Éric Le Dissès : “Je ne veux pas d’usine à risque à Marignane”

Interview
le 24 Sep 2021
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Ce mercredi, Marignane accueillait une réunion publique sur le projet d'installation de l'usine Satys. Classée Seveso, elle utilisera du chrome VI et de l'acide chlorhydrique, comme précédemment aux Aygalades, ce qui inquiète les habitants. Le maire de Marignane exprime à son tour son opposition au projet.

Le terrain où l
Le terrain où l'usine a prévu de s'installer se trouve dans la zone des Florides. (Photo Loeiza Alle)

Le terrain où l'usine a prévu de s'installer se trouve dans la zone des Florides. (Photo Loeiza Alle)

Ils n’ont pas sorti les fourches, mais l’accueil reste hostile. Ce mercredi, se tenait à Marignane la première réunion publique sur l’installation de l’usine Satys au sein de la zone d’aménagement concerté des Florides. Cette société spécialisée dans l’aéronautique veut construire une usine de traitement de surface qui prévoit notamment l’usage de produits dangereux et polluants comme le chrome VI et l’acide chlorhydrique. Pour cette raison, elle est classée Seveso par les services de l’État. Satys est le repreneur de l’usine PMA, qui développait cette même activité et dont les rejets en chrome VI ont durablement pollué les sous-sols sur son site des Aygalades à Marseille. Autant d’éléments qui viennent nourrir l’hostilité alors que l’enquête publique a été prolongée de 15 jours.

Devant l’inquiétude de nombreux riverains, militants associatifs et élus du cru, le commissaire enquêteur a accepté d’organiser une réunion dans la ville hôte. Pour la première fois, le maire divers droite de Marignane, Éric Le Dissès, a dit son refus du projet. Il explique à Marsactu les raisons de son choix.

Ce mercredi, vous avez publiquement indiqué votre refus de signer le permis de construire de l’usine Satys. Qu’est-ce qui explique votre position ?

Cette usine est classée Seveso par les services de l’État. Même en première catégorie, avec le risque le plus faible, cela veut dire qu’il y a des risques pour les habitants. En tant que maire, je refuse de voir s’installer des entreprises, des industries qui engendrent des problèmes pour le secteur.

Durant la réunion, vous avez également indiqué que le permis était valable. Cela veut dire que votre refus peut amener l’industriel ou même la préfecture à contester la légalité de votre refus de permis. Vous êtes prêt à prendre ce risque ?

Nous verrons bien. C’est la première fois que je refuse un permis de construire (sic). Je suis quelqu’un de très ouvert aux questions de défense de l’environnement même si je ne suis pas un extrémiste. Mais il y a des moments où il faut savoir dire non. Au département comme à la métropole, je suis un représentant de la zone de l’étang de Berre. Aujourd’hui, le territoire en a assez. Nous avons déjà la pétrochimie à Berre, les rejets d’EDF à Saint-Chamas, l’entreprise Stogaz à Marignane, cela suffit. Si le préfet ou l’industriel veulent nous amener au tribunal, ils le feront. Le tribunal dira qui a raison. Et les citoyens sauront se défendre.

Mais Satys appartient à la filière aéronautique et travaille avec Airbus Helicopters. Or, c’est pour cette raison que la zone des Florides a été créée. Un maire ne doit-il pas inciter à la création d’emplois ?

La zone des Florides, c’est moi qui l’ai créée. Je suis allé chercher Daher, le département, la communauté urbaine d’alors. Il n’a jamais été question d’entreprises qui fassent du traitement de surface. Nous n’avons pas créé cette zone pour qu’il y ait des entreprises polluantes et dangereuses. Développer le pôle aéronautique ne doit pas nous inciter à faire n’importe quoi. Aujourd’hui cette ZAC est exemplaire, avec des pistes cyclables, des espaces verts, une remarquable intégration à la ville. Et concernant l’emploi, je connais l’histoire. PMA aux Aygalades, c’est 180 emplois. À Marignane, il n’en aura plus que 120. Il n’y aura pas d’emplois marignanais. Et ce qui compte, c’est l’humain.

Mais n’est-ce pas clientéliste, un peu “not in my backyard”, de refuser l’installation de cette usine à Marignane ?

Si j’acceptais de les accueillir, vous seriez le premier à dire que je suis un mauvais maire. Je ne veux pas d’usine polluante et à risque à Marignane. Le préfet y est semble-t-il favorable, mais ce sont les services de l’État qui ont décidé de la classer Seveso. Si c’est Seveso, c’est qu’il y a un risque non ? Je suis le seul à avoir un micro à Marignane et je l’utilise.

Espérez-vous que le commissaire enquêteur donne un avis défavorable au projet ?

Je ne sais pas. Je le rencontre ce vendredi. En tout cas, il aura l’avis des maires concernés et ils sont tous contre.

 

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Commentaires

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  1. Malleus Maleficarum Malleus Maleficarum

    La Métropole pilote cette ZAC qui est un gouffre financier, la faute à un service “Développement Economique” incompétent qui n’arrive pas à commercialiser les terrains tout en restant braqué sur l’aéronautique. Et le gouffre se creuse plus encore : les rues ont été faites, mais squattées et dégradées, il va falloir en refaire un bon bout. La preuve : ils en ont fermé l’accès par des gros tas de terre.

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  2. Zumbi Zumbi

    Deux informations essentielles, à retenir pour les prochaines municipales :
    1- le maire n’a jamais refusé un permis de construire ;
    2- il est le seul à avoir un micro dans la ville.
    Le secret d’un développement urbain anarchique (Ce que quelqu’un a appelé “la destruction des villes en temps de paix”), et des petites et grandes baronnies locales.

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  3. Pascal L Pascal L

    Au lieu de :
    “de produits dangereux et polluants comme le chrome VI et l’acide chlorhydrique.”,
    Il faudrait plutôt dire :
    “de produits dangereux comme l’acide chlorhydrique.et polluants comme le chrome VI”

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  4. PierreLP PierreLP

    C’est un excellent cas d’étude entre la situation actuelle et la situation projetée.
    Acte 1 : une usine dans le XVIème arrondissement de Marseille, qui a pollué pendant des années les terrains et les nappes, sans s’en rendre compte avant la mise en évidence suite à des travaux sur le tunel SNCF en-dessous. Pour dépolluer il faut que l’usine s’en aille.
    Acte 2 : situation projetée : une nouvelle usine, plus aux normes mais toujours Seveso aux Florides. Les riverains et élus du coin n’en veulent pas. Dans d’autres lieux, il y aura les mêmes réactions, sans aucun doute. Par contre on peut supposer que côté Marseille 16, habitants et élus, les avis sont différents.

    Question : quelle est l a meilleure solution ? Pour pour Marignane, pour Marseille16, et globalement au niveau des territoires de la Métropole ou du département ?

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  5. PromeneurIndigné PromeneurIndigné

    On a compris : surtout pas d’industrie en France. L’avenir de nos jeunes est pour certains de devenir les larbins précaires des visiteurs étrangers de la France, devenue le musée et le bronze«C.L » de l’Europe. Il leur restera aussi à travailler dans la restauration, l’événementiel, le commerce et notamment l’import-export. En effet les industries c’est sale, il faut être capable de diriger des équipes, donc il faut les laisser à nos cousins germains ou .aux asiatiques Tant pis pour notre balance des paiements Espérons , nous qui en ont vu d’autres, que les crises sanitaires, financières écologiques sécuritaires Etc. ne perturberont pas trop le plan de carrière dès intéressés

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