Mariani et Muselier s’assoient sur la loi pour multiplier les promesses sécuritaires
Les deux favoris pour les élections régionales cherchent à élargir les champs d'intervention en matière de sécurité. Pourtant, la justice a déjà rappelé à la région les limites que lui impose la loi. Les deux candidats assurent être en mesure de passer outre.
Comme Renaud Muselier, Thierry Mariani assume de faire des propositions qui dépassent le champ d'action de la région en termes de sécurité. (Photo LC)
Renaud Muselier à Aix puis à Montgenèvre, Thierry Mariani à Nice. Ces derniers jours, le président de région LR et son principal challenger soutenu par le Rassemblement national ont présenté leurs programmes en matière de sécurité. Tous deux rivalisent de mesures pour augmenter les moyens régionaux dédiés à la sécurité, au contraire de Jean-Laurent Félizia, candidat écologiste de l’union de la gauche qui entend privilégier la médiation. Les deux favoris collent ainsi à ce que les sondages présentent comme la priorité des Français à l’approche du scrutin des 20 et 27 juin prochains.
Leurs programmes apparaissent en réalité très proches, détachant trois priorités : la sécurisation aux abords des lycées, la sûreté dans les trains régionaux et la lutte contre les violences familiales. “Les proviseurs qui en feront la demande pourront avoir à l’extérieur du lycée une garde régionale. En plus des 200 médiateurs existants, ces professionnels de la sécurité interviendront pour faire de la dissuasion contre le harcèlement et les stupéfiants”, illustre ainsi David Galtier, général de gendarmerie en retraite et colistier de Renaud Muselier. Thierry Mariani veut quant à lui remplacer ces médiateurs par des “agents de sécurité”.
Drones ou wagons-sécurité
Dans les trains, le RN entend multiplier par quatre le nombre d’agents de sûreté sur la durée du mandat. Renaud Muselier veut en augmenter le nombre dès les six premiers mois du mandat. Chacun a sa mesure supplémentaire : des drones pour veiller sur les rails aux abords des gares et éviter les vols de cuivre pour le candidat de droite, un “wagon-sécurité” dans chaque train avec un personnel de la sûreté ferroviaire à bord pour son rival RN.
Renaud Muselier propose de participer à la création de 1500 places de prison et Thierry Mariani veut créer un fonds d’accompagnement des équipements sécuritaires pour les communes.
La liste est longue, mais les candidats veulent aller plus loin encore. David Galtier l’exprime clairement : “Nous voulons, contrairement à nos adversaires, proposer une approche globale de la sécurité.” Avec pour ce faire rien de moins que 20 % du budget de la collectivité, autant que pour le développement économique et la formation, compétences clé de la région. Renaud Muselier propose ainsi pêle-mêle de participer à la construction de 1500 places de prison ou d’améliorer les conditions aux postes-frontières de Montgenèvre. Avec Thierry Mariani, il partage l’envie d’un fonds dédié à l’accompagnement des équipements sécuritaires dans les communes, de la vidéo-surveillance à l’équipement des polices municipales.
Mais cette débauche de moyens et de mesures a des limites que les candidats franchissent allègrement. Le 17 décembre 2019, un jugement du tribunal administratif de Marseille a sévèrement recadré l’action de la région en matière de sécurité. En 2015 et 2016, Christian Estrosi, alors président de la région et aujourd’hui colistier de Renaud Muselier avait souhaité mettre en place un “bouclier sécurité”. Une mesure que le préfet avait déféré en justice.
Les mesures d’Estrosi pointées comme “illégales”
Cette décision, jamais publiée à ce jour, a fixé des cadres très clairs que la région n’a pas contesté en appel, la rendant définitive. Elle rappelle les principes de la loi Notre de 2015 qui, dans une volonté de réduire le mille-feuille administratif, a clarifié les rôles de chacune des collectivités locales. En matière de sécurité, la région ne peut pas être partout tout le temps et les juges ont successivement bouché les interstices légaux dans lesquels la région avait tenté de s’infiltrer. Ni “la compétence qui lui est attribuée en matière d’aménagement du territoire”, ni “le développement touristique régional” ne peuvent permettre de justifier ces investissements. Elle n’est pas davantage fondée à défendre qu’il s’agit au sens de la loi d’un “service public de proximité dont l’exercice nécessiterait le concours de plusieurs collectivités territoriales”. Le tribunal administratif adresse alors une conclusion sans appel :
Le principe de la création d’un fonds de soutien de dix millions d’euros aux forces de sécurité permettant de contribuer à la mise en sécurité des territoires est illégal.
Ce jugement, ni les équipes de Renaud Muselier, ni celles de Thierry Mariani ne l’ignorent. Mais ils se disent persuadés de pouvoir passer outre s’ils sont élus, de même que pour es dispositions de la loi Notre. Ils évoquent en exemple les mesures similaires prises dans d’autres régions et jamais contestées devant la justice, en Rhône-Alpes ou en Île-de-France. En coulisses, l’entourage de Renaud Muselier attribue à la bataille politique qui l’opposait alors au Premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve la saisine de la justice par le préfet. Quoi qu’il en soit, la justice administrative a déjà retoqué l’argument :
La circonstance que la région Île-de-France ait adopté des actes mettant en place des mesures similaires à celles contenues dans la délibération attaquée ne permet pas de rattacher les mesures en cause à une compétence attribuée par la loi à la région.
“Qui ne tente rien n’a rien”
Après ce passage au tamis de la loi, ne resteraient que les promesses liées aux TER et aux lycées, où la région est dans son domaine d’action. Quand on lui rappelle cet obstacle, David Galtier ne se départ pas de son volontarisme : “Qui ne tente rien n’a rien ! Dans le fond, je pense qu’il faudrait changer la loi. Je suis sûr que ce sont des choses qui peuvent évoluer dans les six ans.” Mais il revient rapidement au fond de la politique qu’il veut défendre : “À Montgenèvre, il y a des locaux de stationnement près de la police aux frontières. Il y a parfois de 35 personnes [migrantes] qui attendent la police italienne dans des conditions déplorables : la commune n’a pas d’argent, l’État ne le fait pas, eh bien, la région peut le faire”, assure-t-il. Quant aux prisons, “participer sur des constructions peut permettre une meilleure exécution des peines”.
Tout en estimant que Renaud Muselier va trop loin, le colistier de Thierry Mariani Antoine Baudino plaide lui aussi par un contournement de la loi : “Comme le dit Renaud Muselier, l’achat de masques pendant la pandémie n’était pas dans les compétences de la région. Eh bien, nous pensons qu’il faut faire pareil pour la sécurité. Nous ne pouvons pas nous contenter d’une lecture administrative.” En espérant que le préfet, “qui a changé depuis” sourit David Galtier, ne sera cette fois pas trop à cheval sur les principes.
Commentaires
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Beurk ! Est-ce cela la société dont nous rêvons pour nos enfants ? Celle du vivre ensemble, de l’accueil de l’autre, de l’enrichissement mutuel des cultures ? Oser continuer à faire un lien entre immigration (la plus faible que notre pays ait jamais connue) et délinquance du quotidien, quelle honte ! Prenons plutôt en main la question des racines, de l’éducation, de la culture dans les familles qui habitent ici depuis parfois bien longtemps, toutes origines confondues.
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tout à fait de votre avis.
mes “micro-trottoirs” à moi, les gens que je croise “dans ma rue”… sont beaucoup plus soucieux de leur fins de mois ou/et de trouver du travail non-précaire que des promesses sécuritaires.
on fait face aujourd’hui à une vaste fumisterie.
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Et hop, encore une fois des responsables politiques assument de dire qu’ils ne vont pas “subir” “attendre” l’administration et que “la loi est mal faite” donc on est prêt à la contourner.
Voilà, c’est leur vision de la République : chacun fait comme bon lui semble, les règlements et les lois ont s’en fiche du moment que l’on estime qu’ils sont mal faits.
Mais après on va faire la morale républicaine aux autres…
Quelle honte !
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Faut dire aussi que s’ils s’en tiennent aux compétences de la Région on se demande bien sur quoi il vont se battre?!
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Les problèmes de sécurité et d’incivilité dans les TER existent bien! Ils n’ont pas de lien spécifique avec l’immigration et ce n’est pas le sujet. S’il vous plaît, n’éludons pas la question de sécurité au nom des grands principes de la bien pensance. Le rôle des pouvoirs publics n’est il pas de protéger les plus faibles?
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Il me semble que le sujet de cet article n est pas d le nier, mais bien de rappeler qu il ne s agit pas des compétences de la Région.
Accorder 20% de son budget à ces mesures, c’est autant en moins sur ses compétences obligatoires ou d autres opérations.
Vous me direz, ” c’est un choix politique “. Alors j aimerais bien savoir aussi qu est ce qui va être coupé
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Pour revenir au sujet des Région, Hollande a essayé de nous faire croire qu’il les renforçait en faisant des méga régions, alors que ça n’a rien changé à leurs compétences tout en les éloignant un peu plus des citoyens.
PACA fort heureusement n’a pas été touchée mais, par exemple, la région Grand Est ne fonctionne absolument pas.
Pourquoi ne pas construire l’organisation territoriale sur le mode de la loi PLM? Les conseils régionaux seraient l’émanation des CG comme le conseil municipal est celle des conseils d’arrondissements. Cela aurait pour avantage de renforcer véritablement les compétences de nos régions par rapport à ce qui existe en Europe, sans les éloigner des citoyens (il faut garder les départements!), cela réduirait l’empilage administratif , limiterait le nombre d’élus avec ce qu’il nous coûtent et nous ne voterons plus qu’à un seul scrutin.
Mais l’État jacobin ne veut pas de régions puissantes, tout est là.
Alors nos élus essaient, sur ce sujet des compétences, de s’arranger avec la loi et, pour une fois, je ne les critiquerai pas.
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S’arranger avec la loi… et afficher comme priorité la lutte contre la délinquance et la criminalité, vous ne voyez pas le problème ?
“Je ne mets pas en péril mes locataires, je fais des affaires”, un exemple pas tout à fait pris au hasard : c’est celui qui est toujours l’avocat de Muselier, et élu LR régional qu’il s’agit ? Better call Saul… Quant à la bande de Mariani n’en parlons pas !
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Vous avez raison , il faut baser une société sur les bons sentiments, la tolérance,la compréhension mutuelle et tout ce qui va avec. Mais quand vous allez vous balader un dimanche dans une calanque et que vous revenez avec deux coups de couteau donnés par des mineurs, cette société basée sur les bons sentiments, etc a quand même plus que des limites.
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Vous voulez mettre un commissariat dans chaque calanque? C’est pas 20 % du budget de la Région qu il faudra mais 90!
A un moment, il va falloir être sérieux et aborder la sécurité autrement
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Des beaux rêveurs…
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Donc, ce que Mariani veut faire, Estrosi l’avait déjà voté en …2016 et s’était fait jeter par le préfet puis le tribunal.Rien de neuf sous le ciel des extrêmes autrement que les gesticulations vaines et populistes.Triste PACA
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Bravo Marsactu pour cet article fouillé et ce jugement du TA ignoré de tout le monde, même de la grande presse.
Muselier rivalise avec l’extrême droite sur les questions d’immigration et de sécurité en toute démagogie.
On s’en souviendra quand de bonnes âmes de “gauche” viendront nous demander de voter pour lui contre le grand méchant loup..
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Tous ces brasseurs d air devraient attendre d atteindre la perfection dans leurs attributions avant d aller fabriquer du mille-feuille territorial… Sur la base de leur raisonnement, on justifie les milices, un impôt révolutionnaire, …
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RML , nous en sommes à mettre des CRS devant les commissariats pour les proteger, nous en sommes à mettre des policiers pour accompagner les marins pompiers. Alors on continue ?
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RLM,vous dites la sécurité doit être abordée autrement.Autrement, comment ?
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On peut regretter que la Région consacre une partie non négligeable de son budget à des mesures ayant trait à la sécurité au détriment d’autres actions véritablement de sa compétence.
Mais quelle est la réalité de terrain pour les usagers des services publics et notamment le TER ? Sur la ligne Aix Marseille, les équipements des haltes ferroviaires sont régulièrement vandalisés, les ascenseurs handicapés n’ont pas tenu un mois, les voyageurs sont régulièrement importunés quand ils ne sont pas agressés. Les “beaux esprits bien-pensants de gauche ” qui s’expriment ici ont ils souvent pris le TER à la Busserine au petit matin pour aller bosser?
Alors si l’État se désintéresse de la question, que fait on? rien?
Les question liées à la sécurité qui, pour certains, est un gros mot, sont certainement instrumentalisées par des politiques en campagne. Le seraient elles si elles n’étaient pas une préoccupation réelle des citoyens? Ah, j’oubliais, désolé, il s’agit en fait d’un “sentiment d’insécurité “.
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