JO 2024 : le sevrage est brutal !
Une seule médaille (d’argent) gagnée, et une autre assurée, c’est peu pour les nouveaux standards du sport français. Le judo et l’escrime n’ont pas procuré ce jeudi leur écot quotidien. Cela ne durera pas!
L’enthousiasme du public n’a pas trouvé ce jeudi trop de prétextes à s’exprimer. Le programme doit d’abord écluser les tours de qualification, et les grands rendez-vous ont surtout réservé leurs places pour le prochain week-end.
Deux médailles tout de même pour l’apéritif. Le jeune kayakiste Titouan Castryck (19 ans à peine) a échoué à deux dixièmes du titre, qui lui a été arraché par Giovanni De Gennaro. L’Italien a bien du mérite car il n’avait pas eu le loisir de s’entraîner à fond pendant trois ans sur le parcours de Vaires-sur-Marne comme son jeune rival.
Une autre médaille est assurée, sans qu’on en connaisse pour l’instant la couleur. Le boxeur Sofiane Oumiha (moins de 663,5 kg) s’est brillamment qualifié pour les demi-finales, et il obtiendra au pire une médaille de bronze. C’est un brillant styliste qui pourrait inspirer de nombreuses vocations dans cette discipline à l’action méritante.
Pas de récompense pour les fleurettistes françaises, plombées par la défaillance de leur star supposée, Ysaora Thibus. Alors qu’il reste trois épreuves à disputer, le bilan de l’escrime nationale à Paris (6 médailles) est déjà meilleur que celui de Tokyo (5 médailles). Pas de médaille non plus en judo, et toujours pas de titre, mais il reste là encore trois épreuves à disputer. Les Français ont le même nombre de médailles (7) que les Japonais, qui ont déjà trois titres, il est vrai, mais qui ont connu eux aussi une journée blanche jeudi 1er août.
Les défaites prématurées des représentants tricolores ont laissé des créneaux disponibles dans les programmes TV, laissant un peu de temps pour réfléchir à tout ça.
On attendait beaucoup des filles du judo, compte tenu des précédents rendez-vous internationaux. Et pour avoir le droit de participer aux Jeux, à domicile, devant leurs entourages et leur public, il a fallu procéder à une sélection difficile dans au moins deux catégories. Marie-Eve Gahié (moins de 70 kg) a subi la concurrence de Margaux Pinot mais avait été choisie avant la finale des championnats du monde en mai dernier, où elle a été battue par sa rivale. Ce qui n’a pas remis en question sa sélection pour les Jeux, mais n’a pas dû améliorer sa confiance.
Pour départager Audrey Tcheuméo et Madeleine Malonga (en moins de 78 kg), les sélectionneurs ont même attendu le tout dernier moment et un affrontement direct qui a eu lieu là aussi aux championnats du monde. La rivalité entre les deux multi-médaillées a pris un tour nettement plus agressif, qui menace de durer un moment et de plomber encore l’ambiance.
Gahié et Malonga ont en effet été éliminées dès leur premier combat à Paris (par deux futures médaillées de bronze), sans doute affectées par la tension qui a régné autour de leurs sélections, comme si cela avait représenté le rendez-vous majeur de leur saison. Une forte concurrence est supposée augmenter le niveau et les chances de succès, et non pas représenter un handicap supplémentaire dans les catégories concernées.
La Fédération de judo est réputée pour ses résultats et son exigence. Elle devra sans doute se pencher sur ses critères de sélection et la gestion du calendrier de ses meilleures championnes. Elle leur assure déjà un salaire en négociant des contrats de fonctionnaires, souvent dans l’armée. Des primes de victoire dans les grandes compétitions qui fleurissent tout au long de l’année. Ce qui présente l’inconvénient de dévoiler les petits secrets de fabrication (ce que ne font pas les Japonais, par exemple), mais procure l’avantage de préparer l’affrontement avec les plus dangereux adversaires.
Il faut également s’adapter en permanence aux changements de pratique. Le travail au sol, les immobilisations ne surprennent plus les combattants qui s’en dégagent plus aisément. En revanche, la simplification des notations a sans doute été portée trop loin. Par le passé, il y avait trois grades dans les points marqués (koka, yuko, waza-ari), et autant dans les pénalités. Aujourd’hui, un seul type de point ou de pénalité, ce qui modifie la gestion d’un combat. Les arbitres hésitent à accorder un avantage, qui peut être décisif dans la prolongation, et ne barguignent pas pour balancer des cartons jaunes dont l’accumulation peut être fatale. Tout cela ne favorise pas les attaquants autant qu’on aurait voulu.
Du coup, les jeunes, que la concurrence a mal évalués et qui s’engouffrent dans une possibilité d’accéder à la notoriété, viennent chambouler les hiérarchies. Ce dont ont profité plusieurs Français, et dont ont pâti plusieurs Françaises.
La faible concurrence médiatique a permis à la gymnaste américaine Simone Biles de monopoliser les écrans, ce qu’elle mérite assurément pour avoir remporté un deuxième titre olympique du concours général, avant d’envisager une moisson de récompenses à l’issue des finales par appareils. Elle a su surmonter de nombreuses épreuves personnelles, et a parfaitement assumé sa position symbolique dans les débats sur les agressions sexuelles dont les jeunes filles peuvent être les victimes, ainsi que sur le combat contre les problèmes psychologiques provoqués par la haute compétition. Et elle n’en est pas moins une formidable sportive, tout à fait digne de son immense popularité.
En jetant un œil sur les premières épreuves d’athlétisme, les 20 km marche, il est loisible de comparer ces efforts, parmi les plus longs et les plus exigeants imposés à des corps humains aggravés par la menace de sanctions arbitrales souvent contestables, avec la brièveté de l’engagement d’un nageur sur 50 m. Florent Manaudou peut en trois courses, disputées en à peine plus de 21 secondes chacune, monter sur une hauteur de l’Olympe. Il n’a pas toujours convaincu qu’il avait bien accepté les exigences, relativement supportables, réclamées par l’entraînement d’un sprinteur. Il s’est souvent contenté d’utiliser l’immense talent que la nature lui a donné, et s’est peut-être, sans doute, privé d’une carrière plus impressionnante. Il a réussi à tirer un grand bénéfice pendant une douzaine d’années de ces petites minutes d’effort.
Chacun vit sa vie comme il l’entend, et il a bien profité des douceurs de l’existence.Manaudou semble s’être aperçu à l’issue de sa demi-finale du 50 m (qualification de justesse avec le 8e temps) que le 4e podium consécutif qu’il convoitait lui filait entre les doigts, avec toutes les conséquences délicieuses qui auraient pu en découler. Le champion est fier, on le sait, mais il s’agit d’une qualité qui n’est pas rare chez les autres concurrents, même moins talentueux.
Maxime Grousset, qualifié pour la même finale du 50 m avec le 6e temps, a renoncé à y participer pour préserver ses chances sur le 100 m papillon dont les séries et les demi-finales auront lieu le même jour.
Dans le clan des bosseurs, Léon Marchand des quatre saisons se rapproche d’un quatrième titre, sur 200 m 4 nages, après ses médailles d’or sur 200 m papillon et 200 brasse. Mewen Tomac a obtenu la 4e place du 200 m dos, comme aux championnats du monde 2023. Les Français ne sont pas mauvais sur 200 m, pas vrai Florent ?
VIGNETTES
¤ Deux fois médaille d’argent d’un décathlon olympique, deux fois champion du monde et recordman mondial, Kevin Mayer a annoncé son forfait à la veille du début de l’épreuve. Il a déclaré avoir été vaincu par son corps, qui ne lui avait pourtant pas trop mal servi jusqu’à présent. Le Français aura-t-il la possibilité de réparer sa machine, pour poursuivre sa carrière, peut-être jusqu’au Jeux de Los Angeles, quand il aura 36 ans ? Il devra pour cela se mettre d’accord avec ses sponsors et ses conseillers en communication. Il devrait peut-être en changer tant il a pu agacer avec la prolifération de ses communiqués médicaux et de ses jérémiades un public qui était sous le charme de son talent et de son implication.
¤ L’adversaire italienne d’une boxeuse algérienne a créé une polémique en abandonnant rapidement son combat en huitième de finale des moins de 66 kg pour ne pas se mettre en danger tant Imane Khelif cognait fort. Ce dont la plupart de ses rivales ne s’étaient pas plaintes jusqu’ici. Un taux trop élevé de testostérone alimente le soupçon que l’Algérienne serait un homme (ou pire un “trans”), sur fond de bagarre entre le CIO et la Fédération internationale de boxe. Les coups bas font mal aussi chez les femmes. Chez les moins de 50 kg, la Française Wassila Lkhadiri s’est qualifiée pour les quarts de finale, à une victoire de la médaille.
¤ Surprise au tennis, avec l’élimination en demi-finale par la Chinoise Zheng Qinwen de la n°1 mondiale, la Polonaise Iga Swatiek, double tenante du titre à Roland-Garros. Les récents finalistes du simple messieurs, le Serbe Novak Djokovic et l’Espagnol Carlos Alcaraz, se sont pour leur part qualifiés pour les demi-finales du tournoi olympique. Battu en quart de finale du double, le Britannique Andy Murray a annoncé la fin de son admirable carrière. Il reste le seul double champion olympique en simple.
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