[Marseille Miami] Regarder la ville de haut
Durant l'été, la dessinatrice Émilie Seto prend les commandes de notre chronique du week-end. En cinq épisodes, elle a choisi de raconter, entre ironie et tendresse, le Marseille de la frime et du clinquant.
Au sommet du Sofitel du Vieux-Port, le Dantes Skylounge. (Illustration : Émilie Seto)
Ce sera un motif récurrent de cette série sur la frime à Marseille : une éternelle et inévitable quatre voies infernale de bagnoles barre l’entrée du cinq étoiles du Vieux-Port.
Dans le style incontournable d’un luxe qui copie à l’infini celui de toutes les villes balnéaires bétonnées du monde entier, se dressent les sept étages à la couleur indéfinissable de l’hôtel. Porte d’entrée le long de la côte avant les quartiers riches, il offre, comme tout lieu de la bourgeoisie qui se respecte, un panorama en hauteur sur ceux qui, comme moi, ne peuvent pas se permettre d’y rentrer, et ne peuvent que s’encrasser dehors au milieu des voitures.
Nouveaux et vieux riches viennent s’y prendre en photo et montrer au reste du monde qu’ils ont gravi l’Everest de la terrasse.
Au sommet du bâtiment, le DANTÈS SKYLOUNGE toise le centre, il est à la taille exacte pour que le regard s’arrête avant de ne plonger trop loin dans les quartiers Nord. Face à une floraison récente de ROOFTOPS dans la ville, je lis quelque part que le DANTÈS SKYLOUNGE se démarque en gardant son ambiance “CHIC & SELECT”. Les moyennement chics et les demi-select étant priés par la direction de se trouver un autre rooftop à la hauteur de leur ambition. La vue a beau être exactement la même que celle que l’on a depuis les jardins voisins du Pharo, nouveaux et vieux riches viennent s’y prendre en photo et montrer au reste du monde qu’ils ont gravi l’Everest de la terrasse. Sur le toit du petit monde la métaphore de l’ascension sociale est bouleversante de platitude et la vie ressemble plus souvent qu’on ne le souhaite à un gigantesque cliché de rêve de riche.
Crâner en l’air semble être un projet culturel que nous nous sommes donnés collectivement depuis quelque temps ici, et malgré mes sarcasmes et les voitures qui hurlent en bas, il faut avouer que la lente apocalypse en cours n’enlève sans doute rien au mielleux des cocktails et du crépuscule que l’on voit depuis là-haut.
Comme chaque jour, poussettes, trottinettes et passants se frottent et s’irritent pour leur place dans la chaîne alimentaire de l’occupation du mince trottoir qui longe l’hôtel.
Dans les gaz d’échappements je rêve que les canapés en velours à l’intérieur accueillent tendrement à tour de rôle chaque cul de cette ville et leur donne à tous le sentiment de plénitude et d’abondance qu’ils ne réservent qu’aux ceux des plus CHICS & SELECTS d’entre nous.
Et j’ai beau retourner le problème dans ma tête il n’y a aucune raison pour que l’on reste tous coincés en bas.
Pour en savoir plus sur le travail d’Émilie Seto, son portrait daté de septembre 2020 est à lire ici.
Commentaires
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J’ai adoré ce papier sur cette tendance marseillaises en vogue, le ” rouffeuuuu topeuuu” et le “loundgeuuuu”.
Repaire des vieux beaux qui ne veulent pas mourir, bronzés sur leurs 31 et là pour aganter la girelle. Réunion des nouveaux riches dont les sources de revenus n’ont pas trouvé leur origine dans les grandes écoles mais plutôt du côté de la cigarette de contrebande ou bien de la blanche,accompagnés de superbes automobiles allemandes,de montres suisses achetées en liquide et de superbes cagoles.
“La” classe marseillaise en un mot.
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Quelle bonne idée, cette serie ! Savoir, c’est un peu comprendre. Or, lorsqu’on est pas adepte des Rooftop, comment comprendre cette (grande) partie de notre population, qu’on n’a pas l’occasion de rencontrer autrement que dans les lieux publics ? Elle alimente notre perplexité mais fait largement que Marseille est ce qu’elle est !
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Émilie dessine très bien les immeubles mais sa description du skylounge relève du fantasme. Les « nouveaux et vieux riches » ne se fourvoient pas dans ce lieux qui reçoit majoritairement des gens des classes moyennes désireux de visiter une adresse « prestigieuse « . Ils y sont reçus par des serveurs maussades et payent vingt euros un cocktail médiocre composé essentiellement de glaçons.
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Patafanari,vieux ou nouveau ?😉
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@Patafanari: +1.
Disons que la chronique est à l’image des cocktails: trop d’aigreur et pas assez de contenu.
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Ok avec vous Patafanari et Assedix : c’est l’aigreur et le fantasme qui parlent dans cet article.
Je ne vois pas l’intérêt de regarder Marseille par le prisme du mépris entre les classes sociales.
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Bravo j’ai adoré cet article vivement le prochain !!
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