le nouveau maire, à l’été. Il aurait alors déclaré à la directrice sur son lieu de travail : “On sait bien comment tu es rentrée en mairie : tu as couché avec Éric Diard”. Pour l’avocat de la partie civile, Jean-Philippe Nouis, ces propos sont “des faits intolérables pour quiconque, encore plus de la part d’un maire”. À la barre, Maxime Marchand nie fermement avoir tenu ces propos. “C’est surréaliste. Vous imaginez la lubricité ?”, défend son conseil Tom Bonnifay.
Des propos sexistes et rabaissants
Les accusations de propos sexistes ne s’arrêtent pas là. Un deuxième événement est cité par la partie civile. Deux anciennes animatrices viennent témoigner en ce sens à la barre. Les deux jeunes femmes avaient sollicité un entretien le 3 mars 2021 auprès du premier magistrat de la commune pour un problème de paie. “Je n’aurai pas les mots exacts, car ça fait quelques années”, avertit en préambule la première témoin. Elle cite alors Maxime Marchand : “Avec ses talons et décolletés de malade, je la paie à rien foutre”. La seconde rapporte quant à elle une citation avec le même fond : “À part mettre des talons de dix centimètres et des décolletés de malade, elle sert à rien”.
J’ai eu affaire à une personne très familière. J’étais abasourdie de ces propos tenus par un maire.
une ancienne animatrice
L’ex-animatrice se remémore devant le tribunal : “J’ai eu affaire à une personne très familière. J’étais abasourdie de ces propos tenus par un maire. Il a eu des propos sexistes à l’encontre d’Audrey. […] C’est ce que j’ai entendu. C’est des faits que j’aurais relatés pour n’importe quelle autre femme”. Durant l’audience, les deux anciennes collègues de la victime, aujourd’hui toutes les trois amies, apportent aussi des éléments sur la situation générale à cette époque au centre aéré : “On a subi et vu les conditions de travail qui se sont dégradées autour d’Audrey”. Une des témoins affirme également avoir observé chez son amie une détérioration de sa santé avec “un manque de motivation à venir au travail, beaucoup de colère, de la tristesse, de l’incompréhension”.
Si, lors de sa garde à vue, le maire a nié ces déclarations, devant le tribunal, il finit par avouer : “Il est fort probable que j’aie tenu ces propos”. “Les talons d’Audrey Gomila, ça a été rapporté par pas mal de monde. Ce n’est pas approprié pour courir après des gamins”, justifie le maire. À la barre, il offre un timide mea culpa : “Ce n’est pas la chose la plus intelligente que j’aie dite”. Lors de leurs plaidoiries, ses avocats tenteront de minimiser ces dires. Son premier conseil, Tom Bonnifay, essaie d’instaurer un doute sur la véracité des témoignages : “Ça vaut ce que ça vaut. En réalité, on ne saura jamais ce qu’il s’est passé”. Son deuxième avocat déclare quant à lui : “C’est un dérapage. Il le reconnaît. Mais ça ne faisait que quelques mois qu’il était élu”. “C’est complètement intolérable”, rétorque le procureur de la République, qui qualifie ces termes de “sexistes et rabaissants”, et “pas dignes d’un maire” pendant ses réquisitions.
“On va essayer de l’écraser”
La suite des faits reprochés se déroule de l’été 2020, avec l’arrivée de la nouvelle équipe et donc une réorganisation des services, jusqu’à octobre 2022 avec le licenciement de la directrice du centre aéré. Les trois prévenus sont coaccusés en tant que supérieurs hiérarchiques de la victime. “On va reprocher de plus en plus de choses à Audrey Gomila. […] On va essayer de l’écraser. À partir de là, elle va subir une mise à l’écart et un véritable dénigrement. […] On ne tient pas en compte de sa parole et de son positionnement. Et en aucun cas, il n’y aura de soutien de l’équipe dirigeante”, résume le procureur dans ses réquisitions. L’ex-directrice assure avoir fait l’objet de nombreuses critiques à l’oral, de pressions disproportionnées, d’un déménagement de son poste de travail sans consultation et sans le matériel informatique nécessaire à son activité.
Depuis le premier jour où je suis maire, je veux juste un centre aéré qui fonctionne
Maxime Marchand, maire de Sausset-les-Pins
“Je n’ai jamais eu aucun problème avec ma hiérarchie pendant dix ans, témoigne la victime, qui peine à dissimuler ses sanglots. Aujourd’hui, le résultat est que je suis toujours en souffrance. Avoir été dévalorisée, ça marque cruellement.” La présidente Cécile Acquaviva interroge cependant : “Avez-vous subi une réorganisation comme les autres agents ou est-ce que les comportements vous visaient directement ?” Ainsi, le directeur général des services Jérôme Ibanez asserte ne pas “avoir l’impression d’une mise à l’écart” d’Audrey Gomila et “ne pas avoir formulé des reproches”. “On était dans une période spéciale, ce n’était pas lié à elle”, indique de son côté la cheffe du pôle enfant, sur une même ligne de défense.
“Depuis le premier jour où je suis maire, je veux juste un centre aéré qui fonctionne. Je n’ai rien contre Audrey Gomila”, se défend à la barre l’édile face à ces accusations. “Ce sont des conflits de personnes qui ne se sentent pas bien avec une nouvelle municipalité qui vient bousculer leurs habitudes”, plaide son conseil Tom Bonnifay. Pour l’avocat, cette affaire relève par ailleurs d’une “mise en scène” de la part du parquet car “le personnel politique n’a pas la cote en ce moment”. Il regrette également que le dossier n’ait pas fait l’objet d’une ouverture d’information judiciaire avec une procédure contradictoire en amont. Le jugement sera rendu le 10 octobre à 14 heures au tribunal judiciaire d’Aix-en-Provence.
Commentaires
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À la lecture de l’article de Marsactu, l’affaire est claire et l’issue ne fait pas trop de doute.
L’impression est très différente quand on lit la Provence, qui donne plus d’éléments de contexte et les argumentaires de défense du DGS et de la cheffe de service : https://www.laprovence.com/article/region/4234185427036615/payee-a-rien-foutre-le-maire-de-sausset-les-pins-juge-pour-harcelement-moral-contre-une-employee-municipale .
La justice tranchera sur le fond, mais la différence de traitement médiatique est surprenante.
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En effet, l’article de la Provence paraît plus complet pour se faire une idée du contexte.
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Wouaaa…ah oui, rien à voir!
L’article de marsactu est à charge. Clairement. En omettant (volontairement ?)un certain nombre de faits objectifs.
Comparer ces deux articles revient à comparer deux modes de journalisme. C’est un peu inquiétant. D’autant plus, que jusqu’à il y a peu, j’aurais donné peu de crédits à La Provence…revoir ma copie?
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Pour répondre à RML….. Vous avez peut être raison. Mais, intrigué par votre commentaire, je suis aller lire l’article. Enfin…..Le consulter. Parce que quand j’ai vu que l’auteur était A L, je ne suis pas aller plus loin. Nous avons régulièrement des problèmes avec cette responsable d’agence du secteur de Vitrolles qui est, comment dire ça diplomatiquement…….. Très laudative envers les maires des communes de sa “locale”…………. Sur un dossier ou nous avions obtenu la fermeture du club de tir de Gignac, fait arrêter une décharge du Btp sur le site, saisir 47 armes de seconde catégorie, je l’avais appelé pour la “clasher” suite à son attitude.
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