À Bouc-Bel-Air, l'ex député Mallié arrache l'investiture UMP

À Bouc-Bel-Air, l'ex député Mallié arrache l'investiture UMP

La semaine dernière encore, il était au palais Bourbon pour écouter les débats et sentir l'atmosphère. Pourtant, Richard Mallié n'est plus député depuis sa défaite en triangulaire au deuxième tour des législatives de 2012 alors qu'il tentait de ravir un troisième mandat. Mais, à 63 ans, il n'y a vu qu'une simple péripétie dans sa carrière politique. L'opération reconquête s'est enclenchée immédiatement et, à ce jeu-là, Richard Mallié a vite compris que ces appuis parisiens lui seraient d'une aide précieuse. Il vient d'être investi par l'UMP13 comme tête de liste aux municipales de Bouc-Bel-Air au prix de quelques entorses avec les usages de son parti, facilitées par son entregent national.

Car, sa reconquête du pouvoir commence par l'échelon local, l'ancien député fondateur de la droite populaire se tourne naturellement vers l'échéance la plus proche, les municipales. Problème : à Bouc-Bel-Air, son fief, le poste est déjà pris, qui plus est par un membre de sa famille politique, l'UMP Jean-Pierre Perrin. Celui-ci s'est installé dans le fauteuil de maire en 2002 sans vraiment s'y attendre. L'année précédente, lors de l'élection, il n'était pas tête de liste. En numéro 1, les Boucains retrouvaient… Richard Mallié. Mais, à l'époque, celui-ci n'avait pas respecté la législation sur les dépenses de campagne – "je ne pensais pas être élu au premier tour", dira-t-il pour justifier un compte déséquilibré – et s'est donc retrouvé inéligible à un poste de conseiller municipal donc de maire.

Un pacte vite rompu

Perrin devait donc lui tenir la place au chaud mais, comme souvent dans ces cas-là, elle s'est avérée si confortable que désormais il n'est plus question de libérer le fauteuil. Les deux hommes ont bien essayé de se mettre d'accord au lendemain de la défaite aux législatives, en vain. Tous deux ont alors convenu qu'il était urgent d'attendre la fin de l'année 2013. Mais Richard Mallié va rompre ce pacte : le 3 octobre à Bouc-Bel-Air, il annonce qu'il se lance dans la bataille municipale sans en avertir en amont le sortant. "Je ne pouvais plus tenir face à l'insistance des gens", explique-t-il aujourd'hui.

Cet affront va finir de convaincre Perrin d'y aller lui aussi et de briguer l'étiquette UMP, fort d'une règle interne au parti qui veut que, sauf entorses majeures à l'éthique, les sortants soient réinvestis. Dans ce cadre, il sait pouvoir compter sur le soutien de Jean-Claude Gaudin. Le maire de Marseille en fait d'ailleurs son meilleur argument pour repousser les assauts de Guy Teissier.

Un sondage commandé par l'UMP

Ce principe, Gaudin – qui est aussi l'ancien président de la commission nationale d'investiture – va le rappeler fermement à Richard Mallié. Jean-Pierre Perrin n'a pas démérité, il sera réinvesti s'il le souhaite. C'est alors que Mallié va actionner divers leviers. Dans un parti aux finances pourtant exsangues, ce fondateur de la Droite populaire va obtenir de Jean-François Copé la commande par l'UMP d'un sondage pour sa commune de 14 000 habitants. Une étude dont rien ne filtrera "pour ne pas impacter les comptes de campagne" mais dont le président de la fédération UMP des Bouches-du-Rhône Bruno Gilles assure qu'elle place Mallié "largement devant, dans toutes les configurations". Perrin y voit lui un sondage "orienté et réalisé un an avant, qui n'apporte rien".

Cet argument massue en poche, Mallié reprend son bâton de pèlerin. Par exemple, l'ancien questeur de l'Assemblée fait en sorte que la commission nationale d'investiture se penche sur son cas. Alors que d'habitude celle-ci ne s'arrête jamais sur les communes de moins de 30 000 habitants, elle fait une exception cette fois-ci à la demande du ministre du Travail du quinquennat Sarkozy, Xavier Bertrand, avec qui Mallié a porté la loi sur le travail dominical. Sans procéder à un vote ni prendre une décision ferme, celle-ci fait comprendre qu'il serait de bien d'investir l'ancien député.

Le jour de la décision en comité départemental, la question boucaine clignote dans l'ordre du jour. La secrétaire générale et numéro 2 de l'UMP, Michèle Tabarot, est présente aux côtés de Bruno Gilles. Perrin et Mallié sont présents. "L'ambiance est glaciale entre eux deux", estime un participant. Il a été décidé d'évacuer la question par un vote à bulletins secrets. "On n'a donné qu'un habillage démocratique. À partir du moment où on ne s'en tient pas à la règle du parti, l'histoire était pliée", râle un participant. Pour faire passer la pilule, Bruno Gilles rappelle que Perrin "n'est pas à jour de cotisation" et détaille "la situation particulière d'un ex parlementaire et ancien maire qui souhaite le redevenir". Le score sans appel : 80 % des voix pour Mallié. Son opposant part furax en claquant la porte.

Gaudin change d'avis

Peu de temps avant le lancement du scrutin, Gaudin se met à pester contre "les maires du pays d'Aix qui dansent la farigoule contre la métropole" et  à son tour choisit Mallié. Pour Perrin, cela vaut oraison funèbre. Le revirement de Gaudin ne résulte pas d'une opération du saint-esprit même si chacun sait qu'il n'a rien contre, selon sa propre formule. En cours de route, Mallié s'est chargé de lui rappeler qu'en 2014, il y aurait des sénatoriales. "Cela fait des années que nous faisons de la politique ensemble et j'ai pu me rendre compte que c'est un argument qui, avec lui, marche assez bien", s'amuse-t-il. En 2008, les victoires des dissidents Danielle Milon à Cassis et Éric Le Dissès à Marignane ont causé une double défaite au vice-président du Sénat. D'abord, à la communauté urbaine où l'UMP majoritaire n'a pas fait élire Renaud Muselier puis aux sénatoriales où, au lieu du 4-4 droite/gauche attendu, les socialistes l'ont finalement emporté cinq postes à trois.

Le sondage aura donc achevé de faire changer d'avis Gaudin. Mallié devrait bénéficier du soutien de l'UDI représentée localement par le jeune Mathieu Morateur. Mais il aura aussi à affronter la liste d'un Perrin reboosté par cette histoire qui se déclare "en guerre contre lui". "Pour moi, ça ne change rien, je savais que ça allait se passer comme ça connaissant ses méthodes, tacle-t-il. Je conduirais une liste divers droite avec le soutien de l'équipe municipale sortante. L'investiture joue peu aux municipales. Et la dernière fois, il y avait trois listes et j'ai quand même été élu au premier tour."

Richard Mallié se dit lui "confiant" dans cette campagne. Constitue-t-elle pour lui à nouveau un tremplin ? "J'ai appris qu'il fallait prendre les choses les unes après les autres", répond-il écartant toute question sur d'autres échéances électorales. S'engage-t-il à aller au bout de son mandat alors qu'une loi sur le non cumul s'annonce, là encore en 2017 ? "Oh, vous savez, il y a tellement de renoncements avec ce gouvernement…", esquive-t-il à nouveau. Nous n'en saurons pas plus. Cette absence de réponse donne tout de même un indice quant aux ambitions de l'ex député.