[Marseille Miami] Le veau d’or
Durant l'été, la dessinatrice Émilie Seto prend les commandes de notre chronique du week-end. En cinq épisodes, elle a choisi de raconter, entre ironie et tendresse, le Marseille de la frime et du clinquant. Pour ce deuxième volet, il est question de viande plaquée or.
(Illustration : Émilie Seto)
Il y a quelques années de ça, un ancien footballeur de l’Olympique marseillais se mit en scène dévorant à Dubaï une entrecôte en or. Chacun y alla à l’époque de son petit commentaire pour s’indigner de cette débauche de clinquant ou se moquer d’une richesse supposément bien mal dépensée. Le mépris et la colère – plus ou moins légitimes – des uns et des autres étant à présent passés à autre chose, il est permis de regarder avec les yeux écarquillés ces restaurants dans lesquels il est important ici de se montrer, dans un univers parallèle à celui des “vrais” bourgeois et invisible aux grands gourous de la hype médiatique.
Aujourd’hui comme presque chaque jour je descends le boulevard Libération où hurle chaque vieille caisse qui le remonte. Timidement quelques boutiques de vins naturels ont éclos le long des trottoirs autrefois ponctués de barrières entourant des avis de péril.
Au milieu de ces tentatives probablement mort-nées de faire monter en gamme cet énième paradis de bagnoles se dresse fièrement un restaurant de viande en or, dont je reçois souvent les publicités ciblées via l’algorithme d’une célèbre application. Il est lui-même le petit frère d’un autre restaurant à la célèbre cuisson en or à la Valentine où chacun vient se filmer en train de goûter à la corne d’abondance. Dans le sillage de l’entrecôte en or de Ribéry à Dubai, ces établissements nous proposent grâce à une technique cyborg d’ingurgiter le précieux métal et de fusionner avec ce symbole de richesse.
Tous, footballeurs, influenceurs, rappeurs, y viennent fièrement poser devant de très gros morceaux d’animaux dorés.
Tout ce que cette ville peut compter de nouveaux venus dans le haut de l’échelle sociale s’y retrouve pour y vivre la vie de bourgeois, et tous, footballeurs, influenceurs, rappeurs, y viennent fièrement poser devant de très gros morceaux d’animaux dorés, et alimenter les rêves de tous ceux qui veulent la grande vie et les fantasmes d’opulence. Le message est simple venant de celui qui a connu le frigo vide, et qui, maintenant, peut manger, et beaucoup, et doré, dans une vision très ancienne et aujourd’hui dépassée qui relie surabondance et santé.
C’est un luxe de téléréalité. La viande est en or, la devanture aussi, tout comme le mobilier des toilettes, c’est de partout comme ça, l’or coule des murs, on dirait l’Assemblée nationale, c’est trop et jamais assez. De Versace à W9 et de Miami à Marseille, tout est fluo, l’internationale de la réussite sociale vénère le veau d’or, et en fait ruisseler l’huile brillante dans les veines de tout un chacun.
D’ailleurs, on vous dira que c’est une réaction parfaitement normale, c’est de la biologie, tout estomac et tout cerveau entre en fusion avec l’or fondu, pas la peine de faire comme si on avait le goût meilleur. Dans toutes les mains l’or brille de la même façon, et il n’y a pas de “quantité raisonnable” et mesurable qui sépare le bon goût du mauvais. Pensez-y la prochaine fois que vous entendrez quelqu’un faire le tri entre les bons riches qui méritent et les autres.
Commentaires
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« Qui a mangé des clous se torche de tenailles. « (François Cavanna)
C’est quand même plus chic d’avoir une feuille d’or plutôt qu’une feuille de salade coincée entre deux incisives .
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Elle a rien de mieux à faire que de chroniquer des débiles ?
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Un petit sentiment de supériorité à bon compte ?
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Après les loundgeuuuuur, les débiles.Nous progressons dans le caniveau marseillais .
Je m’attends au pire pour le prochain épisode.
Je suis très réticent et de plus en plus au terme générique de marseillais surtout au travers des personnages décrits dans ces chroniques,qui sont biens réels,et les englober comme d’autres dans le terme de “marseillais” me fait réfléchir.Rien à voir avec ces personnes ,nous vivons sur une même zone géographique mais franchement cela s’arrête là.
Alors se pose la question, qu’est ce qu’un marseillais ?
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Je ne prends pas partie pour la bêtise, même d’extraction populaire.
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