Le directeur de la police judiciaire marseillaise limogé : “nos missions vont en pâtir”
Le directeur zonal sud de la police judiciaire a été limogé ce vendredi. Tandis que la hiérarchie met en cause sa "déloyauté" face à l'application d'une nouvelle réforme, les enquêteurs marseillais craignent des répercussions sur leur travail.
Plusieurs dizaines d'enquêteurs de la police judiciaire se sont rassemblés devant l'Evéché pour soutenir leur directeur. Photo : Violette Artaud
“Ça part de chez nous, mais ça risque de s’étendre”. Devant l’Évêché, ce vendredi après-midi, plusieurs dizaines de policiers de la police judiciaire sud se sont rassemblés pour soutenir leur directeur général. Limogé quelques heures plus tôt, Éric Arella a quitté le bâtiment dans lequel il a passé plus de 20 ans, dont 7 en tant que directeur zonal de la PJ, entouré par une haie d’honneur de ses troupes. “Il a reçu un message pendant qu’il mangeait à midi. Il a été viré comme un malpropre pour ce qu’ils ont considéré être un manque de loyauté. Mais c’est faux !”, lance l’un de ses subalternes. La nouvelle a été annoncée par Frédéric Veaux, le directeur général de la police nationale (DGPN). Elle serait la conséquence du rassemblement tenu la veille. Ce jeudi, lors de sa visite à l’Evêché, plusieurs policiers ont manifesté – en formant “une haie de déshonneur” – leur désaccord avec la réforme portant sur la nouvelle organisation de la police.
Le DGPN Frédéric VEAUX a démis de ses fonctions M. Éric ARELLA, DZPJ Marseille. Il occupait ce poste depuis 2015. Il part avec le soutien des femmes et hommes qui ont servis sous ses ordres et sous les applaudissements. pic.twitter.com/yN1vYiRRne
— Guillaume Origoni (@Gorigoni) October 7, 2022
“Tout le monde est contre cette réforme, de Molins [procureur général près la Cour de cassation, ndlr] aux plus petits enquêteurs que nous représentons, proteste devant micros et caméras Thomas, chef de groupe de l’office anti-stupéfiant et porte-parole du mouvement à Marseille. Darmanin à envoyé Veaux pour désamorcer le mouvement.” Le “Veaux-tour” comme l’appelle lui-même le ministre de l’Intérieur, est passé par plusieurs grandes villes, où les mouvements de contestation se faisaient entendre. “Éric Arella a été viré parce qu’il ne nous a pas empêchés de manifester. Théoriquement, nous n’avons ni le droit de grève, ni le droit de contester”, ajoute une autre fonctionnaire de police. “Lui n’est pas contre la réforme, mais il s’adapte à nos missions”, glisse l’un de ses collègues.
La réforme décriée vise à placer tous les différents services de police (judiciaire, renseignement, sécurité publique et police aux frontières) sous l’autorité d’un seul directeur départemental. Un projet qui fait craindre une perte de spécificité, une perte de temps et d’effectifs pour les missions des officiers de la police judiciaire. “Comme pour toute réforme, il y a des discussions, il peut y avoir des désaccords. Mais une telle déloyauté n’est pas acceptable, rapporte auprès du Parisien l’entourage du directeur général de la police nationale pour expliciter cette éviction. Les résultats à Marseille sont par ailleurs mauvais avec des niveaux records d’homicides alors que les effectifs ont été considérablement renforcés.”
Quoi qu’il en soit, le départ d’Éric Arella risque d’avoir des conséquences locales immédiates. “On craint que des sanctions tombent pour les collègues qui ont manifesté”, confie la policière citée plus haut. “Il avait une grande légitimité, son professionnalisme est largement reconnu. Il connaît le métier. Par exemple, c’est lui qui signe les autorisations pour sonoriser les voitures, il nous facilite les enquêtes. Il connaît les gens, le terrain par cœur et travaillait de concert avec la procureure. Nos missions vont en pâtir”, regrette un enquêteur marseillais. Une description élogieuse qui vient en opposition avec le portrait fait de son remplaçant désigné. Dominique Abbenanti, actuellement attaché de sécurité intérieure à Alger, doit prendre sa place. “On a l’impression qu’il va venir juste pour appliquer la réforme…”, craint encore un autre policier marseillais.
Commentaires
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Comme citoyen lambda écoutant la radio, je me suis dit: encore une c… de Darmanin: quand sera-t-il viré pour ses foucades et postures de recherche de buzz…A-t-il fait le nécessaire pour convaincre, concerter avant mise en oeuvre? Je le suspecte du contraire, mais suspecter n’est pas démontrer, surtout s’agissant de flics…
Puis, c’est dire si je réfléchis, je me suis dit que la manifestation de flics bras croisés est plutôt responsable et digne pour des fonctionnaires en mission régalienne. Avec un pouvoir moins nerveux, on devrait assumer le coup en douceur
Enfin, je me suis interrogé sur cette réforme, sa pertinence ou son opportunisme du moment. Aucun journaliste ne nous a expliqué à quoi elle devrait servir. Les gains escomptés en efficacité de service public, les économies visées, si c’est un sous objectif.
J’arrête là… mais je continue mes réflexions
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Comme dans le reste de la fonction publique, les restructurations, les concentrations, les délocalisations de services entiers sont mises en œuvre depuis pas mal de temps. Peut être que la police n’avait pas encore été touchée par ce mal… Maintenant, si la police réussi à vaincre ce mal qui affaibli le service public…
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” Les résultats à Marseille sont par ailleurs mauvais avec des niveaux records d’homicides alors que les effectifs ont été considérablement renforcés.” Pourquoi ne pas préciser qu’il y a peu, le Ministre de l’Intérieur lui-même montrait les “bons résultats” de la PJ de Marseille et vantait les mérites de ses policiers ? Le paragraphe où se situe ce passage a une présentation des plus curieuses.
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Était-ce la police judiciaire qui a enquêté sur la mort de Zineb Rédouane?
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Assedix, vous posez là une excellente question ;-(
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