Le Grand conseil de la mutualité au rapport avant l'audience

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le 7 Août 2012
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Il y a des signes qui ne trompent pas. Mobilisés depuis plus d'un an et demi pour l'avenir du Grand conseil de la mutualité (GCM), syndicats et comités de soutien n'ont pas convoqué publiquement à la rescousse le tant attendu audit de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas), rendu en juin et finalement mis en ligne par la Documentation française. Un rapport qui intervient dans un contexte d'urgence pour cette entreprise mutualiste qui emploie 1188 salariés (pour 856 équivalents temps plein) et gère un réseau de 55 "oeuvres de soin" (centres de santé, dentaires, optiques, une clinique…).

Placé en redressement judiciaire depuis novembre, avec un déficit de 5,2 millions d'euros en 2011 et environ 30 millions d'euros de dettes, le GCM a de nouveau rendez-vous jeudi matin au le tribunal de grande instance de Marseille pour une audience intermédiaire, avant la fin de la période d'observation début novembre. Le risque que soit prononcée une liquidation n'étant pas exclu.

Une pièce "essentielle" de l'offre de soins

Comme le souligne Patrick Morin, administrateur du GCM représentant la Mutuelle des chantiers navals de La Ciotat et membre d'un comité de soutien, le document "pointe que le réseau de santé du GCM apporte des réponses de proximité, notamment à Miramas, Port-Saint-Louis-du-Rhône, dans les 13e et 14e arrondissements de Marseille…" Si l'offre de santé du département est dense, davantage que les moyennes régionale et nationale, l'audit montre en effet tableaux à l'appui que "pour quatre centres de santé et cinq centres dentaires, c’est l’offre du GCM qui permet d’atteindre la densité moyenne nationale en médecine générale et dentaire. Encore celle-ci n’est elle-même pas atteinte dans plusieurs secteurs". Idem "pour les cinq spécialités les plus représentées" (ophtalmologie, cardiologie, dermatologie, ORL et gynéco) où "l’offre du GCM est également essentielle dans trois secteurs au moins ; elle contribue à cette offre dans 5 autres".

Autre point mis en avant par Patrick Morin, "l'Igas confirme que nous assurons bien des missions de service public", vu le profil des patients du GCM : "tous les centres accueillent une proportion de patients « vulnérables » globalement supérieure à celle de leur zone d’attractivité", note l'Igas, avec 28% d'affections de longue durée (ALD) – contre 16% en moyenne dans le département – 19% de plus de 70 ans (contre 11%) et 15% de bénéficiaires de la CMU complémentaire (contre 10,5%).

Ce qui inspire à Dominique Eddi, secrétaire du syndicat des médecins du GCM, "une réflexion générale : alors que l'Etat est aujourd'hui totalement absent de notre problème, que compte faire le ministère de ce rapport que Xavier Bertrand avait commandité ? La ministre Marisol Touraine ne bronche pas et l'ARS (agence régionale de santé, qui dépend du ministère), qui nous a reçus il y a quelques jours, en prend acte". L'Etat à qui la direction a notamment demandé de renoncer à 8 millions d'euros de créances fiscales et sociales. Même attente de la part de Patrick Morin : "Nous sommes dans une situation d'urgence. L'Etat y a subvenu pour les banques et l'automobile… Nous avons un problème spécifique, mais on ne nous donne pas le temps de le régler. C'est une décision politique dont le président de la République a la clé", estime-t-il.

Analyse contestée

Pourtant, on l'a dit, syndicats et comités de soutien n'ont pas brandi le rapport comme un satisfecit de la nécessité absolue de sauver le GCM. Certainement car le reste du document, qui comporte 17 recommandations, est pour l'essentiel loin de leurs positions. Exemple avec l'un des points durs du conflit avec la direction : la rémunération des généralistes. Face à "l’extrême dispersion de l’activité des médecins généralistes" ("nettement plus du simple au double"), et l'insuffisance du chiffre d'affaires dégagé, elle recommande d'"améliorer la productivité médicale et revoir les modalités de rémunération des médecins généralistes en la fondant, au moins partiellement, sur l’activité".

Cette recommandation d'améliorer l'activité, Dominique Eddi n'en pense "que du bien. Mais dans ce cas créons-en les conditions. Aujourd'hui des centres fonctionnent au ralenti avec des postes vacants, on n'a pas d'informatique digne de ce nom etc." Dans cette situation, il "reste à démontrer l'efficacité" d'une rémunération à l'activité pour atteindre cet objectif. D'autant qu'il conteste fermement l'analyse de l'Igas sur le travail des généralistes. Les variations d'activité ne sont pour lui que la conséquence des densités médicales variables des territoires : "vous soulevez un caillou à Aix, vous trouvez un médecin, ce n'est pas le cas autour de l'Etang de Berre." Même si on note tout de même, à l'intérieur de chaque centre, des variations importante de l'activité des médecins…

Mais au final "on colle au centimètre à la médecine générale libérale, mais toujours au-dessus", affirme-t-il. Ce que, concernant la supériorité du GCM, la consultation de la base C@rtoSanté de l'ARS confirme largement, sauf exception à Port-Saint-Louis, Miramas et Port-de-Bouc. Le médecin juge le "rapport pas équilibré, pas honnête" :

Quand on a expliqué ça pendant 4 heures à des inspecteurs qui ne sont pas nés de la dernière pluie, ou c'est de la mauvaise foi ou c'est commandité à des fins politiques. Je ne suis pas de nature complotiste, donc je n'irais pas plus loin, mais je m'interroge.

Que faire de la clinique de Bonneveine, faut-il réorganiser les spécialités, les gardes, quelle est la responsabilité de la direction ? La suite en page 2 en cliquant à droite.

Autre sujet sensible : la clinique de Bonneveine, dont les syndicats et comités de soutiens se refusent au transfert d'activité, voire à sa fermeture. "Au regard de l’offre existante, des orientations posées par le SROS (schéma régional d'organisation des soins, ndlr), de l’activité modeste de la clinique et de l’absence d’activités très spécifiques, la disparition de la clinique n’entrainerait pas de problème majeur d’accès aux soins y compris pour l’offre de secteur 1, proposée par ailleurs par les établissements de l’AP-HM", tranche l'Igas. Qui recommande toutefois, à destination de l'Agence régionale de santé, de "garantir" la maintien de l'accès à l'IVG chirurgicale, que la clinique est l'une des rares à proposer localement, et d'"étudier" la reprise du centre de consultations externes flambant neuf ouvert fin 2010 avec l'aval de son ancêtre l'ARH (Agence régionale de l'hospitalisation) et aidé par le Fonds national de solidarité et d'action mutualiste. La vente présentant l'avantage d'épurer considérablement (15 millions d'euros) le passif de l'entreprise.

Dans la foulée, les rapporteurs semblent donner corps à ce que beaucoup voient comme un "démantèlement" du GCM. Laboratoires d'analyse, pharmacies, gardes autonomes, spécialités dans certains centres : la question du maintien de beaucoup d'activités mérite, selon l'Igas, d'être posée. Pour la pharmacie, les doutes ont d'ailleurs été suivis par la direction qui a lancé cette semaine un appel à des potentiels repreneurs. D'où cette recommandation :

Revoir le périmètre d’activité du GCM en objectivant, par une analyse médico-économique, la pertinence de l’offre du GCM par grand secteur d’activité (médical, dentaire, optique, hospitalier, médico-social).

L'organisation de l'accueil, notamment téléphonique, est aussi critiquée pour son manque d'efficacité. Réaction de Patrick Morin : "si le GCM s'est construit comme cela, c'est pour répondre à un besoin. Après, qu'il faille revoir dans le temps un certain nombre de choses, il n'y a pas d'ostracisme là-dessus".

Coopérations avec des hôpitaux locaux, regroupements de spécialistes sur des plateaux techniques – notamment en ophtalmologie – investissement dans des sondes échographiques pour les cardiologues, système de gardes : Dominique Eddi se montre ouvert à de nombreuses évolutions, "mais pas n'importe comment. Il faut toujours partir du service rendu à la population, sinon on va faire n'importe quoi". Une des pistes pour y parvenir est la mise en place d'une réflexion par territoires, en parallèle avec une réorganisation du GCM plus déconcentrée.

Le dialogue a repris, difficilement

Ce travail a d'ores et déjà été entamé par la direction, qui s'est saisie de la recommandation. Suscitant pour l'instant le scepticisme de Dominique Eddi : "Si c'est pour être au plus près des territoires, avec les médecins, les usagers, aller vers une décentralisation maximale pour baisser les charges centrales, oui. Mais si c'est pour aligner une couche supplémentaire de directeurs et de personnel administratif… Le problème c'est qu'on est toujours dans une posture de contrôle et non de confiance"

Si le "dialogue a été renoué avec la direction" ces derniers jours, Dominique Eddi dénonce "une vision très restreinte de gestionnaire, excusez-moi l'expression – "bête". Elle n'est ni sanitaire – quel est le besoin – ni politique – alors que ce dossier l'est éminemment". Pour l'heure, il ne nous a pas été possible d'obtenir un entretien avec cette dernière. Mais l'analyse de l'Igas n'est pas tendre pour les gestionnaires du GCM, dont le manque de vision et d'anticipation est souligné.

Le fonctionnement même du GCM témoigne par ailleurs de certaines carences en termes de gestion. L’absence de comptabilité analytique, le défaut de comptabilité d’engagement, une approche peu anticipatrice des sujets de ressources humaines (RH), des organisations complexes (exemple du recouvrement), et plus globalement un manque de pilotage stratégique sont à relever.

Ce qui n'est pas une raison pour que les pouvoirs publics jettent le bébé avec l'eau du bain…

Les recommandations de l'Igas :

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