Concertation Noailles, année zéro
Ce samedi, la mairie des 1/7 lance une grande consultation publique sur le devenir du haut de la rue d'Aubagne. C'est la première pierre d'un projet global de rénovation qui ambitionne d'associer les habitants aux décisions.
Rue d'Aubagne. Photo : B.G.
Les années ont filé comme un nuage de poussière. Bientôt quatre ans que celle des effondrements est retombée. Deux ans que la rue d’Aubagne a rouvert partiellement à la circulation. L’ancienne place Homère porte désormais le nom de la date fatidique du 5 novembre 2018. Une plaque y commémore la mémoire des huit victimes. Autour, rien n’a vraiment changé. Des buveurs de bière anglophones côtoient maintenant les Cap-verdiens redescendus rue de l’Arc. Des jeunes tournent en scooters. La trace en creux des trois immeubles est toujours là. Comme les vigiles qui veillent ce lieu dans leur cahute. Le quartier tout entier se cherche encore un avenir.
Ce samedi, démarre enfin une forme de concertation publique sur le devenir du haut de la rue d’Aubagne. À l’initiative de la mairie des 1er et 7e arrondissements, elle prend la forme d’une “contribution” citoyenne qui consiste “à recueillir la parole des habitants et des habitués de ce quartier”. À son arrivée aux manettes, la maire de secteur Printemps marseillais, Sophie Camard a fait de la rénovation de ce quartier central une priorité politique. Le 23 octobre 2020, elle présidait une première réunion publique sur l’avenir du quartier, symboliquement accueillie dans la salle des pas perdus qui jouxte celle du conseil municipal de Marseille. La dernière réunion publique d’envergure sur le projet Noailles datait de janvier 2018. Le président de la Soleam, Gérard Chenoz, y faisait son show, brocardant les habitants absents : “ils regardent la télé à la maison !”.
La nouvelle phase de concertation qui s’ouvre est censée tourner cette page funeste. Ce samedi 12 mars, à partir de 14 heures, se tient la première de deux réunions plénières sur le devenir de ce coin de ville en étoile entre la rue d’Aubagne, la rue Jean-Roque, la rue Moustier et la rue de l’Arc. Un périmètre qui coïncide avec un des îlots prioritaires du projet partenarial d’aménagement, porté par la société publique dédiée à la lutte contre l’habitat indigne à l’échelle du centre-ville (SPLA-IN).
“Cette consultation ne concerne pas seulement le bâti, prévient Sophie Camard. Il s’agit de réfléchir ensemble sur les espaces publics, la voirie, les équipements. De laisser la place à l’imaginaire, à la créativité des habitants”. Cela comprend l’espace des trois immeubles effondrés qui doit redevenir public “sous la forme d’un mémorial, un jardin, une crèche…”
“Quel qu’il soit, le projet sera fait en accord avec les familles de victimes et les habitants”, prévient la maire. La Ville a choisi de s’appuyer pour ce faire sur le tissu associatif local qui doit permettre de faire descendre l’information au plus près des habitants et faire remonter leurs désirs sur ce qu’ils projettent dans le quartier.
Les acteurs associatifs au premier plan
L’association Destination familles est donc chargée de l’assistance à maîtrise d’ouvrage. “Avant chaque réunion publique, les partenaires associatifs vont contribuer à la consultation via des ateliers dans leurs locaux, explique Florian Grosset, le nouveau directeur de l’association. Notre démarche est fondée sur le “aller vers” pour recueillir l’avis des principaux concernés et les inciter à participer aux forums ouverts des 12 et 27 mars”. D’autres associations passent par le porte-à-porte pour sensibiliser le plus grand nombre à la démarche participative. À l’issue de ce premier temps de concertation, des “livrables” – textes, photos cartes et dessins – viendront synthétiser la pensée collective et remonter vers les décideurs publics.
Dans le même temps, un autre tournant s’opère à cet étage. Le 9 mars prochain, les élus locaux ont rendez-vous à Paris pour un comité national d’engagement de l’agence nationale de la rénovation urbaine (ANRU). Les élus municipaux et métropolitains doivent y défendre le projet grand centre-ville, les 1000 hectares du projet partenarial d’aménagement dont Noailles est un des sites prioritaires. Un projet à 600 millions pour lequel les collectivités locales espèrent 350 millions de subventions de l’agence.
Pour l’heure, Mathilde Chaboche refuse de dévoiler les grandes lignes du projet avant le grand oral de mercredi. En particulier en matière d’équipements publics, dont la liste n’a pas fait l’objet, donc, d’une concertation. “Nous y présenterons notamment une maison du projet que l’Anru est appelée à cofinancer, lâche tout de même l’adjointe à l’urbanisme. Elle devrait trouver place dans l’hypercentre. Nous regardons dans notre patrimoine s’il existe un local qui pourrait convenir”. Un temps, la métropole avait planifié de l’installer dans le site idéal de l’ancien écailler Toinou. “Le bail a fini par arriver à terme”, constate l’élue municipale. D’autres antennes de cette maison du projet pourrait venir compléter le dispositif plus au nord, à la Belle-de-Mai et à la Villette.
L’ANRU pour financer les logements sociaux
Pour le reste, l’ANRU est surtout attendue sur la part publique de la rénovation du bâti, dont 20 à 25 % seront transformés en logements sociaux. “70 % d’entre eux seront des logements très sociaux, énumère Sophie Camard. 25 % seront réservés à des salariés via le 1% logement et les 5 % restant à des procédés innovants d’accession à la propriété ou d’habitat partagé.”
Nous avons décidé de sortir de nos disputes politiques et d’assumer nos responsabilités.
Sophie Camard, maire des 1/7
Autant d’objectifs sur lesquels Ville et métropole ont réussi à s’accorder, faisant de ce consensus politique le socle d’une refondation de la politique de lutte contre l’habitat indigne. “Notre stratégie aurait pu être celle du conflit, rétorque Sophie Camard. Au contraire, nous avons décidé de sortir de nos disputes politiques et d’assumer nos responsabilités”. Le calendrier de la préparation du dossier pour l’ANRU, fixé en juillet 2021, a ainsi été tenu. L’entente a aussi débouché sur la mise en place d’un collège de maîtrise d’usage constitué d’habitants, militants, commerçants et acteurs associatifs, réclamé de longue date par plusieurs acteurs tels que le collectif du 5-novembre.
Tout cela se concrétisera au printemps par la signature de marchés communs aux deux institutions pour les assister dans la mise en œuvre de la concertation des quatre prochaines années et pour définir le projet urbain qui guidera l’action de la société publique dédiée. En son sein, on espère lancer la phase opérationnelle d’ici la fin de l’année, notamment dans les 70 immeubles propriétés publiques identifiés dans le centre-ville. Il y a à Noailles quelques bijoux de famille oubliés qui mériteraient de retrouver des habitants.
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La démarche est louable. Pourvu que ce ne soit pas une usine à gaz de plus.
Ce quartier magnifique a besoin d’une action volontaire forte. Pourvu que ça marche. Pour le bien des habitants et de Marseille. En mémoire des victimes.
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