Inflation, écoles privées, copros dégradées : les dossiers chauds du conseil municipal
Le conseil municipal de ce 29 juin examinera plus de 200 rapports lors de cette dernière séance avant la pause estivale. Beaucoup de dossiers techniques, mais aussi des thématiques plus structurantes devraient nourrir les débats.
(Photo : Emilio Guzman)
Une fois n’est pas coutume, le conseil municipal marseillais qui se tient depuis l’arrivée de la nouvelle majorité le vendredi a lieu un mercredi. Un décalage pour cause de positivité au Covid-19 du maire Benoît Payan, pleinement remis depuis. Cette séance examinera plus de 200 rapports. Un ordre du jour fourni, donc, mais avec de nombreuses délibérations techniques qui ne génèreront pas forcément beaucoup de débat dans l’hémicycle. Les élus trouveront toutefois du carburant pour leurs échanges dans les différentes hausses soumises au vote et quelques dossiers immobiliers qui défrayent la chronique depuis plusieurs années.
Un Compte administratif façon grand écart
Tous comptes faits, l’année 2021 ne s’est pas exactement passée comme prévu. Le principe du compte administratif est classique : il s’agit, en écho au vote du budget en début d’année, de se retourner sur son exécution, quelques mois après sa clôture. Mais pour 2021, on note un écart important entre l’ampleur des investissements programmés (267 millions d’euros) et ceux effectivement réalisés (193 millions). La Ville l’explique notamment par les “contingences liées à la poursuite de la crise sanitaire, à l’origine du décalage de certains chantiers sous maîtrise d’ouvrage extérieure et soutenus par la Ville par des subventions d’équipement.”
L’élan donné en 2020 retombe donc de 20 millions d’euros. En particulier sur les écoles, après un budget exceptionnel consacré aux remises aux normes urgentes. Et, sur les 40 millions d’euros programmés, tout juste la moitié ont été réalisées. Dans ce domaine, outre le retard de la cité scolaire internationale portée par la région, la Ville y voit un effet “fin de cycle” des derniers chantiers de l’ère Gaudin, “avant le passage de relais à la nouvelle société des écoles marseillaises qui prendra la suite sur les nouveaux projets votés”.
Construction d’écoles et consommation d’énergie, les prix flambent
L’adjoint aux finances, Joël Canicave avait prévenu lors du vote du budget 2022 : l’inflation allait avoir des répercussions sur les finances de la collectivité. Quelques semaines plus tard, le couperet tombe : la Ville prévoit 20 millions de dépenses supplémentaires sur les fluides (gaz, électricité et essence). “Nous n’avons pas le choix, explique l’élu. Il faut bien que les marins-pompiers fassent le plein de leurs véhicules, que nous chauffions les crèches et les écoles, cela a un impact non négligeable“.
Autre effet de cisaille sur le plan financier, les marchés en cours d’attribution dans le cadre de marchés globaux de performance subissent une forte hausse du fait de la reprise de la croissance au niveau mondial et de la crise en Ukraine. Les deux phénomènes entraînent une inflation du prix des matières premières. L’enveloppe maximale allouée aux chantiers des cinq groupes scolaires grimpe de 25 millions pour un montant total de 110 millions d’euros. Les marchés sont toujours en cours d’attribution. “Nous sommes conscients que ce type de hausse aura également un effet sur le plan école”, reconnaît Joël Canicave. La Ville et l’État prévoient la reconstruction de 174 écoles pour un montant évalué à 1,2 milliard d’euros.
Le calcul complexe d’une contribution aux écoles privées en baisse
C’est un dossier qui a nécessité de jouer de la calculette. Le conseil municipal est amené à voter le montant du forfait communal versé aux écoles privées sous contrat avec l’État. Sur le papier, la donne est simple : la mairie doit donner pour un élève du privé une somme équivalente à ce qu’elle dépense pour un enfant scolarisé dans le public. Mais, en pratique, l’opacité et l’arbitraire ont souvent régné. Au point que des citoyens membres du Collectif des écoles de Marseille ont réussi à faire casser la dernière délibération datée de 2019 qui fixait ces montants. En affinant sa règle de calcul (notamment en distinguant les élèves de maternelle pour lesquels la Ville dépense plus et ceux de l’élémentaire), la majorité municipale réussit à faire baisser de deux millions d’euros la facture programmée, pour atteindre environ 13 millions d’euros, soit une moyenne proche de 1000 euros par élève.
Des sociétés dédiées pour les grands projets
Ce n’est qu’une préfiguration, mais elle est d’importance. Pour mener à bien plusieurs de ses grands projets en matière sportive, culturelle ou événementielle, la Ville entend se doter d’une ou de plusieurs sociétés dédiées. Elle lance ainsi un marché d’assistance à maîtrise d’ouvrage pour trouver la bonne formule. L’objectif est par exemple de réaliser les multiples piscines attendues dans la ville notamment dans le 3e arrondissement. Il s’agit aussi de favoriser la “rénovation lourde” de plusieurs “équipements emblématiques événementiels”. On peut penser au Dôme, au Palais des sports ou encore au parc Chanot. En exécutant ces tâches dans un satellite plutôt qu’au sein de l’administration municipale, la mairie espère trouver “agilité administrative” et “rapidité d’exécution”, précise le rapport soumis au vote.
Fin du bail à la Villa Valmer
La résiliation du bail qui lie la Ville à la SAS Villa Valmer présidée par le promoteur Pierre Mozziconacci est soumise au vote ce mercredi. Pour la mairie, il s’agit là d’un symbole de la lutte pour la préservation du patrimoine. Mais le jeu en vaut-il la chandelle ? En décidant de rompre le bail emphytéotique de 60 ans signé par l’ancienne municipalité, l’actuelle prend le risque de mettre la main au portefeuille (Lire notre article).
Requalification du Pôle média de la Belle-de-Mai
La délibération n°99 n’évoque pas la fin de la série Plus Belle La Vie. Difficile pourtant de ne pas lier le devenir des plateaux de tournage du feuilleton de France Télévision, qui doit cesser sa diffusion en novembre prochain, avec l’avenir du site où les épisodes sont mis en boite depuis 17 ans. La Ville annonce néanmoins une simple “requalification du Pôle média de la Belle-de-Mai”, dans le cadre du plan Marseille en grand. La municipalité affiche son désir de voir cet espace, créé en 2004 dans l’ancienne manufacture des tabacs de la Belle-de-Mai, et qui rassemble aujourd’hui une cinquantaine d’entreprises audiovisuelles pour quelque 800 emplois, faire l’objet “d’un plan de travaux ambitieux pour rénover le bâtiment et rehausser son offre de services.” Objectif, selon le rapport : faire de ce site une référence dans la région pour les industries culturelles et créatives (ICC), via l’amélioration de la connectivité, la création d’une salle de projection et le réaménagement des espaces communs et du parking. D’ici à l’automne prochain, la Ville entend proposer un calendrier et un “chiffrage des travaux relatifs à cette nécessaire modernisation du site”. Enfin, l’école de cinéma Kourtrajmé, jusqu’alors installée à Buropolis, devrait y emménager à la rentrée 2022. Le site devra être classé Établissement recevant du public (ERP) dans le courant de l’été.
Kalliste, Corot et Bellevue entrent en plan de sauvegarde
Pour les habitants de ces trois grandes copropriétés dégradées, le vote d’un plan de sauvegarde par la Ville et la métropole ne va rien changer à leur quotidien. Mais il s’agit là d’une étape importante du redressement de ces trois grands ensembles, cibles prioritaires du plan national Initiative copropriétés. En attendant la mise en place d’une opération de requalification des copropriétés dégradées (Orcod) dont le caractère d’intérêt national est encore en discussion. Les différents plans de sauvegarde qui concernent Kalliste, Corot et Bellevue doivent permettre de redresser les finances des copropriétés, d’aider les propriétaires à rénover leur bâti et à améliorer la gestion urbaine de proximité. Le document soumis au vote indique que le parc Corot ne conserverait qu’un bâtiment en copro.
Avis favorable sur la modification du plan d’urbanisme intercommunal
Les élus municipaux, dont l’adjointe à l’urbanisme Mathilde Chaboche, avaient bataillé ferme pour que la modification du plan d’urbanisme intercommunal (PLUI) oblige les promoteurs à imposer un tiers de logements sociaux dans les opérations supérieures à 30 logements. La métropole n’a limité cette contrainte qu’aux zones de bonne desserte, c’est-à-dire accessibles en tramway ou en métro. De la même façon, la Ville n’a pas été totalement suivie sur la surface de terres agricoles à préserver à l’échelle de Marseille et des 17 autres communes. En rappelant sa vigilance sur l’effort en matière de HLM, sur les lignes de transports et sur la nature en ville, la municipalité votera un avis favorable au document métropolitain.
La billetterie automatique expérimentée au Musée d’art contemporain
La réouverture du musée d’art contemporain [MAC] n’est pas pour tout de suite. Mais on sait déjà que lorsque le MAC de Marseille accueillera de nouveau le public, les visiteurs prendront leur ticket d’entrée via une billetterie électronique automatique. Pour la première fois un musée municipal va expérimenter cette façon de vendre des billets. La mairie dit vouloir ainsi accroitre la fréquentation de ses établissements culturels. Le texte de la délibération prend soin de préciser que la démarche s’effectue “en complémentarité des activités exercées par les agents de caisse qui demeureront positionnés au sein de cet établissement.” Mais le rapport qui affiche l’ambition de “moderniser l’action publique” et de “développer une offre culturelle interactive et dynamique”, pointe en creux les dysfonctionnements chroniques de ce service municipal. En travaux depuis avril 2019, le musée d’art contemporain devait initialement rouvrir en novembre 2021. Ouverture repoussée ensuite à mars 2022. La municipalité table désormais sur le troisième trimestre de 2022. L’automatisation de la distribution de billet sera en phase-test pendant un an. Si elle est concluante, elle pourrait être étendue, après étude, aux autres sites muséaux de la ville.
Julien Vinzent, Benoît Gilles, Jean-Marie Leforestier et Coralie Bonnefoy
Commentaires
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“De la même façon, la Ville n’a pas été totalement suivie sur la surface de terres agricoles à préserver à l’échelle de Marseille et des 17 autres communes.”
peut-on en savoir plus ?
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Pourquoi donner autant aux écoles privées qu’aux écoles publiques ? Ici, le principe d’équité consisterait à donner deux ou trois fois plus au public afin de compenser leur manque de moyen. A moins que l’égalité des subventions soient une obligation légale ? Une hérésie de plus…
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je suis d’accord avec vous! je ne comprends pas trop ça non plus. Marsactu, pourriez-vous nous éclairer ? Merci !
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Sans doute parce qu’il faut maintenir un certain pourcentage d’élèves susceptibles d’être utiles à la société et qui, devenus adultes, pourront payer les impôts destinés à subvenir à la survie des autres.
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C’est la loi Carle qui impose qu’1euro donné pour une élève d’écoles publiques doit être donné pour un élève d’écoles sous contrat. C’est le principe de Parité. Le CeM a dénonce l’opacité dans le calcul depuis 20 ans voir les dérives de la municipalité précédente (elle finançait les élèves en école maternelle, elle n’y était pas obligée avant la scolarité obligatoire des 3 ans). La dernière delib a été annulée (qui fera jurisprudence sur tout le territoire), la ville actuelle a donc ressorti la delib avec un détail du calcul et un peu moins de 3M€ d’économie à la clé. Maintenant que le détail des composantes de calcul est affichée, un second bras de fer se prépare sur ce qu’on y met dedans. En effet la parité précise qu’elle s’applique uniquement sur la pédagogie (ne pas prendre en compte la cantine, le périscolaire, etc.). Un défaut dans le calcul actuel par exemple concernant lintegration integrale des dépenses en énergie, or les écoles servent également pour les centres aérés, une partie est donc à neutraliser dans le calcul, ce qui n’est pas fait dans le calcul actuel. A suivre…
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