Mes châteaux d’If: Indiana sans Jones
Mes châteaux d’If: Indiana sans Jones
L’ennui avec la rentrée littéraire, phénomène incomparable dans le monde, c’est que c’est aussi celle de Bande dessinée, devenue un genre majeur. Enfin c’est moi qui le dit. Et ce depuis longtemps quand je dévorais Astérix ou Achille Talon. Donc beaucoup de livres sortent comme des flèches des mâchicoulis du château éditorial. Et toc…vous ne direz plus après qu’on apprend rien avec la Bd.
Désormais, les auteurs passionnés de littérature font passer des œuvres difficiles par la case BD. C’est le cas avec les talentueuses Bouilhac et Catel qui se sont entichés du premier roman de Georges Sand. Comme il est de coutume au 19 ème siècle, une jeune femme créole est mariée à un vieux troublon colérique et jaloux. La bougresse romantique et nunuche tombe amoureux d’un séducteur voisin qui ne pense qu’à conquérir les femmes. C’est son rôle dans la société de l’époque comme dans Mademoiselle de Jonquieres, joués par Edouard Baer et Cécile de France, film inspiré d’un récit de Denis Diderot. A ce propos, le jeune Emmanuel Mouret, la réalisateur, était élève au Lycée Thiers. Comme quoi, le lycée de l’élite du centre ville ne fabrique pas que des énarques. Déjà Pagnol y avait souffert enfant.
Notons qu’il y a un coté Mme Bovary dans ce texte. Et pour cause, l’époque est en France à l’enfermement des femmes. Vivre dans la bourgeoisie ne vous empêchait pas de mourir d’ennui mais le ventre plein, et des bondieuseries plein la tête. Avec un pareil tableau, les femmes se refusent à leur propre désir et les hommes affichent des tableaux de chasse. Triste époque.
On connait tous le magnifique travail de Catel avec Kiki de Montparnasse, Joséphine Baker ou Olympes de Gouges. J’ai particulièrement aimé son travail sur René Goscinny, le père d’Astérix, du petit Nicolas et des meilleurs albums de Lucky Luke- je rajoute pour les billes en bd- et paru chez Grasset, le Roman des Goscinny.
Dans Indiana, sorte de copie raffinée d’Isabelle Adjani, c’est Claire Bouilac qui est plutôt au dessin. Indéniablement, il y a un beau travail tant sur les personnages que les décors, de la Brie ou de Paris. Paradoxalement, elle n’ a sans doute pas été palefrenière car elle est moins à l’aise avec les chevaux. Le personnage de Noun, amante du godelureau nommé Raymon de Ramière, semble tout droit sorti d’un Sylvain et Sylvette avec ce foulard rouge. On est cependant très à l’aise avec l’image et le texte. Jamais l’œil ne force comme dans un vieil Alix première main quand Jacques Martin nous anéantissait de précisions historiques longues comme le bras de César tendu au dessus d’ Alesia.
Cette œuvre, pleine de rebondissements et qui raconte une époque corsetée, avec son lot de mépris pour les noirs,l’exploitation à la Réunion (Ile Bourbon), ou les affaires des patrons de l’époque, permet de découvrir un roman méconnu et difficile d”accès. Demandez aux collégiens qui sont obligés de se fader Georges Sand alors qu’ils ne comprennent que Jul.
Pour l’ambiance de l’époque, on retrouve celle d’ Eugénie Grandet de Balzac, ou d’Armance de Stendhal. Une douce époque d’une tristesse éprouvante dans les campagnes du nord de la France, entre Rouen et le Berry. Brrr…j’ai un frisson rien que d’y penser.
Indiana, Georges Sand, Catel, Bouilhac, Dargaud, 176 Pages,25,50 euros, 09/23
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