Pour “aider Marseille”, la région finance la métropole et recale la mairie

Décryptage
le 7 Déc 2023
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La métropole va bénéficier de 180 millions d'euros pour 30 projets dans le cadre de la politique régionale d'aide aux intercommunalités. Candidat à un contrat à part le maire de Marseille se voit répondre que sa demande est trop tardive.

Renaud Muselier et Martine Vassal au conseil département en octobre 2023. (Photo : Emilio Guzman)
Renaud Muselier et Martine Vassal au conseil département en octobre 2023. (Photo : Emilio Guzman)

Renaud Muselier et Martine Vassal au conseil département en octobre 2023. (Photo : Emilio Guzman)

Trop tard, Martine Vassal a tout raflé. C’est en substance la réponse de Renaud Muselier au maire de Marseille Benoît Payan (divers gauche), qui réclamait “un contrat de financement dédié à notre projet de transition verte”. La région, institution présidée par l’élu Renaissance, va en effet débloquer 180,7 millions d’euros pour financer un plan d’investissement métropolitain de 550 millions jusqu’en 2027. Après les métropoles de Nice et Toulon ces derniers mois, la métropole Aix-Marseille Provence, présidée par Martine Vassal (divers droite), bénéficie ainsi du dispositif “Nos territoires d’abord”. Une paille, dans les 10 milliards de projets divers accumulés par la métropole ces dernières années. Sous ses airs arides, le document de 47 pages donne l’occasion à un nouvel épisode de tension entre les trois responsables politiques, dont deux sont désormais alignés pour ravir la mairie au troisième en 2026.

Après la coupure du Covid et du renouvellement des assemblées, ce contrat fait office de suite à une première génération. En 2017, Jean-Claude Gaudin avait eu son “CRET”, pour contrat régional d’équilibre territorial. La toute jeune métropole avait alors récolté 120 des 370 millions d’euros répartis sur l’ensemble des 29 intercommunalités du territoire régional. Entre-temps, la chasse aux sigles a eu raison du CRET, mais le caractère très politique est resté. Au point que ce plan “Nos territoires d’abord” partage son nom avec le parti local de Renaud Muselier, lancé en 2022…

Pas “le moindre dossier déposé”

Dans un courrier, daté du 29 novembre dernier, le maire de Marseille réclamait d’entrer dans la partie – et non le parti – “à l’instar de la Ville d’Aix-en-Provence et de la métropole Toulon Provence Méditerranée”. Une date qui s’explique surtout par la communication aux élus métropolitains du contrat proposé au vote ce jeudi 7 décembre, grince-t-on à la région, où l’on fustige un réveil tardif.

Ni vous, ni vos élus, ni votre administration, n’avez déposé le moindre dossier, pris la moindre initiative en ce sens

Renaud Muselier dans sa lettre au maire de Marseille

“Permettez-moi de vous dire que je suis particulièrement surpris de vous voir réagir, 3 ans et 5 mois après, à la proposition que je vous ai faite le 20 juillet 2020 publiquement, à savoir la mise en place d’un contrat de centralité avec la Ville de Marseille doté de 42,8 millions d’euros”, écrit Renaud Muselier dans un courrier en réponse. En effet, “ni vous, ni vos élus, ni votre administration, n’avez déposé le moindre dossier, pris la moindre initiative en ce sens”, insiste-t-il.

Dans son courrier, communiqué à la presse non sans gourmandise, l’élu Renaissance rabroue la sollicitation municipale, en regrettant l’usage de l’acronyme abhorré “PACA” et déplorant une erreur sur l’intitulé du dispositif. Nos territoires d’abord s’adresse aux intercommunalités, souligne l’élu, “le contrat de centralité étant le dispositif adapté aux communes, ainsi que pourra vous le confirmer votre administration”.

Règles cousues main

Ce faisant, le président de la région fait siennes ses propres règles mouvantes : c’est lui qui, avait accepté en 2020 de faire une entorse à son cadre classique, tourné vers les métropoles et autres communautés d’agglomération, en promettant une enveloppe à la Ville de Marseille, puis en acceptant de voir dans la Ville d’Aix une autre “centralité”. Deux municipalités qui partagent la caractéristique d’être opposées pour des raisons diverses à l’exécutif métropolitain…

Quand il veut aider, il y arrive. Quand il ne veut pas aider, il sait aussi trouver des excuses“, résume-t-on dans l’entourage du maire, où l’on évoque “plusieurs tentatives qui ont essuyé des refus et des freins”, jusqu’à une procédure au tribunal administratif pour contester l’aide aux commerçants impactés par les émeutes de l’été 2023.

Reste que la proposition publique, formulée en réalité dès juin 2020 avant le second tour des municipales, n’avait jusqu’à présent pas reçu de réponse publique. En toute fin de mandature, dans un jeu bien huilé, la précédente majorité avait communiqué une liste de 17 “projets verts” susceptibles d’entrer dans le “contrat de centralité”. Le réaménagement du parc balnéaire du Prado, objet d’une promesse de campagne de Martine Vassal, se taillait la part du lion avec 16 millions d’euros de subvention, aux côtés de rénovations énergétiques multiples et de projets dans des parcs.

53 millions “fléchés” vers des projets marseillais

Jean-Claude Gaudin avait même envisagé, un temps, de signer le document, avant que l’opération ne soit annulée. Depuis, cette enveloppe à 42,8 millions d’euros était restée suspendue et c’est finalement Aix-en-Provence qui a inauguré l’exercice en juin 2023, avec 20 millions d’euros décrochés. Las, la signature du contrat métropolitain refermerait donc la fenêtre utilisée par Aix. “On ne peut pas multiplier l’argent”, objecte-t-on dans l’entourage de Renaud Muselier.

La ville dirigée par Sophie Joissains (UDI) a d’ailleurs été soigneusement exclue des projets métropolitains financés par la région. Cette dernière considère à l’inverse que Marseille est servie avec 53 millions d’euros sur les 180 du contrat métropolitain “fléchés” vers des projets marseillais, comme la restructuration du MIN des Arnavaux, la voie verte de la vallée de l’Huveaune ou l’aménagement du quartier de la gare. Soit “onze millions d’euros supplémentaires” par rapport à l’enveloppe envisagée pour le contrat de centralité. Mais, au prorata d’Aix, les Marseillais auraient pu espérer 125 millions, calcule-t-on à l’hôtel de ville.

Aix a pu bénéficier du plan en tant que commune, mais aucun projet aixois n’est contenu dans l’envelope métropolitaine financée par la région.

Surtout, l’argent ne va pas dans la même poche, ni pour les mêmes projets. Sans se départir du cadre classique, qui fixe six axes éligibles (déchets, mobilité, énergies renouvelables, réhabilitation énergétique, sobriété foncière, aménagement durable et foncier économique, transition écologique et préservation du patrimoine naturel), le contrat aixois accompagne ainsi les priorités et les compétences communales : bibliothèque Méjanes, parc de la Torse, rénovation des écoles, complexe sportif Carcassonne, mutation du quartier du Faubourg… Il aurait donc pu en être de même pour la ville-centre. “Pour l’institution Ville de Marseille, c’est un manque à gagner, mais pour les Marseillais ce n’est pas le cas”, insiste-t-on à l’hôtel de région. Cette année encore, dans son budget 2024, voté le 15 décembre, la Ville constatera le montant en constante érosion des subventions reçues.

Sans Aix et malgré 53 millions pour Marseille, les 30 projets du contrat métropolitain mettent surtout l’accent sur les villes moyennes. Lourde de 7 milliards d’euros d’envies pas forcément financées accumulées ces dernières années, l’armoire à cartons se déleste ainsi de quelques morceaux choisis. Du transport par câble vers l’aéroport de Vitrolles au pôle aéronautique d’Istres, en passant par la station d’épuration de Salon et le pôle d’échange de Miramas, il peut être lu comme un rattrapage auprès des soutiens de Martine Vassal, après le milliard du plan Marseille en grand apporté par l’Etat pour les transports et bénéficiant majoritairement à la ville centre.

Mais le balancier n’est jamais arrêté. Quatre ans après avoir fait voter la dernière rallonge d’un “plan pour Marseille” à 200 millions d’euros, Martine Vassal s’est dite prête à engager une somme équivalente, en provenance des caisses du département des Bouches-du-Rhône. La course aux millions se poursuit.

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Commentaires

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  1. Peuchere Peuchere

    Quand il veut aider, il y arrive. Quand il ne veut pas aider, il sait aussi trouver des excuses“
    Quand on veut être aidé, on y arrive. Quand on ne veut surtout pas être aidé pour pouvoir continuer à “pleurer” et à se plaindre sans arrêt, on sait toujours trouver des excuses.
    La Mairie de Marseille, comme du temps de Gaudin, est adepte de la deuxième solution.
    C’est à pleurer

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  2. Manipulite Manipulite

    Muselier fait une réponse de guichetier à la Ville de Marseille. Un peu court pour cacher sa hargne contre la municipalité de gauche.
    C’est fréquent. Il a « oublié » dans le dossier présenté pour les JO climaticides, la patinoire de Marseille qui est la plus grande de France.

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  3. petitvelo petitvelo

    Si région et département urbanisent plus les alentours que l’hyper-centre, c’est l’occasion pour les marseillais et les entreprise de déconcentrer leur occupation et de s’éloigner du centre pour une occupation mieux répartie du territoire, avec des petites villes centre. En échange, les marseillais qui resteront pourront avoir plus d’espace verts, d’espace de culture et d’élevage, d’espace d’activité industrielle locale.

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  4. Massilia fai avans Massilia fai avans

    Ce qui m’étonne le plus dans cet article, c’est qu’en 2023 on est toujours régi par le fait du prince. L’article ne précise pas quelle est la gouvernance qui alloue nos impôts à telle ou telle demande. Mais tout le monde trouve ça normal en fait

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    • Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

      L’enchevêtrement institutionnel français, auquel aucun étranger normalement constitué ne comprend quoi que ce soit, permet ainsi aux Régions de financer les communes et les intercommunalités, aux départements de financer les communes, aux métropoles de faire de même…

      Ce serait mieux que l’argent public soit mis d’emblée là où il est nécessaire plutôt que de transformer en guichet à subventions une partie des institutions et de permettre que leurs compétences se recouvrent mutuellement.

      Et s’agissant d’argent public, il conviendrait que les critères d’attribution soient publics et transparents. Mais je sais que je formule là un vœux pieux : si l’on supprime le fait du prince, comment nos roitelets et reinelettes pourront-ils acheter leur réélection ?

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    • julijo julijo

      oui, et pour poursuivre, c’était exactement ce que voulait defferre (qui était tout ce qu’on voulait, mais surtout un fin politique un peu pervers) avec sa grande loi de décentralisation de 1982.
      en quelque sorte rendre un “pouvoir” aux communes, régions… afin que les citoyens (électeurs !) soient au plus près des décisions.
      il savait bien, le politicien madré, que le clientélisme allait atteindre un niveau excellent. et comme dit plus haut, que les institutions locales, aujourd’hui métropole et région, allaient se transformer en guichet à subventions. et cela donne lieu à une redistribution économique efficace vers les amis des présidents de ces institutions.
      en langage courant : le fait du prince. et tout ça dans la plus parfaite légalité et le plus profond respect de ces mêmes institutions !

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  5. barbapapa barbapapa

    Une évidence : Vassal et Muselier se comportent en véritables traitres à Marseille

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  6. BRASILIA8 BRASILIA8

    On se croirait dans une cour d’école, malheureusement il s’agit de notre argent et ces enfantillages ne devraient pas se produire de la part d’élus .
    Ils est sur qu’ils font tout pour mettre la main sur la mairie de Marseille mais jusqu’à preuve du contraire ce sont les électeurs qui décident

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  7. Zumbi Zumbi

    La médiocrité ne cesse de descendre à des niveaux de plus en plus bas, il va falloir que Muselier subventionne des forages pour continuer sous terre !
    Le seul résultat prévisible est qu’un peu plus d’électeurs refuseront de croire à ses trémolos “républicains” lorsqu’il viendra quêter leurs voix pour un nième deuxième tour de “barrage” à un parti sur lequel la majorité présidentielle s’aligne de plus en plus souvent.
    Mais c’est pas grave, l’essentiel est qu’on aille dans le mur avec des Jeux Olympiques du désastre climatique, avec une patinoire — olympique, putaing ti as vu, ça rigole pas, hé — à Nice. On va pouvoir jouer “les Niçois à Dubaï” sur place.

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