Dans les quartiers Nord, la longue grève de bus qui se fond dans la masse

Actualité
le 22 Déc 2022
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Depuis trois semaines, une grève perlée touche plusieurs lignes de bus des quartiers Nord. À la station Gèze, tout le monde n'a pas remarqué le mouvement, mais personne n'échappe aux retards récurrents. Les chauffeurs grévistes dénoncent justement la désorganisation du service.

Photo : Violette Artaud
Photo : Violette Artaud

Photo : Violette Artaud

16 h 30. Heure de pointe à la station Gèze. Les passagers qui descendent du terminus du métro se pressent sous le préau qui abrite les nombreux arrêts de bus. B2, 25,30,35,70,98… autant de lignes qui traversent le Nord de la ville, et plus particulièrement le 15e arrondissement. À l’arrêt du 70, qui finit sa course au lycée Saint-Exupery, Jawad Harras, capuche sur la tête, sort son téléphone de sa poche. Le jeune homme vient de recevoir une notification de la RTM. “Des perturbations sont à prévoir sur les lignes B2, 25, 30, 35, 36, 36B, 38, 70, 72, 95, 98”, lit-il dans une liste interminable avant de ranger, dépité, le téléphone dans sa poche. “De toute façon, c’est toujours comme ça.”

Depuis le début du mois de décembre, une grève est en cours au dépôt nord de la RTM, situé à Arenc. Sous forme de grève perlée, elle dure une heure tous les jours, un coup le matin de 6 h 30 à 7 h 30, et le lendemain en fin d’après-midi, de 16 h 30 à 17 h 30. Parmi les usagers, si certains ont été informés, d’autres ne l’ont même pas remarqué.

Travaux et retards

“Ah bon y’a une grève ? Non je n’avais pas remarqué, c’est toujours le bordel ici”, glisse une mère accompagnée de ses trois enfants, avant d’allumer sa cigarette pour patienter pendant sa correspondance. En ce moment, le temps d’attente de certains bus peut atteindre une heure. “Toutes les lignes du dépôt d’Arenc sont concernées, soit une trentaine de lignes, assure Nicolas Rougerie, de la CFDT RTM. Depuis septembre-octobre, il y a d’énormes travaux dans le secteur Nord, à Gèze notamment. Cela occasionne des retards d’autobus, on demande que les horaires soient revus.” 

À la station Gèze, le 25 se fait attendre. Photo : VA

Le chantier de l’extension de la ligne 3 du tramway vers le Nord a débuté en septembre et il a fait monter l’énervement des conducteurs. Le 21 novembre, la CGT de la RTM, qui soutient elle aussi les grévistes du dépôt d’Arenc, résumait la situation dans une publication sur sa page Facebook. Elle évoquait “des conditions de travail qui se dégradent de jour en jour (Gèze, marché aux puces, insécurité, zones sensibles….)” mais aussi “les conséquences des travaux rocambolesques prévus pour les 5 années à venir (forte circulation, retard, clients mécontents…)”

Outre la révision des horaires et l’ajout de bus qui va avec, les syndicats demandent une reconnaissance de la pénibilité pour les chauffeurs dans le secteur. Les trajets, précise Nicolas Rougerie, sont “systématiquement en retard”. Le préavis de grève court jusqu’à janvier. “Si même les chauffeurs se plaignent des retards, on s’en sort plus !”, commente Jawad, avant de courir prendre le 70 à l’autre bout de la station.

“Les revendications changent toutes les 5 minutes”

Contactée par Marsactu, la direction de la RTM estime que 70 % du service est désormais assuré pendant les heures de grève. Même si ce pourcentage a pu descendre à 50 % au début du mouvement, concède-t-elle. Quant aux négociations, elles sont difficiles, selon Nicolas Covarel, directeur d’exploitation. “Les revendications des syndicats changent toutes les cinq minutes”, s’agace-t-il. Pour lui, les problèmes liés aux travaux et à la circulation sont censés s’améliorer et des propositions d’amélioration ont été déjà faites. Lesquelles précisément ? Le directeur d’exploitation assure que des bus supplémentaires ont été ajoutés début septembre. “Plus de deux mais moins d’une dizaine”, chiffre-t-il à la louche.

Quant à la question de la pénibilité, il est hors de question pour Nicolas Covarel d’accorder un avantage supplémentaire aux chauffeurs du dépôt Nord. “Cela ne serait pas équitable, tous les chauffeurs travaillent dans des conditions très difficiles. On ne peut pas cibler uniquement quelques lignes”, ajoute-t-il.

En attendant, les retards se poursuivent dans les quartiers Nord. Ce matin, Ines Abeli a pu prendre le 98 sans problème pour se rendre au lycée Montgrand, devant la préfecture (6e). Si elle patiente ce soir pour rentrer à La Castellane (15e), ce n’est pas grave. Sa mère lui ouvrira la porte, pas comme le lycée. La veille, le 98 de 7h – qui ne passe que deux fois par heures – n’est pas passé. Le portail du lycée ferme à 7 h 45, “alors, j’ai fait demi-tour”, raconte-t-elle, résignée.

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Commentaires

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  1. Stéphane Coppey Stéphane Coppey

    La désinvolture avec laquelle sont traités les citoyens et les usagers des bus concernés, tant par la direction que par les syndicats de la RTM, est scandaleuse. Pour avoir emprunté ces services à plusieurs reprises ces dernières semaines, je peux témoigner, c’est un enfer. de quoi vous dégoûter à jamais des transports en commun (j’ai effectué plusieurs parcours de 30′ à pied).
    Non, mesdames messieurs les conducteurs , ce mode d’action n’est pas le bon pour faire entendre vos revendications : vous vous mettez la population et les usagers à dos, et ça ne fait pas bouger votre direction.
    Oui, les modifications de parcours et difficultés de circulation que vous subissez son totalement anormales : comment se fait-il que la direction et les syndicats ne soient pas associés à l’organisation des chantiers qui impactent le secteur ?

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    • toto toto

      Et quel mode d’action ont les salariés hormis la grève ?

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  2. LOU GABIAN LOU GABIAN

    TANT QU ON OBLIGERA PAS LES ELUS A PRENDRE LE BUS PLUTOT QUE VOITURE AVEC CHAUFFEUR CA NE CHANGERA PAS

    Economisez ce service monsieur le maire mais je signe pour qu’ on leur donne des tickets de bus afin de se déplacer a Marseille

    IL comprendront les plaintes des voyageurs

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    • barbapapa barbapapa

      Oui, très bonne proposition, qui devrait être efficace.

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  3. Alceste. Alceste.

    Les plaintes des voyageurs sont légitimes, justifiées.
    Les travaux pour aménager la voirie sont incontounables et “tanquer” une grève pour cela est anormal et révoltant , mais pour les syndicats tout est bon . Particularité marseillaise .
    Quand une cause est juste pas de problème , la gréve est un moyen, mais quand elle est absurde et injustifiée là il faut arrétêr.
    Continuez les “gars” , faudra pas vous plaindre quand les bus et métros seront automatisés à Marseille , vous n’aurez plus d’embouteillages sans doute , mais pour le reste aussi.

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  4. julijo julijo

    ines abeli habite la castellane et va au lycée montgrand ? bizarre, mais bon le problème n’est pas là.

    j’ai utilisé ces lignes il y a une dizaine d’années, vers le lycée nord…..une pagaille sans fin. les horaires non respectés, les bus bondés qui ne s’arrêtent plus, les lignes mal fichues…..c’est pas nouveau.
    on paye là des années d’oubli de ces quartiers. travaux ou pas.

    et puis les grèves, oui ça enquiquine tout le monde, mais comment faire pression ? “cause juste ou pas”, qui décide que c’est “juste” – les usagers coincés, les chauffeurs rtm ? – en l’occurrence, là, sans grève, personne n’en parlerait, si ?
    (comme pour la sncf ?)

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    • Alceste. Alceste.

      Les grèves n’enquiquinent surtout pas les directions de la RTM et où de la sncf , les motifs des grévistes se mettent à dos les usagers, car la notion de client est inconnue chez ces gens là

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    • LOU GABIAN LOU GABIAN

      Vous oubliez zineb qui habite a la bricarde et qui va travaille a 4h du matin faire le menage chez AUCHAN a st loup

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  5. Alceste. Alceste.

    Barbapapa vous avez entièrement raison. Il faut le faire.
    Un seul élu a osé en utilisant le 31 à Marseille durant la campagne électorale, un homme proche du Peuple, compréhensif des difficultés marseillaises et solidaire en matiere de transport en commun.
    Un seul,Melanchon, qui depuis cette expérience terrain et élective a disparu totalement de Marseille, plus revu. Totalement traumatisé,il ne voyage maintenant qu’en Business ou en Première.
    Que le Créateur preserve de cette expérience les Vassal, Pila,Payan,Ravier,Muselier, LRP ou Moraine ( surtout lui),ils pourraient faire comme Melanchon ,s’évaporer .
    Mais cela pourrait être en fait la solution !

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  6. Electeur du 8e © Electeur du 8e ©

    Facile de taper sur les grévistes pour éviter de rechercher les responsabilités dans le b.rdel ambiant. C’est tout à fait normal que de gros travaux de voirie aient un impact lourd sur les services de bus. C’est tout à fait anormal que cet impact ne soit pas prévu et géré en amont, en concertation entre la métropole et la RTM.

    De tels travaux font l’objet d’un planning : on sait où, quand et pour combien de temps ils auront lieu. On peut donc parfaitement adapter les horaires, voire les trajets des bus, sans attendre que les conducteurs et les passagers en subissent les conséquences. C’est ce qui se fait dans d’autres réseaux que je connais.

    Évidemment, ça suppose un minimum de compétence, et surtout ça suppose de ne pas tenir les transports collectifs pour quantité négligeable, et leurs usagers pour des moins que rien, contrairement à la tradition locale.

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  7. toto toto

    Il est quand même très pénible que les journalistes parlent toujours de grève perlée alors qu’il n’en est rien.
    Les salariés font grève d’eux heures par jour, point. Idem pour les agents des écoles.
    Je rappelle que la grève perlée est illégale.
    Il serait donc souhaitable que les journalistes aillent faire un petit tour sur internet avant d’écrire leurs articles. Ça leur éviterait d’écrire n’importe quoi.
    Premier résultat sur google:
    https://culture-rh.com/greve-perlee-definition-droit-liceite/
    Bonne lecture ! Et faites passer l’info à vos collègues.

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