Au musée d'Histoire, Gaudin inaugure un bug

Au musée d'Histoire, Gaudin inaugure un bug

Pris de passion 2.0, le maire Jean-Claude Gaudin, désormais alerte sur les médias sociaux, a inauguré le 19 décembre dernier l'"extension numérique" du musée d'Histoire. La tablette sous le bras, l'application fraîchement installée, caméra au poing, l'auteur de ces lignes et notre reporter d'images Esther Griffe débarquent sur le seuil du musée. L'idée est de réaliser le parcours de réalité augmentée constitué en onze étapes réparties entre le musée d'histoire et le Fort Saint-Jean. A l'aide d'une application téléchargée sur smartphone ou tablette, un système de géolocalisation permet de se connecter sur une carte virtuelle qui recrée la ville en images de synthèse telle qu'elle était à l'époque antique romaine ou hellénistique.

A l'accueil, quatre personnes semblent disposées à livrer les premières explications. Mais nulle trace de prospectus sur le sujet, nul parcours détaillé. Un agent chargé de présenter le parcours  s'approche : "C'est très simple, le parcours est très bien indiqué, vous trouverez dans la ville des têtes d'Ulysse dessinées au sol avec des explications et un QR code. Il vous suffit de les suivre." Après ces brèves explications c'est l'échec pour trouver la première tête d'Ulysse dans les ruines du Port antique. Au deuxième emplacement indiqué, la Maison diamantée, la tête d'Ulysse reste introuvable.

L'écran s'affole

On décide tout de même de lancer l'application dans l'espoir d'apercevoir, reconstituée, l'entrée de la ville antique. Au lieu de cela, l'écran tactile s'affole avant de s'ouvrir sur une page qui ne projette rien de plus que les immeubles actuels, le tout sur un fond frappé d'épilepsie. Visiblement, l'application ne fonctionne pas.

Retour à l'accueil du musée une dizaine de minutes plus tard. L'agent qui nous avait renseignées évite soigneusement notre regard. "Mais que voulez-vous ?" nous interpelle un autre personnel du musée tandis que son collègue contrôleur des billets à l'entrée avoue ignorer totalement de quoi il retourne. Finalement, on parvient à capter l'attention de notre indicatrice des têtes d'Ulysse. Cette fois, elle avoue qu'elle est en incapacité de nous aider : elle n'a pas de smartphone et n'a jamais emprunté le parcours.

Branle-le-bas de combat, les agents tentent de contacter le responsable numérique. Ce dernier se révélant indisponible, un jeune homme spécialiste du multimédia est dépêché à notre rescousse. Mais il n'est en charge du multimédia que dans l'enceinte du musée et découvre avec effarement les dysfonctionnements de l'application. "L'application est en phase de rodage", indique-t-il après un coup de fil passé au responsable numérique. Bon, bon, on repassera.

Retard à l'allumage

Reste que nous avions déjà pris acte – en silence – de ce retard à l'allumage, alors que l'application était présentée dès l'ouverture dans le dossier de presse du musée. Mais plus de trois mois après l'inauguration du musée, le parcours numérique pourtant détaillé sur le site de la ville n'est toujours pas prêt. Le maire se pique de numérique, mais à la ville, l'intendance ne suit pas.

Incontestablement, avec un passage de 3000 visites par an à plus de 3000 visites par mois depuis sa rénovation (d'après les chiffres de la Ville)*, le musée d'Histoire fait figure de réussite majeure. Mais la ville n'a-t-elle pas vanté trop tôt une innovation qui, étant donné sa complexité, n'est pas encore effective ? Pourtant, le 19 décembre dernier, dans le jardin antique du musée et en présence du conservateur du musée Laurent Védrine, une simulation avait été présentée à un public conquis de retraités. Le maire était venu exprès pour l'inauguration de l'application. Qu'est-ce qui avait été alors montré sur les tablettes ? Sans doute un prototype qui devait faire illusion. Nous n'obtenons pas la réponse, le conservateur du musée n'étant pas disponible pour l'heure. Mais le rendez-vous est pris pour les geeks de Marsactu pour tester l'application, quand celle-ci fonctionnera.

*Actualisation le 17 janvier : Laurent Védrine est revenu sur les chiffres de fréquentation, plus élevés que ceux donnés par la Ville : depuis son ouverture, 86 000 visiteurs seraient venus au musée d'Histoire.