Avenir fragile au Planning familial
Avenir fragile au Planning familial
C'est caché derrière un grand portail gris, au fond d'une cour bordée de hauts immeubles que le Planning familial a élu domicile depuis octobre 2011. A l'ouverture au public, en début d'après-midi, il y a encore très peu de monde. La salle d'attente, peinte en jaune poussin, n'est remplie que des diverses affiches accrochées au mur qui alertent les visiteurs des risques du Sida, prônent la tolérance ou informent sur les différents modes de contraception.
Il y a quelques années, l'association logeait dans des locaux vétustes et inadaptés. Ce problème immobilier associé à une baisse des financements avaient poussé le planning à organiser des permanences à même la rue avant de trouver de nouveaux locaux. "Aujourd'hui, on n'est plus à la rue puisqu'on a des locaux magnifiques !", s'enthousiasme Claire Ricciardi, directrice adjointe de l'antenne marseillaise. Si l'association est désormais dotée d'un logis adéquat, son quotidien reste fragile avec des problèmes financiers sans cesse plus aigus.
"On n'a pas le droit à l'erreur"
En effet, en 2013, l'association a bouclé son budget avec un déficit de près de 67 000 euros. Une somme importante engendrée entre autres par une diminution de la subvention du conseil général des Bouches-du-Rhône, et de la titularisation d'emplois aidés, qui coïncidait avec la fin des exonérations de charges dont bénéficiaient ces postes. "On ne peut pas appeler ça une baisse de subventions, se défend-t-on du côté du CG. L'association a eu 192 000 en 2014, 238 000 en 2013 et 197 000 en 2012. A chaque fois, les demandes ne passent pas par les mêmes services : la PMI [protection maternelle et infantile, ndlr], les actions ponctuelles… Il s'agit d'une diminution des actions éducatives. Mais les subventions accordées correspondent aux dossiers que le Planning familial dépose et des besoins que le conseil général évalue".
Claire Ricciardi l'admet : "On a planté. Mais on n'a pas le droit à l'erreur. On a eu des difficultés de gestion dues à un manque de gestionnaire". Ces problèmes internes engendrés par le départ de leur ancienne direction ont plongé le Planning dans ces difficultés financières. "On n'échappera sans doute pas à des licenciements", regrette déjà la directrice adjointe. L'association emploie aujourd'hui 21,5 équivalents temps plein. "Il faut qu'on passe en dessous de la barre des 20. C'est une décision qu'on a prise avec beaucoup de difficultés". De plus, l'association devra pour la première fois fermer ses portes deux semaines durant l'été. Elle tente aussi de développer les formations qu'elle délivre en conseil conjugal et familial, seule activité aujourd'hui directement rémunératrice.
Bien sûr, l'association pourrait fonctionner avec des bénévoles, comme le font certaines antennes de la région. Mais la directrice adjointe refuse catégoriquement. "C'est un choix politique pris depuis longtemps. Si on travaille avec des bénévoles, ça signifie que ce que l'on fait n'a pas de valeur. C'est pour cela que nous avons titularisé les personnes en emplois aidés. Nous avons besoin de personnes compétentes qui ne changent pas au bout de quelques mois. Nous refusons de développer l'emploi précaire".
"On n'a plus les moyens d'être généreux"
Sur les 66 antenne nationales, le Planning familial de Marseille est l'un des plus importants de France. Les conseillers conjugaux et familiaux accueillent quotidiennement des femmes, et parfois quelques hommes, pour leur apporter leur aide. "On essaie d'être dans une écoute qui ne soit pas une expertise", explique Claire Ricciardi. L'idée est surtout de mettre en confiance les personnes sans les juger et de leur apporter une solution rapide. Ainsi, cinq médecins dont une gynécologue se relaient durant la semaine. "Nous sommes en réseau avec d'autres associations. Il ne s'agit pas d'accompagnement sur du très long terme. On est plus une passerelle vers les autres services".
L'inverse est également vrai. En effet, les hôpitaux n'hésitent pas à envoyer certaines de leurs patientes au Planning. C'est le cas par exemple pour des avortements limites. Claire Ricciardi se souvient ainsi d'une femme, Rom, envoyée par l'hôpital au Planning alors qu'elle était enceinte de 14 semaines, soit à la limite légale pour pratiquer l'intervention. C'est donc l'association qui a dû trouver une solution en urgence. De même, les hôpitaux ou les centres de planification et d'éducation familiales orientent régulièrement leurs usagers vers le Planning, notamment pour leur délivrer des plaquettes de pilules ou leur insérer un implant. Ce service, gratuit pour les patientes, a un coût pour l'association. Ainsi, "on a eu un trou de 9000 euros l'année dernière", explique Claire Ricciardi car les conseillers ont dû aller au delà de l'enveloppe de 120 000 allouée par l'Etat. "On n'a plus les moyens d'être généreux", conclut-elle.
Cette activité, emblématique du Planning familial est aujourd'hui financée par l'Etat à hauteur de 8 euros par heure de consultation, au titre d'une activité bénévole. Une somme dérisoire selon Claire Ricciardi. "Ca fait longtemps que c'est comme ça et que ça ne bouge pas. Mais les personnes qui assurent cette permanence sont salariées. Ce n'est pas parce que c'est un travail tourné vers les femmes qu'il doit être bénévole".
Commentaires
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Le Planning Familial est indispensable, le travail qu’ils font n’est fait par personne d’autre, il faut que les pouvoirs publics leur permettent de continuer sereinement.
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Je trouve le chapeau réducteur comme on peut s’en rendre compte à la lecture de l’article mais merci à Marsactu de suivre l’actualité du Planning Familial 13.
Si à force d’être la tête dans le guidon nous n’avons pas vu arriver le déficit financier, celui-ci n’est pas du qu’à un manque de gestion prévisionnel mais également à une baisse de certaines subventions et à une hausse de plusieurs charges sociales sans oublier les subventions qui arrivent de plus en plus tard. Ainsi les associations doivent de plus en plus recourir à des découverts, des prêts… qui enrichissent les banques, pour réaliser les activités pour lesquelles elles sont financées et pour payer les salaires des personnes qui les mettent en œuvre. Ainsi certaines subventions sont versées en décembre pour une action qui s’étale sur toute l’année.
Par ailleurs c’est tout le secteur associatif qui est en danger à Marseille et ailleurs dans un contexte de crise dans tout ce qui touche au social, à la santé et au culturel. Ces derniers mois les associations Hygia et SOS Viol ont fermé définitivement leurs portes et de nombreuses autres sont contraintes de licencier.
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une association reconnu d’utilité publique doit être financer pour pouvoir travailler dans la dignité, pour leurs publics, pour tous…
c’est pas 21 personnes que vous devez être c’est 200 !
Quel va être l’avenir de nos enfants pour lequel nos parents se sont battu ? et la responsabilité des politiques ?…vive le planning et vive les droits des femmes (et de tous). tchois
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ce qui montre l’intérêt de cette association militante des droits des femmes, c’est que la publicité qui apparait en même temps que l’article de Marsactu est celle d’une plate forme téléphonique (IVG.net) qui se dit à l”écoute sur l’IVG. Oh surprise! elle est tenue par des anti IVG camouflés et bien financés (eux) qui énoncent des mensonges éhontés sur les conséquences désastreuses d’une IVG pour la santé et le mental de la femme, du “bébé” et de toute la planète.
Il vaudrait mieux donner le numéro du Planning 0800 105 105 dont le slogan est “en parler sans être jugé-e”. Là on accompagne chacun et chacune vers ce qui sera possible et acceptable pour la personne elle même.
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Ce n’est pas le Planning familial qui doit être remis en cause car son utilité n’est pas à démontrer, mais le système associatif. Beaucoup d’associations se retrouvent avec le même problème : fortes de subventions plus que conséquentes elles ont embauché et développé leurs activités sans avoir de ressources propres. Le jour où les subventions (qui ne sont pas un droit acquis mais sont payées par le contribuable) cessent ou baissent, c’est la catastrophe. Il existe aujourd’hui en France un véritable lobby associatif (on le voit quand à tout bout de champ les “associations”montent au créneau)mais qui reste fragile car il ne peut exister sans le soutien financier de l’État et des collectivités. On voit donc des associations qui fonctionnent comme de véritables entreprises, sans en avoir les charges ni les obligations, multiplier les activités et les embauches alors qu’elles ne produisent que du service non rétribué. Pas étonnant que ça se casse la figure. Il serait peut-être temps de mieux reconnaître le statut de bénévole afin de limiter les charges salariales et de mieux cadrer et surveiller les dépenses des associations subventionnées afin d’éviter ce qui se passe aujourd’hui au Planning.
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“On a plus les moyens d’être généreux” dit Mme Ricciardi c’est sans doute vrai mais j’aurais aimé que cette personne précise “on ne peut plus être aussi généreux avec l’argent du contribuable” car, quelle que soit l’utilité de cette association et d’autres d’ailleurs, il ne faut pas oublier que in fine c’est nous qui payons et personnellement je trouve un peu choquant que mes impôts servent à financer l’avortement d’une femme Rom…
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“On a planté…on n’avait pas de gestionnaires…il va falloir licencier…” C’est surréaliste! Près de 200.000 euros fournis par le CG, 120.000 euros donnés par l’Etat et à l’arrivée 67.000 euros de déficit? C’est ce qui s’appelle vivre au dessus de ses moyens. Il aurait peut-être fallu réfléchir avant d’embaucher à tour de bras sans savoir si on pourrait payer les gens. Un temps plein au Smic c’est dans les 18.000 euros pas an pour l’employeur avec les charges. Multiplié par 20, pas besoin de sortir d’HEC pour comprendre que l’association allait dans le mur. Les associations subventionnées sont tenus de présenter un prévisionnel et un bilan équilibré. c’est la-dessus que se basent les institutions pour leur donner de l’argent. Et au dessus d’un certain montant l’association doit faire vérifier sa comptabilité par un commissaire aux comptes. Il semble qu’il y ait eu beaucoup de légèreté dans la gestion de l’association et beaucoup de compréhension de la part des bailleurs de fonds.
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Le travail des bénévoles n’est pas reconnu socialement, comme le travail ménager !!! car il n’y a pas de fric directement en jeu, pourtant les activités de reproduction de la force de travail sont fondamentales économiquement. Mais de la même manière que c’est un travail politique très important de faire reconnaitre l’importance sociale de tout le travail gratuit des femmes c’est un enjeu politique de trouver des bénévoles de les former et de faire reconnaitre leur travail…par des subventions. Je suppose que les paroles de Claire Ricciardi ont été retranscrites un peu rapidement, ou qu’elle a voulu faire un raccourci, mais il est regrettable.
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Un article intitulé « Interruption involontaire au planning familial » vient de paraître dans le journal Le Ravi de juillet-août. Ce reportage dans les locaux du Planning revient aussi sur l’article paru dans Marsactu.
Le Ravi est en vente dans de nombreux kiosques de la région Paca.
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