LA MÉTROPOLE EXISTE-T-ELLE ?
Depuis la manifestation de l’absence de rationalité dans l’établissement de son budget, on peut se demander si la métropole marseillaise existe, en-dehors des effets d’annonce.
L’absence de débat sur le budget de la métropole
Le débat financier qui a eu lieu le jeudi 20 octobre a plutôt consisté en un dialogue de sourds. Alors que l’échange politique qui devait avoir lieu aurait dû consister dans un débat sur des choix et sur des orientations, voire sur des projets, il s’est limité à la confrontation devenue classique entre l’exécutif de la métropole à la recherche d’une limitation de la fiscalité et celui de la ville de Marseille à la recherche d’une politique de solidarité. Il ne s’est pas agi d’un débat budgétaire, mais de la mise en scène désormais classique de l’absence de discussion et même de confrontation entre les deux dirigeants de la métropole, celui de sa majorité et celui de son opposition. Entre le maire de Marseille et la présidente de la métropole et les maires qui la soutiennent, on a pu assister à la énième mise en scène d’un dialogue impossible. Entendons-nous bien : il ne s’agit pas, pour moi, de souhaiter un ramollissement des confrontations dans une conversation polie à la recherche de la fin des conflits, mais il s’agit, plutôt, de profiter du débat budgétaire pour exprimer plus clairement les choix des uns et des autres, afin de rechercher les lignes de conflit, afin d’élaborer une politique métropolitaine faisant leur place aux uns et aux autres dans l’élaboration d’un véritable projet politique métropolitain.
Les observations de la Chambre régionale des comptes
La Chambre régionale des comptes a publié un avis sévère sur le budget de la métropole. Dans ce rapport, plusieurs choix budgétaires sont critiqués, ainsi, surtout, que des éléments contestables dans la méthode de son élaboration. Dans le rapport de la Chambre, trois éléments, en particulier, attirent l’attention. Le premier est l’absence de rigueur dans la gestion des flux financiers de la métropole et l’insuffisance de clarté dans ses choix financiers. Le second est l’absence de la « dotation de solidarité métropolitaine », pourtant obligatoire, qui montre que la métropole ne joue pas ce rôle essentiel à l’égard des communes qui en font partie. Enfin, la C.R.C. relève l’absence de rapport d’évaluation rétrospective de l’évolution de l’activité financière de la métropole. La C.R.C. critique ainsi la métropole, à la fois, pour son absence de solidarité entre ses membres et pour son absence de réflexion sur son activité. Il s’agit, donc, à la fois d’une critique méthodologique et d’une critique politique. C’est en ce point que des institutions comme la Cour des comptes sur le plan national et la Chambre régionale des comptes sur le plan de la région P.A.C.A. sont des acteurs et des outils essentiels dans l’élaboration des politiques et des orientations. C’est bien pourquoi il ne faut pas les ignorer ni les rejeter d’un revers de main.
La confrontation entre les communes
La métropole semble essentiellement se réduire à une confrontation entre les grandes communes et les communes plus petites, et, surtout, entre Marseille et le reste de la métropole. Cette confrontation montre, une fois de plus, s’il en était besoin, que les choix qui ont orienté l’institution de la métropole en la confondant pratiquement avec le département n’avaient pas de sens. « Tous les leviers que l’on pourrait utiliser pour plus de justice sont inexistants ou utilisés à l’inverse », disait B. Payan au cours du débat. « Nous sommes dans un territoire qui, parce que mal construit, ne sait pas s’aider, avancer et passe peut-être à côté de son avenir ». C’est ainsi que l’activité de la métropole se réduit à une conflictualité entre les communes, alors qu’elle devrait apporter à tous ses habitants les moyens de bénéficier d’une union permettant de mener à bien des projets plus importants et de dispose d’aires d’activité plus étendues que ne le permettent les municipalités.
La nécessité d’un budget pour exprimer une identité politique
L’établissement du budget est un moment majeur pour l’institution d’une collectivité locale car ses orientations expriment sur le plan financier celles de la collectivité. C’est par l’élaboration et l’adoption d’un budget que l’activité financière de la métropole permet à celles et à ceux qui l’habitent de bénéficier des fruits de l’union entre les communes. Tout semble se passer, à l’occasion de ce débat budgétaire, comme s’il se réduisait à l’expression d’une hargne des « petits » – ou de ceux qui se présentent comme tels – et les « gros », ou de ceux qui se croient ou que l’on croit tels. Dans ces conditions, l’identité politique de la métropole ne peut s’exprimer. C’est de nouveau ici que se pose la question de la fiscalité. Peut-être, au fond, ce débat – ou ce dialogue de sourds – aura cet apport : il permet de comprendre ce qu’est la fiscalité. Toujours présentée comme une sorte de vol, comme le moyen pour les autorités politiques de dévorer ceux qui leur sont soumis, et c’est pourquoi ils la rejettent, la fiscalité est, en réalité, le moyen financier par lequel s’exprime la solidarité et, au-delà, par lequel se manifeste l’identité politique qui l’impose. Refuser la fiscalité ou l’alléger, ce n’est pas tant, au fond, vouloir garder son argent que chercher à amoindrir la puissance publique.
Une réforme financière
La Chambre régionale souhaite que la métropole construise une « stratégie de convergence financière ». C’est ainsi cela qui devrait orienter la réforme, à la fois institutionnelle et méthodologique, des modes d’élaboration des budgets de la métropole. Encore faut-il, pour que cette stratégie soit mise en œuvre, que ses acteurs et les pouvoirs métropolitains se rendent compte de l’urgence de cette réforme. C’est, d’ailleurs, bien pour cela que le budget rencontre tant de résistances et d’oppositions dans les collectivités locales et les intercommunalités qui font partie de la métropole : c’est parce qu’ils ont l’impression qu’on les dépossède d’une partie de leurs pouvoirs. Ce n’est pas par plaisir que nous devons procéder à cette réforme, c’est pour qu’elle permette à la métropole d’exister. Enfin.
Vous avez un compte ?
Mot de passe oublié ?Ajouter un compte Facebook ?
Nouveau sur Marsactu ?
S'inscrire
Commentaires
0 commentaire(s)
L’abonnement au journal vous permet de rejoindre la communauté Marsactu : créez votre blog, commentez, échanger avec les autres lecteurs. Découvrez nos offres ou connectez-vous si vous êtes déjà abonné.