Fatima, 85 ans, délogée et contrainte de quitter son hébergement d’urgence

Actualité
le 21 Mar 2024
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Devant le tribunal administratif, une ancienne locataire de la rue Bossuet conteste la décision de la Ville de mettre fin à son hébergement d'urgence. L'appartement où elle vivait a été détruit par un incendie, le 24 décembre dernier. La Ville estime qu'elle a systématiquement refusé les propositions de relogement qui lui étaient faites.

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L'immeuble de la rue Bossuet est actuellement en travaux. (Photo : BG)

L'immeuble de la rue Bossuet est actuellement en travaux. (Photo : BG)

Trois petits mois. Le 15 mai prochain, Fatima Dari devra avoir quitté l’appart’hôtel où elle est hébergée depuis la nuit de Noël dernier. Ce soir-là, l’appartement où elle vivait depuis près de 20 ans, au 24, rue Bossuet, est ravagé par les flammes. Celui de son voisin, situé juste au-dessus du sien, est soufflé par une explosion de gaz. Elle est évacuée quelques minutes plus tard par les pompiers. Fatima Dari est blessée au pied, avec fracture et brûlure au troisième degré. Son voisin est découvert mort quelques minutes plus tard.

Le maire, aussitôt prévenu, se rend sur place. Benoît Payan poste un message de condoléances sur les réseaux sociaux. “Marseille se tient à vos côtés”, écrit-il à l’attention des victimes et de leur famille.

Après une première hospitalisation, Fatima Dari est hébergée dans un logement temporaire, comme c’est habituel en cas de sinistre. La procédure est bien rodée depuis la vague d’évacuations qui a suivi les effondrements de la rue d’Aubagne. La Ville prend à sa charge l’hébergement d’urgence en cas d’arrêté de mise en sécurité, en lien avec le propriétaire. C’est lui qui a l’obligation d’héberger, voire de reloger ses locataires en cas de péril grave et imminent.

Mais dans le cas de Fatima Dari, la machine bien huilée semble soudain se gripper. Ce lundi 18 mars, la vieille dame était représentée par Pierre Le Beller, en audience de référé devant le tribunal administratif de Marseille.

Procédure en urgence

L’avocat conteste la décision de la Ville, actée par un courrier du 15 février dernier, de mettre fin à l’hébergement de la locataire. En parallèle, il a lancé la même procédure contre la propriétaire de celle-ci. “La Ville y estime que la bailleresse de Fatima Dari est libérée de ses obligations de prise en charge, plaide Pierre Le Beller, devant la juge du tribunal administratif. Elle lui donne 90 jours à titre exceptionnel. Cela veut dire que le 15 mai, ma cliente devra avoir quitté son hôtel”.

L’avocat décrit une personne “en choc post-traumatique“, qui a tout perdu lors de l’incendie. Elle se relève à peine d’une greffe de peau, subie en février dernier. “Ma cliente vit avec des ressources très faibles, 900 euros de retraite, explique l’avocat. Elle a fait des démarches pour trouver un nouveau logement, mais ça ne passe pas en raison de son âge“. Il conteste donc l’éviction prochaine de sa cliente à “une période où les bailleurs préparent la saison estivale et les JO“.

Elle se déplace aujourd’hui en fauteuil roulant ou avec un déambulateur, souligne encore l’avocat. Elle a besoin d’une protection particulière ou au moins d’une oreille attentive“. Pour lui, elle ne les a pas eues de la part de la Ville ou de sa propriétaire. Cette dernière estime avoir été dégagée de ses obligations “dès le 9 janvier“, après 17 refus d’appartements dont la liste a été soumise à Fatima Dari par le responsable de la gestion locative de l’immeuble. “5, 10, 20, 30… On s’y perd. Mais ces biens étaient-ils adaptés aux besoins ?“, reprend Pierre Le Beller. Pour lui, sa cliente aurait au moins accepté l’un des trois appartements visités par sa fille. “Mais on nous répond sur rien“, argue l’avocat.

12 refus de propositions

En face, comme c’est souvent le cas en référé, la Ville a commis une fonctionnaire du service juridique. Elle n’est donc pas là pour plaider et tâche de s’en tenir aux faits. “La Ville de Marseille a tenu compte de la situation de madame Dari. Elle n’est pas seule. Elle est accompagnée par sa fille et sa petite-fille. Elle est aussi suivie par l’Adrim, l’association que la Ville a mandatée pour l’accompagner dans ses démarches. Nous avons tout à fait conscience que la vie dans un appart’hôtel n’est pas adaptée”.

En revanche, pour la fonctionnaire, il y a un doute sur la volonté de la locataire de retrouver un hébergement durable. “Elle a répondu que l’appartement de la rue Molière était inacceptable. Or, il semble tout sauf inacceptable“, formule-t-elle. Selon la Ville, 12 appartements ont donc été refusés sans justification alors qu’ils étaient adaptés à sa situation. La loi prévoit que le bailleur peut s’estimer libéré de ses obligations après trois refus. “Seuls trois ont été visités, alors que la locataire bénéficiait d’un accompagnement très important. La Ville de Marseille a pris sa décision en tenant en compte de ces éléments“. Le tribunal devrait se prononcer d’ici une semaine.

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