À Thiers, les lycéens marseillais se mobilisent aussi contre la réforme des retraites

Reportage
le 8 Mar 2023
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Plusieurs dizaines de lycéens s'étaient donnés rendez-vous ce 7 mars aux aurores au lycée Thiers pour bloquer l'établissement. Ils expliquent agir par crainte pour leur avenir, mais aussi en solidarité avec leurs parents.

Le lycée Thiers, dans le 1er arrondissement, était bloqué par ses élèves pour la journée de mobilisation du mardi 7 mars. (Photo : LG)
Le lycée Thiers, dans le 1er arrondissement, était bloqué par ses élèves pour la journée de mobilisation du mardi 7 mars. (Photo : LG)

Le lycée Thiers, dans le 1er arrondissement, était bloqué par ses élèves pour la journée de mobilisation du mardi 7 mars. (Photo : LG)

La France à l’arrêt ? Les lycées marseillais se sont passé le mot. Ce matin, les entrées des établissements Saint-Charles ou Victor-Hugo étaient bien silencieuses, en raison, d’abord, de la grève d’une part importante de leurs enseignants. À l’échelle académique, 34 % des professeurs de lycée étaient en grève, selon le rectorat. Une aubaine pour les lycéens les plus engagés. Plusieurs dizaines d’entre eux s’étaient donnés rendez-vous, dès 6 h 30, au lycée Thiers. L’objectif : bloquer le lycée, réputé très militant, pour permettre à “un maximum d’élèves” d’aller en manifestation, à la place des cours. Une expérience déjà tentée pendant la réforme de Parcoursup, en octobre.

Devant le lycée, c’est l’effervescence. Le blocus a réussi. Tout en laissant le passage aux étudiants en prépa, parce que “quand même, ils ont leurs examens dans quelques semaines”, explique Loulaï, 15 ans, venue en renfort du lycée Saint-Charles. En haut des marches, un petit groupe est fièrement posté à côté des grilles et des poubelles tagguées. Arno, Rayan et Guillaume* se charrient : “Ouais, toi t’étais surtout là pour sécher les cours !” Mais les trois élèves, en première à Thiers, déclarent qu’ils sont avant tout “là pour les retraites”. Gustave*, lui, explique que c’est aussi la réforme Parcoursup qui l’a motivé à se lever à 6h du matin.

“Les retraites vont nous toucher tôt ou tard”

Plusieurs dizaines d’autres lycéens les ont rejoints dans la matinée. “Travaille, consomme, et ferme ta gueule”, peut-on lire sur une des pancartes destinées à la manifestation au Vieux-Port. “Les retraites vont nous toucher tôt ou tard, on le voit déjà chez nos proches, nos parents”, explique Lucie, 17 ans, en terminale. Avec son groupe d’amis, elle attend le départ sur un banc de la place, à l’ombre des platanes. Meriem renchérit : “Ma mère est prof, mais elle a des soucis de santé. Si la réforme passe, elle devra partir non pas à 64 ans, mais à 70, pour avoir une retraite complète.”

Être lycéen leur permet surtout d’avoir “plus de temps et de liberté pour se mobiliser, discuter, manifester,” estime Juliette. “Enfin, malgré la pression des épreuves du bac dans quelques semaines”, sourit-elle. Le groupe est allé à toutes les manifestations précédentes. “Mais ce qui compte, c’est bloquer les raffineries, les transports”, nuance Jim.

“On a envie de se mobiliser, pour nous et pour nos parents.”

Vers 10 h, les mégaphones s’activent pour motiver les lycéens à descendre la Canebière. Le ton monte : un peu plus tôt, deux élèves des lycées Saint-Charles et Marseilleveyre se sont fait interpeler pour “dégradations”, pendant qu’ils étaient en train de tagguer la façade du bâtiment. Contactée par Marsactu, la préfecture de police a confirmé ces interpellations, qui a suscité une forte mobilisation devant le commissariat de Noailles au cours de la journée. Cette action des forces de l’ordre indigne Lola, présidente de la fédération indépendante et démocratique lycéenne (FIDL), qui déclare que “les graffitis étaient un fait collectif”.

Cela n’entame pas la motivation des dizaines de jeunes qui descendent vers le Vieux-Port. Ella et Loulaï, du lycée Saint-Charles, acceptent joyeusement des tracts pour les mobilisations féministes du 8 mars. Les deux jeunes filles considèrent que leurs familles seront “un peu moins touchées” par la réforme. “Mais c’est pas une raison de ne pas s’occuper des autres,” ajoute Loulaï, l’air déterminé. Pour elle, la réforme n’est “ni nécessaire, ni obligatoire : il y a plein de jeunes au chômage, de gens qui meurent avant la retraite… Est-ce que gagner des points de PIB c’est vraiment la priorité ?” Ella renchérit : “Même la jeunesse s’inquiète pour son avenir, c’est pas normal. On a envie de se mobiliser, pour nous et pour nos parents.” À 10 h 30, les groupes de jeunes convergent enfin vers le Vieux-Port pour rejoindre les autres manifestants, sûrement plus proches qu’eux de cette retraite qui s’éloigne.

*Les prénoms ont été modifiés.

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Commentaires

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  1. Malleus Maleficarum Malleus Maleficarum

    C’était vraiment nécessaire la dégradation de la façade ?

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    • P38 P38

      Clairement, non.
      Il faut cependant relativiser. Dans le quartier, les murs à hauteur d’homme de bcp d’immeubles du quartier sont régulièrement recouverts de tags, puis repeints, etc. Le mur adjacent a accueilli pendant des mois des collage antivax sans que ça n’émeuve quiconque.

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  2. P38 P38

    Vous avez écrit, en parlant du lycée Thiers, “réputé très militant”. Je pense que vous vouliez dire “peu militant”, raison pour laquelle des lycéens d’autres lycées (Victor Hugo, St Charles) sont venus réaliser le blocage. Non ?

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    • julijo julijo

      “réputé très militant” est peut être un peu fort. cependant, les lycéens du lycée thiers ont toujours été concernés par leur situation, et ont toujours avec st charles organisés des mouvements, grèves, ou blocages, selon le cas.

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  3. mrmiolito mrmiolito

    Sans aucun jugement par ailleurs, mais à titre d’information : à noter le tag visible sur la photo “ACAB” (“All Cops Are Bastards”, slogan anti-police international historique), qui rend généralement nerveuses les forces de l’ordre. Si ça a été tagué sous leur nez clairement c’était une provocation et pour le coup, les lycéens, ce tag là était hors sujet…

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  4. carole joseph carole joseph

    Je me questionne vis à vis de cette photo où les jeunes sont bien visibles et reconnaissables. J’espère que vous avez leur droit à l’image…avec ce que les jeunes vivent actuellement vis à vis des arrestations de certains d’entre eux, cela me semble dangereux pour eux.

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    • Patafanari Patafanari

      Bof, on ne voit que des mâles blancs.

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  5. pm2l pm2l

    La photo illustre parfaitement l’antiphrase que constitue le titre de l’article : “Les lycées marseillais” (dans leur globalité, sans plus de nuance que cela) “se mobilisent” … Et l’on voit une poignée de jeunes (une dizaine tout au plus) avachis sur des poubelles après avoir couvert la façade d’un monument historique d’injures n’ayant aucun rapport avec la réforme en question …
    Belle image d’une “mobilisation” unanime !
    J’ajoute, pour avoir vécu ces événements de près, que les “mobilisés” n’ont que très rarement été plus nombreux que sur la photo.

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