“Was it hard in Calais ?” Le préfet rencontre les migrants de la Croix-Rouge
Comme le révélait Marsactu mardi, une centre d'accueil et d'orientation pour migrants a ouvert à Marseille. Ses premiers résidents sont arrivés de Calais vendredi matin. Soucieux de faire taire les critiques, le préfet de région et le préfet à l'égalité des chances se sont rendus sur place pour leur souhaiter la bienvenue.
“Was it hard in Calais ?” Le préfet rencontre les migrants de la Croix-Rouge
Juché sur une petite colline, à la frontière d’Allauch, entouré de verdure, le centre de formation offre en cet après-midi ensoleillé tout d’un lieu de repos. N’eut été la voiture de police sagement stationnée à l’ombre d’un pin, devant le portail, les véhicules de journalistes qui occupent le parking, puis la voiture du préfet de région qui arrive silencieusement à l’heure du café. Vingt jeunes hommes ont été installés tôt ce vendredi dans ce bâtiment pour y trouver du répit après avoir vécu dans la jungle de Calais.
Leur jour et horaire d’arrivée avaient été tenus secret, même si Marsactu avait evoqué la possibilité de ce timing mardi. De même, l’association SARA, choisie pour leur prise en charge, recommande de ne pas trop ébruiter l’adresse exacte du lieu, “pour éviter les curieux” et ceux qui pourraient avoir une attitude peu “respectueuse”. Comprendre en sous-texte, les riverains alertés par le maire de secteur Front national de ces invités peu désirés. “Tout ça pour 20 personnes dans une ville qui en compte 800 000 !, souffle le préfet à l’égalité des chances Yves Rousset. On n’est pas dans une logique politique, il aurait été totalement anti-républicain de ne pas mettre ce centre d’accueil ici parce que le maire est Front national. Ici on a des locaux, une association qui connaît la question”.
L’association SARA n’apprécie guère ce coup de projecteur soudain qu’elle juge surtout infondé. “Cela fait cinq ans que l’on loue cette partie du centre pour de l’hébergement d’urgence de demandeurs d’asile. On n’a pas été remarqués jusqu’ici, cela doit être qu’on fait bien le travail”, ironise son directeur Sylvain Rastoin.
“Guerre”, “bombardements” et “pays des droits de l’homme”
Afghans pour la plupart, mais aussi Irakiens, Iraniens et Soudanais, les accueillis ont entre 17 et 27 ans. Ce matin, ils ont été reçus par un petit-déjeuner, puis ont passé un examen médical. Après un repas, ils observent avec curiosité la visite dont ils sont l’objet. Dans la salle qui leur sert de cantine, ils se tiennent debout, les uns derrière les autres comme pour une photo de classe. Leurs jeunes visages affichent les sourires embarrassés de rigueur. Les flashes crépitent, les micros se tendent vers eux et ils ne bronchent pas, prennent même la parole les uns après les autres pour dire leurs âges, leurs professions, les raisons de leur arrivée en France. “Guerre”, “bombardements”, mais aussi “pays des droits de l’homme” égrène la traductrice qui jongle entre français, pachtoune et farsi.
L’accueil qui leur est ici proposé est le même qu’ont reçu ceux hébergés à Istres depuis octobre : celui d’un centre d’accueil et d’orientation, dispositif créé pour répondre à l’afflux de migrants en Europe, et plus précisément pour répartir sur le territoire les plusieurs milliers d’entre eux qui se regroupés aux portes de la Grande-Bretagne. “La politique nationale consiste à vider la jungle de Calais” explique Yves Rousset. Ainsi donc, cet accueil n’est qu’une étape dans leur parcours migratoire, qui a pour but, précise-t-il de “leur proposer des choses positives”. C’est à dire les accompagner dans leurs démarches pour régulariser leur présence en France, par le dépôt d’une demande d’asile principalement, avant qu’ils ne rejoignent les autres dispositifs d’accueil existants s’ils y sont éligibles – et si des places sont disponibles. “À Calais ils étaient tous volontaires, personne ne monte dans le car avec une baillonnette dans le dos” assure le préfet Rousset.
“How many time did you stay in Calais ?”
Son collègue préfet de région, Stéphane Bouillon, met aussi les formes dans cette visite, en représentant de l’Etat ouvrant ses portes à ces jeunes qui rêvaient pourtant de Londres “parce qu’on nous a dit que c’était mieux” reconnaissent-ils, comme repentis de leur volonté passée. “How many time did you stay in Calais ?” demande-t-il dans un anglais hésitant mais volontariste à deux cousins afghans. Ramin, pas même vingt ans, rêve de faire des études de médecine et a passé 4 mois dans la jungle. “It was hard ?” relance le préfet d’un ton compatissant.
Mais si les représentants de l’Etat s’appliquent tant à montrer un accueil chaleureux, ce n’est peut être pas seulement pour faire la nique au maire de secteur Stéphane Ravier. Car les critiques ne viennent pas seulement des voisins inquiets de voir de potentiels “envahisseurs” dans ce paisible quartier de la Croix-Rouge. Pour des raisons certes opposées, les associations d’aide aux migrants voient aussi d’un œil très critique ces dispositifs transitoires créés à la hâte par le gouvernement qu’elles qualifient de “centres de tri”.
Car même au sein de ces lieux dits “de répit”, la loi s’applique. Et notamment, le très contesté règlement européen Dublin, qui dit que toute personne venue demander l’asile en Europe doit obligatoirement le faire dans le premier pays de l’UE qu’elle a traversé – et où ses empreintes ont été enregistrées par les autorités. Pour les hébergés concernés, et ils sont souvent nombreux, la conséquence est une “réadmission” vers cet autre pays, l’Italie, l’Espagne, la Grèce, la Hongrie… “La loi sera appliquée, mais avec discernement, on va prendre le temps d’analyser chaque situation au cas par cas” promet Yves Rousset qui renchérit : “Si nous appliquions le règlement Dublin drastiquement, une camionnette de police serait déjà là”.
“Être un lieu d’assignation à résidence, ce n’est pas notre job”
Le directeur de Sara, quant à lui, entend les critiques faites aux CAO : “Les associations comme la Cimade sont dans leur rôle. Nous, nous ne faisons pas de politique : on aide, on protège. On n’est pas naïfs, la loi va s’appliquer. Mais les personnes qui sont là, elles sont mieux que dehors.” Sylvain Rastoin ajoute avoir pris le temps d’examiner le contenu de la mission confiée à l’association : “Quand l’État nous a demandé de mettre en place ce CAO on a pu poser nos questions. Certaines réponses ont été douloureuses, mais c’est la loi. Par contre, être un lieu d’assignation à résidence, ce n’est pas notre job. Si on nous avait dit “Fliquez, notez les horaires d’entrées, de sortie”, ça aurait été non. Les résidents sont libres de leurs allées et venues, ils ont leurs clés.”
Les studios et chambres du centre devraient accueillir des migrants, toujours dans la limite de 20 personnes à la fois, pour une durée indéterminée. À moins qu’il ne reçoive une autre attribution de l’État pour un autre mode d’accueil de demandeurs d’asile. En tout cas, prévient le préfet à l’égalité des chances : “Il y aura d’autres projets de ce type dans la région, 150 personnes sont en ce moment accueillies en CAO.”
Dans les couloirs un peu mornes du centre de la Croix-Rouge, les jeunes semblent en tout cas déjà à leur aise, allant d’une chambre à l’autre en attendant le départ des visiteurs médiatiques. Après avoir serré la main de chacun, Stéphane Bouillon lance un “good luck !” convaincu à la cantonade.
Commentaires
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Bienvenue à eux. Le 13-14, ça sent pas très bon mais c’est quand même mieux que la jungle de Calais ou ce qu’ils vivent dans leur pays. Et puis il n’y a pas que des fachos dans ce quartier (même s’ils sont probablement nombreux). Il y a aussi des gens normaux, qui se souviennent d’ou ils viennent, et qui sont peut-être même contents de pouvoir accueillir leur part de misère du monde. Le vivre en vrai, c’est mieux que de le subir devant sa télé.
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Même s’il s’agit d’une infime partie des réfugiés, bravo au Préfet de les avoir rencontré, à Stéphane Mari pour sa déclaration bienveillante, blâme à Ravier pour ses insultes répétées à tout ce qui touche à l’humanité, que dire de Christophe Masse qui incapable de se positionner cherche toujours à s’afficher dans le sens du vent.
Bon, dans tout cela, le Pape a des longueurs d’avance et je vais me mettre à croire à nouveau
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Pourquoi les empêcher de traverser le Channel ?
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Le Royaume-Uni n’appartenant pas à l’espace Schengen, les contrôles aux frontières sont donc systématiques pour y parvenir. Les accords du Touquet entre France et Grande-Bretagne stipulent que les contrôles doivent se faire depuis le pays de départ, donc, pour ce qui concerne les migrants de Calais, sur le territoire français.
http://www.franceinfo.fr/emission/expliquez-nous/2015-ete/expliquez-nous-les-accords-du-touquet-03-08-2015-07-20
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